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qu'il résulte des bulletins de paie produits, dont il n'est pas contesté qu'ils ont donné lieu au paiement des sommes qu'ils mentionnent, que le salarié a été rémunéré sur la base d'un taux horaire brut de 8,938 euros du 31 juillet 2008 au 30 novembre 2008, de 9,067 euros du 1er décembre 2008 au 17 janvier 2010 et de 9,066 euros du 8 février 2010 au 31 janvier 2011, exception faite de 60 heures en novembre 2010 et de 94 heures en décembre 2010 pour lesquelles il a été payé au taux horaire brut de 9,066 euros majoré de 0,272 euros, soit un taux horaire brut total de 9,338 euros ; que le salarié est donc bien fondé à solliciter un rappel de salaire sur la base du salaire minimum conventionnel pour le coefficient 140 ; que le contrat de travail à temps partiel de M. Y... ayant été requalifié en contrat de travail à temps plein, M. Y... est également bien fondé à prétendre à un rappel de salaire sur la base d'un temps complet pour les périodes travaillées, soit les périodes du 31 juillet 2008 au 1er septembre 2008, du 26 septembre 2008 au 19 janvier 2009, du 11 mars au 31 mars 2009, du 20 avril 2009 au 17 janvier 2010 et du 8 février 2010 au 31 janvier 2011 ; qu'il incombe au salarié, qui revendique le paiement d'un salaire pour les périodes intercalaires entre les contrats de travail à durée déterminée requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée, durant lesquelles il n'a pas travaillé, de rapporter la preuve de ce qu'il s'est tenu à la disposition de son employeur pour exécuter une prestation de travail ; que M. Y... ne fournit aucun élément établissant qu'il s'est tenu à la disposition de son employeur du 2 au 25 septembre 2008, du 20 janvier au 10 mars 2009, du 1er au 19 avril 2009 et du 18 janvier au 7 février 2010 ; qu'il est en conséquence mal fondé à prétendre à un rappel de salaire pour ces périodes ; qu'au vu des salaires qu'il a perçus, le rappel de salaire dû à M. Y... sur la base d'un temps complet et du salaire minimum conventionnel pour le coefficient 140 pour les périodes travaillées s'élève à la somme de 13.246,72 euros ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit en son intégralité à la demande de rappel de salaire du salarié pour un contrat de travail à temps complet, périodes intercalaires incluses, sur la base du coefficient 140 et à la demande de congés payés afférents et de condamner la société Mondial protection à payer à M. Y... la somme de 13.246,72 euros à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps complet et du coefficient 140 ainsi que la somme de 1.324,67 euros au titre des congés payés afférents ; que, sur la demande en paiement de rappel de salaire pour temps de pause : M. Y... revendique le paiement d'un temps de pause ; que conformément aux dispositions de l'article L. 3121-2 du code du travail, le temps de pause, qui s'analyse comme un arrêt de travail de courte durée sur le lieu de travail ou à proximité, ne constitue un temps de travail effectif que si le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que le temps de pause qui ne constitue pas un temps de travail effectif ne donne pas lieu en principe à rémunération ; qu'en l'espèce l'article « 3- Réduction du temps de travail » de l'accord d'entreprise sur aménagement et la réduction du temps de travail du 30 mars 2001, dont il n'est pas soutenu qu'elle est indivisible de l'article « 4-Modulation » dudit accord stipule : « la durée du travail au sens de l'article L. 212-4 du code du travail est actuellement de 39 heures hebdomadaires pour un salarié à temps complet. A compter du 30 mars 2001, elle sera portée à 35 heures de travail effectif hebdomadaire (ou 1.600 heures de travail effectif annuelles) pour un salarié à temps complet. Les temps de pause seront payés mais exclus du temps de travail effectif à hauteur d'une demi-heure par jour pour l'ensemble du personnel (soit 2,5 heures par semaine) » ; qu'il s'en déduit que le temps de pause doit être rémunéré en sus des 35 heures de travail effectif hebdomadaire ou des 1.600 heures de travail effectif annuel ; qu'il n'est pas établi en tout état de cause que M. Y... ait effectivement pu prendre, durant ses vacations, le temps de pause rémunéré prévu par cet accord ; que les plannings produits n'en font pas état ; que les bulletins de paie du salarié ne mentionnent pas le versement d'un complément de rémunération au titre des temps de pause prévus par l'accord ; | décision 17-11.477 du 13/06/2018, partie 2 |
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que M. Y... est dès lors bien fondé à prétendre à un rappel de salaire de ce chef, qu'il aurait dû bénéficier, dans le cadre de son contrat de travail à temps complet, hors périodes intercalaires entre les contrats de travail à durée déterminée requalifiés en contrat de travail à durée indéterminée, d'un temps de pause rémunéré, selon le coefficient 140, de 316,43 heures ; que la société Mondial protection lui est donc redevable de ce chef de la somme de 2.954,82 euros ainsi que de la somme de 295,48 euros au titre des congés payés afférents ; que, sur la demande en paiement de rappel de salaire au titre de la prime d'habillage/déshabillage : qu'il résulte de l'article L. 3121-3 du code du travail que les temps d'habillage et de déshabillage doivent donner lieu à contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière lorsque le port d'une tenue de travail est obligatoire et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, que l'article 5 de l'accord collectif de branche du 30 octobre 2000 relatif aux salaires et dispositions diverses fixe cette prime à 19,82 euros (130 F) par mois sur la base d'un horaire mensuel de 151,67 et prévoit que cette prime sera proratisée en fonction du nombre d'heures prestées par le salarié, son montant en valeur, 0,13 euros (0,86 F) par heure de prestation effectivement réalisée, demeurant identique quels que soient le salaire et/ou le coefficient du salarié ; que le salarié, qui a perçu une prime d'habillage/déshabillage réduite à proportion de son temps partiel, revendique un rappel de prime d'habillage/déshabillage de 284,04 euros selon le calcul suivant : 19,82 euros sur 31 mois, soit du mois de juillet 2008 au mois de janvier 2011, sur la base d'un temps complet, périodes intercalaires incluses, sous déduction de la prime déjà versée, ainsi que la somme de 28,40 euros au titre des congés payés afférents ; que M. Y..., dont le contrat de travail a été requalifié à temps complet, est bien fondé à prétendre à son entier montant pour les périodes travaillées, à l'exclusion des périodes intercalaires entre les contrats de travail à durée déterminée requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée où il n'avait pas droit à rémunération (soit du 2 au 25 septembre 2008, du 20 janvier au 10 mars 2009, du 1er au 19 avril 2009 et du 18 janvier au 7 février 2010) et des périodes de congés payés, soit du 11 au 19 janvier 2009, du 2 au 17 janvier 2010 et du 12 au 31 janvier 2011, cette prime, qui constitue un élément de rémunération, entrant déjà dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés versée au cours de ces mois ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la société Mondial protection à payer de ce chef à M. Y... la somme de 191,28 euros, outre la somme de 19,13 euros au titre des congés payés afférents ; que, sur la demande en paiement d'un rappel de prime de chien : l'article 7 de l'annexe IV de la convention collective, dans sa rédaction résultant de l'avenant du 27 septembre 2002, étendu par arrêté du 23 décembre 2002, publié au journal officiel du 4 janvier 2003, applicable au litige, dispose que les agents d'exploitation conducteurs de chien de garde et de défense propriétaires de leur chien, âgé de 18 mois, tatoué et inscrit au registre de la société centrale canine bénéficient d'un remboursement forfaitaire correspondant à l'amortissement et aux dépenses d'entretien ; que le remboursement forfaitaire est égal à 0,61 € par heure de travail de l'équipe conducteur-chien ; que le remboursement est porté à 0,80 € lorsque le chien qui remplit les conditions précédentes fait l'objet d'un certificat de dressage délivré par un dresseur patenté ou un organisme officiel ; que ce remboursement est porté à 1,06 € si le chien qui remplit l'ensemble des conditions précédentes est de plus inscrit au Livre des origines françaises et entraîné régulièrement dans un club canin ; que le salarié revendique un rappel de "prime de chien" de 4.396,13 euros selon le calcul suivant : 1,06 euros par heure pour 151,67 heures par mois durant 31 mois, soit du 1er juillet 2008 au 31 janvier 2011, périodes intercalaires incluses, sous déduction de la prime perçue à proportion du temps de travail effectivement accompli ; que la prime de chien n'a pas la nature d'un complément de salaire mais constitue un remboursement de frais, comme correspondant au remboursement d'une dépense inhérente à l'emploi effectivement exposée par le salarié, peu important son caractère forfaitaire ; que M. Y..., qui n'a été engagé que le 31 juillet 2008 et non le 1er juillet 2008 et n'a supporté de frais de chien pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur ni durant les périodes intercalaires, ni durant les heures rémunérées par suite de la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet mais non travaillées, est mal fondé à prétendre à un rappel de "prime de chien" sur la base d'un temps complet, périodes intercalaires incluses, sur 31 mois ; | décision 17-11.477 du 13/06/2018, partie 3 |
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qu'il a perçu à titre de remboursement forfaitaire, une "prime de chien" de 1,06 euros pour chaque heure de travail effectif accompli ; qu'il a été ainsi rempli de ses droits ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de débouter M. Y... de sa demande de rappel de prime de chien ; que, sur la demande en remboursement des frais d'entretien des vêtements de travail : les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur doivent être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition, d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés, et, d'autre part, que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au salaire minimum applicable ; que l'article 5 de l'annexe IV de la convention collective dispose que l'exercice de la fonction d'agent d'exploitation entraîne l'obligation formelle du port de l'uniforme sur les postes d'emplois fixes ou itinérants et pendant toute la durée du service ; que le contrat de travail ne comporte aucune stipulation relative à la prise en charge des frais d'entretien de celle-ci ; que ces frais résultant d'une sujétion particulière imposée au salarié doivent être supportés par l'employeur ; qu'il incombe dès lors à la société Mondial protection de prendre en charge le coût d'entretien de la tenue de travail de M. Y... ; que la dépense engagée par le salarié pour entretenir cette tenue, qui est certaine, doit être évaluée à la somme de 12,20 euros par mois effectivement travaillé ; qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la société Mondial protection à payer à M. Y... la somme de 292,80 euros à titre de remboursement des frais d'entretien de ses vêtements de travail ;
ALORS QUE le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat lorsqu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, d'une part, que M. Y... avait été embauché de manière quasiment continue, pendant plus de deux ans, selon contrats de travail à durée déterminée de quelques jours à quelques semaines et renouvelés, chaque fois, seulement quelques jours avant leur terme, d'autre part, que les rares périodes ayant séparé deux contrats de travail n'avaient jamais duré que quelques jours à quelques semaines ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de rappel de salaire, sans rechercher si l'ignorance par le salarié des termes de début et de fin de ses contrats de travail ne l'avait pas contraint à rester à la disposition de l'employeur entre ceux-ci, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité le montant des rappels de salaire dus à M. Y... au titre des heures supplémentaires et des congés payés y afférents aux sommes respectives de 712,79 euros et 71,28 euros ;
AUX MOTIFS QUE le régime de modulation prévu par l'article "4- Modulation du temps de travail" de l'accord d'entreprise sur l'aménagement et la réduction du temps de travail du 30 mars 2001, étant inopposable à M. Y..., la société Mondial protection est mal fondée à soutenir que seules les heures effectuées au-delà de la durée maximale hebdomadaire fixée par l'accord sont considérées comme des heures supplémentaires et que le salarié a été rempli de ses droits ; que celui-ci est fondé à prétendre au paiement d'heures supplémentaires selon le régime de droit commun ; qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que M. Y... ne produit aucun élément pour étayer sa demande en paiement d'un nombre d'heures supplémentaires supérieur à celui résultant des plannings individuels et des plannings réalisés versés aux débats par l'employeur (pièces communiquées 7 et 8) ; | décision 17-11.477 du 13/06/2018, partie 4 |
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qu'il est établi au vu des pièces produites par M. Y... et des plannings individuels et, pour partie de la période d'emploi, du détail des réalisés produits par la société Mondial protection, communiqués en pièces 7 et 8, que le salarié a effectué les heures supplémentaires suivantes : - 7 heures supplémentaires à 125 % en novembre 2008, - 1 heure supplémentaire à 125 % en décembre 2008, - 132,5 heures supplémentaires au cours de l'année 2009, dont 78,25 heures supplémentaires à 125 % et 54,25 heures supplémentaires à 150 %, - 76,75 heures supplémentaires au cours de l'année 2010, dont 42,75 heures supplémentaires à 125 % et 34 heures supplémentaires à 150 %, - heure supplémentaire au cours du mois de janvier 2011 ; que M. Y... s'étant vu ci-dessus allouer, suite à la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, un rappel de salaire sur la base de 151,67 heures de travail effectif mensuel pour les périodes travaillées, est mal fondé à prétendre au paiement des heures de travail accomplies au-delà de 35 heures par semaine, les semaines où il a travaillé plus de 35 heures, alors qu'il n'a pas travaillé plus de 151,67 heures en moyenne par mois, ni plus de 1.600 heures par an (1.607 heures du fait de la journée de solidarité), sans avoir été rémunéré pour la totalité des heures de travail correspondantes ; qu'il est donc mal fondé à prétendre au paiement d'un nombre d'heures de travail supérieur à celui qui lui a été payé sur la base d'un temps complet ; qu'aucune majoration pour heure supplémentaire n'a été payée à M. Y... ; que l'accord de modulation invoqué par la société Mondial protection étant inopposable au salarié, celui-ci est bien fondé à prétendre aux majorations légales applicables aux heures supplémentaires pour les heures de travail accomplies au-delà de 35 heures par semaine, les semaines où il a travaillé plus de 35 heures, soit une majoration de 25 % pour les heures supplémentaires accomplies au-delà de 35 heures jusqu'à la 43ème heure incluse et une majoration de 50 % pour les heures supplémentaires accomplies au-delà de la 43ème heure ; qu'il sera alloué en conséquence à M. Y..., par application des majorations légales pour heures supplémentaires, sur la base du salaire minimum conventionnel pour le coefficient 140, la somme de 712,79 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires ainsi que la somme de 71,28 euros au titre des congés payés afférents ;
ALORS QUE les heures supplémentaires se décomptant par semaine civile, le salarié a droit - nonobstant la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet - au paiement des heures supplémentaires par lui réalisées au-delà de la durée légale du travail ; qu'en jugeant au contraire que « M. Y... s'étant vu allouer, suite à la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, un rappel de salaire sur la base de 151,67 heures de travail effectif mensuel pour les périodes travaillées, est mal fondé à prétendre au paiement des heures de travail accomplies au-delà de 35 heures par semaine, les semaines où il a travaillé plus de 35 heures, alors qu'il n'a pas travaillé plus de 151,67 heures en moyenne par mois, ni plus de 1.600 heures par an (1.607 heures du fait de la journée de solidarité), sans avoir été rémunéré pour la totalité des heures de travail correspondantes », la cour d'appel a violé les articles L. 3121-10 et 3121-20 du code du travail en leur rédaction applicable au litige.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions régissant les coupures d'activité quotidiennes ;
AUX MOTIFS QUE M. Y... dont le contrat de travail à temps partiel a été requalifié à temps complet à compter du 31 juillet 2008 est mal fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 3123-16 du code du travail institué au bénéfice du salarié à temps partiel, selon lesquelles l'horaire de travail de celui-ci ne peut comporter, au cours d'une même journée, plus d'une interruption d'activité ou une interruption supérieure à deux heures, pour solliciter l'allocation de dommages-intérêts pour non-respect des temps de coupures quotidiennes ; que rémunéré sur la base d'un temps complet, M. Y... ne justifie en tout état de cause d'aucun préjudice ; qu'il convient en conséquence d'infirmer sur ce point le jugement entrepris et de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts de ce chef ;
1°) ALORS QUE l'employeur n'est pas, du fait de la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet, rétrospectivement libéré du respect de ses obligations afférentes au contrat à temps partiel, et notamment de celles lui interdisant d'imposer au salarié à temps partiel un horaire de travail comportant, au cours d'une même journée, plus d'une interruption d'activité ou une interruption supérieure à deux heures ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 3123-14 et L. 3123-16 du code du travail en leur rédaction alors applicable ;
| décision 17-11.477 du 13/06/2018, partie 5 |
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2°) ET ALORS QUE, lorsque l'employeur porte atteinte à un droit extrapatrimonial du salarié, la violation de la règle de droit cause à ce dernier un préjudice de principe dont seule l'évaluation relève de l'appréciation souveraine des juges du fond ; qu'en retenant, pour débouter M. Y... de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions régissant les coupures d'activité quotidiennes, que le salarié ne justifiait d'aucun préjudice, quand l'atteinte portée à son droit extrapatrimonial au repos lui causait nécessairement un préjudice qu'il appartenait aux juges du fond d'évaluer et de réparer, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-16 du code du travail en sa rédaction alors applicable, ensemble l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de sa demande de rappel de prime de chien ;
AUX MOTIFS QUE, sur la demande en paiement d'un rappel de prime de chien : l'article 7 de l'annexe IV de la convention collective, dans sa rédaction résultant de l'avenant du 27 septembre 2002, étendu par arrêté du 23 décembre 2002, publié au journal officiel du 4 janvier 2003, applicable au litige, dispose que les agents d'exploitation conducteurs de chien de garde et de défense propriétaires de leur chien, âgé de 18 mois, tatoué et inscrit au registre de la société centrale canine bénéficient d'un remboursement forfaitaire correspondant à l'amortissement et aux dépenses d'entretien ; que le remboursement forfaitaire est égal à 0,61 € par heure de travail de l'équipe conducteur-chien ; que le remboursement est porté à 0,80 € lorsque le chien qui remplit les conditions précédentes fait l'objet d'un certificat de dressage délivré par un dresseur patenté ou un organisme officiel ; que ce remboursement est porté à 1,06 € si le chien qui remplit l'ensemble des conditions précédentes est de plus inscrit au Livre des origines françaises et entraîné régulièrement dans un club canin ; que le salarié revendique un rappel de "prime de chien" de 4.396,13 euros selon le calcul suivant : 1,06 euros par heure pour 151,67 heures par mois durant 31 mois, soit du 1er juillet 2008 au 31 janvier 2011, périodes intercalaires incluses, sous déduction de la prime perçue à proportion du temps de travail effectivement accompli ; que la prime de chien n'a pas la nature d'un complément de salaire mais constitue un remboursement de frais, comme correspondant au remboursement d'une dépense inhérente à l'emploi effectivement exposée par le salarié, peu important son caractère forfaitaire ; que M. Y..., qui n'a été engagé que le 31 juillet 2008 et non le 1er juillet 2008 et n'a supporté de frais de chien pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur ni durant les périodes intercalaires, ni durant les heures rémunérées par suite de la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet mais non travaillées, est mal fondé à prétendre à un rappel de "prime de chien" sur la base d'un temps complet, périodes intercalaires incluses, sur 31 mois ; qu'il a perçu à titre de remboursement forfaitaire, une "prime de chien" de 1,06 euros pour chaque heure de travail effectif accompli ; qu'il a été ainsi rempli de ses droits ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de débouter M. Y... de sa demande de rappel de prime de chien ;
ALORS QUE la prime de chien prévue par l'article 7 de l'annexe IV de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité constitue, nonobstant son caractère forfaitaire, un avantage lié aux sujétions de l'emploi d'agent de sécurité cynophile ; qu'en jugeant au contraire, pour débouter M. Y... de sa demande de rappel de prime de chien, qu'elle constitue un remboursement de frais, la cour d'appel a violé le texte susvisé. | décision 17-11.477 du 13/06/2018, partie 6 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. Pascal X..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 23 mars 2017 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Sogecap, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Crystal partenaires, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Union financière George V,
3°/ à la société Compagnie générale de location d'équipements, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 16 mai 2018, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme Y..., conseiller référendaire rapporteur, M. Savatier, conseiller doyen, Mme Parchemal, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Y..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. X..., de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Sogecap, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Crystal partenaires, l'avis de M. Z..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Compagnie générale de location d'équipements ;
Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, quatrième, cinquième et sixième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 mars 2017), que M. X... a adhéré le 12 septembre 2001 à un contrat collectif d'assurance sur la vie libellé en unités de compte dénommé « Philarmonis » souscrit par l'association APCR auprès de la société Sogecap et commercialisé par un courtier grossiste, la société Union financière George V (la société UFGV), aux droits de laquelle se trouve la société Crystal partenaires ; qu'il a opté pour un support dénommé « CIIC Performance 400 +» et effectué sur son contrat les 4 et 18 décembre 2001 deux versements d'un montant respectif de 228 673 euros et 152 450 euros, financés au moyen de deux prêts personnels in fine consentis par la société Compagnie générale de location d'équipements (la société CGLE) ; qu'à la suite d'une lettre de la société UFGV du 18 mars 2008 l'informant des conséquences de la crise financière sur les performances attendues du support « CIIC Performance 400 + », M. X... a manifesté sa volonté d'exercer sa faculté de renonciation ; qu'en l'absence de réponse, il a assigné les sociétés Sogecap, UFGV et CGLE afin d'obtenir, à titre principal, le remboursement des primes versées et leur condamnation solidaire à lui rembourser la totalité des intérêts et frais payés au titre des prêts et, à titre subsidiaire, l'annulation des contrats ; qu'en cours de procédure, M. X... a procédé au rachat total de son contrat d'assurance sur la vie arrivé à échéance ; qu'après avoir conclu une transaction avec la société CGLE, il s'est désisté des demandes formées à son encontre et a réclamé la condamnation des sociétés Sogecap et UFGV au paiement de dommages-intérêts pour manquement à leur obligation d'information et de conseil ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que l'assureur ou son intermédiaire qui proposent à leur client de souscrire un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte sont tenus de lui délivrer, fût-il averti, une information adaptée à ses connaissances, sa situation personnelle et ses objectifs ; que la publicité qu'ils délivrent pour proposer à leur client de souscrire des parts de fonds commun de placement doit être cohérente avec l'investissement proposé et mentionner le cas échéant les caractéristiques les moins favorables et les risques inhérents aux options qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés ; que l'obligation d'information qui pèse sur eux ne peut être considérée comme remplie par la remise de la notice visée par la Commission des opérations de bourse lorsque la publicité ne répond pas à ces exigences ; que la cour d'appel a elle-même relevé que la brochure publicitaire délivrée à M. X... comportait des « affirmations alléchantes, telles que l'affirmation, étayée de statistiques et graphiques, selon laquelle, sur les 3 044 tests réalisés, "dans 100 % des cas, le remboursement est au moins égal à 400 %" » ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 1 |
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qu'en déboutant M. X... de ses demandes, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la publicité délivrée ne mentionnait pas les caractéristiques les moins favorables du placement qui lui était proposé et les risques inhérents aux options pouvant être le corollaire des avantages énoncés, a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ que l'assureur ou son intermédiaire qui proposent à leur client de souscrire un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte sont tenus de lui délivrer, fût-il averti, une information adaptée à ses connaissances, sa situation personnelle et ses objectifs ; que, dans ses écritures d'appel, M. X... avait fait valoir qu'au moment de la souscription du contrat d'assurance vie, il n'avait pas été correctement informé sur la nature de son investissement telle qu'elle lui a ensuite été révélée par un courrier du 18 mars 2008, émanant du courtier, décrivant un investissement devant lui procurer un revenu exceptionnel (multiplication par quatre de la somme investie), à la condition qu'aucune des quinze actions composant un panier virtuel de référence ne clôture en dessous de 40 % de sa valeur initiale aux douze dates de constatation trimestrielle des trois dernières années, même si la valeur moyenne du panier évolue à la hausse, alors qu'il pensait souscrire des parts de fonds communs de placement, suivant la mention de la note d'information qui lui était remise : « CIIC performance 400 + est un FCP géré par Lyxor Asset Management, filiale à 100 % de la Société générale, indexé sur un panier de 15 actions internationales » ; que pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel s'est fondée sur les termes de la note d'information du contrat d'assurance Philarmonis et de ses deux annexes, énonçant que leur valeur informative et leur sincérité sont avérées, sur une mention de son bulletin d'adhésion, ainsi que sur les termes de la notice agréée par la COB, soulignant que l'autorité de contrôle avait considéré que les informations figurant dans cette notice d'information étaient conformes aux exigences de clarté et de lisibilité requises par l'article 32, modifié, du règlement COB n° 89-02 ; qu'en statuant ainsi, sans se prononcer sur les éléments de preuve invoqués par M. X... démontrant que la nature réelle de son investissement n'avait pas été portée à sa connaissance lors de la souscription du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°/ que l'assureur ou son intermédiaire qui proposent à leur client de souscrire un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte sont tenus de lui délivrer, fût-il averti, une information adaptée à ses connaissances, sa situation personnelle et ses objectifs ; que pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel a relevé qu'il était expert-comptable, commissaire aux comptes et dirigeant d'une société d'expertise comptable, spécialisée notamment dans le courtage en prêts bancaires ; qu'en s'étant fondée sur la qualité d'investisseur averti qu'aurait eue M. X..., quand cette circonstance ne dispensait pas l'assureur et son intermédiaire de leur devoir d'information et de conseil, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
4°/ que la cour d'appel a relevé que M. X... était expert comptable, commissaire aux comptes et dirigeant d'une société d'expertise comptable, spécialisée notamment dans le courtage en prêts bancaires ; qu'en s'étant fondée sur la qualité d'investisseur averti de M. X..., sans faire ressortir en quoi sa profession lui conférait une compétence particulière en matière d'investissements financiers complexes, tels ceux qui lui étaient proposés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
5°/ que dans ses écritures d'appel, M. X... avait fait valoir qu'il était néophyte en matière financière et qu'il s'était inscrit, fin 2007, à une session de formation à l'« executive M.Sc Ingénierie patrimoniale du dirigeant », mais qu'il n'avait pu valider cette formation, ce qui démontrait son « incompétence » en la matière ; que la cour d'appel a relevé que M. X... était expert comptable, commissaire aux comptes et dirigeant d'une société d'expertise comptable, spécialisée notamment dans le courtage en prêts bancaires ; qu'en s'étant fondée sur la qualité d'investisseur averti de M. X... pour le débouter de ses demandes, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions démontrant le contraire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
| cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 2 |
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Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que, d'abord, la note d'information du contrat d'assurance Philarmonis exposait de façon claire et détaillée que l'épargne constituée sur un support était égale au produit du nombre d'unités de compte inscrites sur celui-ci par la valeur de l'unité de compte, et que le bulletin d'adhésion précisait, de façon non équivoque pour l'expert comptable et commissaire aux comptes qu' est M. X... que l'unité de compte était garantie en nombre mais que son montant ne l'était pas, évoluant à la hausse ou à la baisse en fonction des marchés financiers, qu'ensuite, l'annexe à cette notice présentait le produit "CIIC Performance 400 +" comme un fonds commun de placement indexé sur un panier de quinze actions internationales, que le prospectus visé par la COB décrivait ledit support et indiquait de façon explicite que les modalités de calcul de sa valeur liquidative variaient selon ses performances, le capital remboursé à l'échéance étant égal au montant le plus élevé entre un pourcentage variable compris entre 100 % et 425 % de la valeur liquidative de référence et une participation comprise entre 80 % et 120 % de la valeur moyenne d'un panier d'actions internationales et qu'enfin, si la brochure publicitaire, destinée à promouvoir le produit comportait des affirmations alléchantes, telles que celle, étayée de statistiques et graphiques, selon laquelle, sur les 3 044 tests réalisés, "dans 100 % des cas, le remboursement est au moins égal à 400 %", aucun élément ne permettait d'en affirmer le caractère mensonger, étant observé que figurait dans ce document la formule prudente suivant laquelle "Ces simulations sont le résultat d'estimations (..) à un moment donné, sur la base de paramètres sélectionnés (...), de conditions de marché à ce moment donné et de données historiques qui ne préjugent en rien des résultats futurs", la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, que M. X... avait été complètement informé des spécificités et risques liés à un investissement boursier dans un produit international soumis aux fluctuations des marchés financiers, tant à la hausse qu'à la baisse et qu'ainsi ni l'assureur ni le courtier n'avaient manqué à leur obligation d'information ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la société Sogecap et à la société Crystal partenaires la somme de 1 500 euros chacune ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de l'ensemble de ses demandes ;
Aux motifs propres que « sur la responsabilité de l'assureur, la SA Sogecap et du courtier grossiste, la SAS Crystal Partenaires venant aux droits de la SA UFGV, en l'état de ses dernières conclusions en appel, M. X..., qui s'est désisté de ses prétentions à l'égard de l'organisme prêteur, à la suite du protocole transactionnel intervenu le 14 novembre 2014 en cause d'appel avec la société CGL, ne maintient ses prétentions qu'à l'encontre de l'assureur, la SA Sogecap et du courtier grossiste, la SAS Crystal Partenaires venant aux droits de la SA UFGV, auxquels il reproche des manquements à un devoir d'information et de conseil ; que, sur les textes applicables à l'espèce, l'appelant fonde notamment ses demandes sur les articles L. 533-1 et suivants du code monétaire et financier (CMF) et notamment sur l'article L. 533-4 ; que la cour rappelle que ces dispositions ne sont applicables qu'aux prestataires de services d'investissement définis comme étant "les entreprises d'investissement et les établissements de crédit ayant reçu un agrément pour fournir des services d'investissement au sens de l'article L. 321-1" ; que le service d'investissement, tel que défini par l'article L. 321-1 du CMF, dans sa version applicable à l'espèce, comprend notamment la réception et la transmission d'ordres pour le compte de tiers, l'exécution d'ordres pour le compte de tiers, la négociation pour compte propre, la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, le conseil en investissement, la prise ferme, le placement garanti ou non ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 3 |
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que l'article D. 321-1 du CMF, dans sa version applicable à l'espèce, précise notamment que le service d'exécution d'ordres pour le compte de tiers est le fait de conclure des accords d'achat ou de vente portant sur un ou plusieurs instruments financiers, pour le compte d'un tiers, que constitue le service de placement garanti le fait de rechercher des souscripteurs ou des acquéreurs pour le compte d'un émetteur ou d'un cédant d'instruments financiers et de lui garantir un montant minimal de souscriptions ou d'achats en s'engageant à souscrire ou acquérir les instruments financiers non placés et que le service de placement non garanti est le fait de rechercher des souscripteurs ou des acquéreurs pour le compte d'un émetteur ou d'un cédant d'instruments financiers sans lui garantir un montant de souscription ou d'acquisition ; qu'en l'espèce, M. X... a souscrit le contrat d'assurance sur la vie "Philarmonis" et le support d'investissement "CIIC performance 400 +", contrat multi-supports qui peut être libellé en euros et en unités de compte proposé par l'assureur Sogecap, M. X... ayant choisi d'investir 100 % de ses fonds sur l'organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) qu'est le FCP CIIC performance 400+, conçu par la société de gestion Lyxor International Asset Management, fonds commun de placement agréé par l'AMF sous le numéro ISIN FR [...] ; que ce support FCP CIIC performance 400 + n'a pas la nature d'un portefeuille d'instruments financiers dès lors que la société d'assurances Sogecap n'a ni transmis ni conclu d'ordres pour le compte de M. X... et que n'est pas rapportée la preuve d'un service de placement, garanti ou non ; qu'il s'en déduit, comme l'a exactement retenu le jugement entrepris, que les dispositions des articles L. 533-1 et suivants du code monétaire et financier ne sont pas applicables à l'espèce ; que ne sont pas plus applicables à l'espèce les dispositions des articles L. 342-6 et suivants du code monétaire et financier relatifs au démarchage en matière de valeurs mobilières, la souscription d'un contrat d'assurance sur la vie, y compris si le support d'investissement choisi est libellé en unités de compte, et partant, les obligations de la société d'assurances et des courtiers en découlant étant régies par le code civil, en ses dispositions générales applicables à la cause, et les dispositions spéciales du code des assurances ; que, sur la méconnaissance d'un devoir d'information de la part de l'assureur et du courtier grossiste, selon l'ancien article 1147 du code civil, dans sa version applicable à l'espèce, l'acte litigieux ayant été conclu avant le 1er octobre 2016, date de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; que, selon l'article L. 112-2 du code des assurances, dans sa version applicable à la date de souscription du contrat, "l'assureur doit obligatoirement fournir une fiche d'information sur le prix et les garanties avant la conclusion du contrat. Avant la conclusion du contrat, l'assureur remet à l'assuré un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes ou une notice d'information sur le contrat qui décrit précisément les garanties assorties des exclusions, ainsi que les obligations de l'assuré. Les documents remis au preneur d'assurance précisent la loi qui est applicable au contrat si celle-ci n'est pas la loi française, les modalités d'examen des réclamations qu'il peut formuler au sujet du contrat, y compris, le cas échéant, l'existence d'une instance chargée en particulier de cet examen, sans préjudice pour lui d'intenter une action en justice, ainsi que l'adresse du siège social et, le cas échéant, de la succursale qui se propose d'accorder la couverture. Un décret en Conseil d'Etat définit les moyens de constater la remise effective des documents mentionnés à l'alinéa précédent. Il détermine, en outre, les dérogations justifiées par la nature du contrat ou les circonstances de sa souscription. La proposition d'assurance n'engage ni l'assuré, ni l'assureur ; seule la police ou la note de couverture constate leur engagement réciproque. [...]" ;
que, aux termes de l'article L. 132-5-1 du code des assurances, dans sa version applicable à la date de souscription du contrat d'assurance sur la vie litigieux : "Toute personne physique qui a signé une proposition d'assurance ou un contrat a la faculté d'y renoncer par lettre recommandée avec demande d'avis de réception pendant le délai de trente jours à compter du premier versement. [...] L'entreprise d'assurance ou de capitalisation doit, en outre, remettre, contre récépissé, une note d'information sur les dispositions essentielles du contrat, sur les conditions d'exercice de la faculté de renonciation, ainsi que sur le sort de la garantie décès en cas d'exercice de cette faculté de renonciation. Le défaut de remise des documents et informations énumérés au présent alinéa entraîne de plein droit la prorogation du délai prévu. Les dispositions qui précèdent ne s'appliquent pas aux contrats d'une durée maximum de deux mois. Elles sont précisées, en tant que de besoin, par arrêté ministériel." ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 4 |
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que la société d'assurances, dans le cas présent la société Sogecap, est tenue d'élaborer les documents contractuels d'information répondant aux exigences fixées par les articles L. 112-2 et L. 132-5-1, A. 132-4 et A 132-4 du code des assurances ; que l'intermédiaire, au sens de l'article L. 511-1 du code des assurances, qu'est le courtier grossiste, dont l'activité est régie par ledit code, en l'espèce la société Crystal partenaires qui vient aux droits de l'Union financière George V (UFGV), qui se charge de la diffusion du produit d'assurance mis sur le marché par l'assureur et qui est tenue d'informer avec précision le courtier détaillant dit direct sur le produit ; que, si le courtier direct, en l'espèce la société Marianne assurances, non partie à l'instance, est débiteur de l'obligation de délivrer et de faire signer le document d'information et de conseil au client, M. X... affirme, sans être utilement contredit sur ce point que le courtier grossiste, la société UFGV, en la personne de sa salariée, Mme A..., lui a remis une brochure commerciale du produit CIIC Performance 400 + (pièce 1 de l'appelant) ; qu'il est constant en l'espèce que le produit CIIC performance 400 + , a été élaboré par la société Lyxor Asset Management, banque d'investissement du groupe Société générale ; que M. X... reconnaît devant la cour avoir reçu, lors de la souscription du contrat d'assurance sur la vie "Philarmonis" et de la présentation du produit CIIC performance 400 +, assurée selon lui par le courtier grossiste une brochure commerciale du produit, qui aurait été, selon l'appelant, préalablement transmise au courtier grossiste par l'assureur Sogecap ; qu'il reconnaît également avoir reçu la note d'information Philarmonis et ses annexes de présentation des supports du contrat (pièce 22 de l'appelant) et enfin la note d'information agrée par la COB (pièce 3 de l'appelant), mais affirme que les documents qui lui ont été remis ne répondent pas aux exigences légales relatives au contenu de l'information contractuelle ; que la cour relève que M. X... ne conteste pas avoir signé le 14 novembre 2011 le bulletin d'adhésion au contrat collectif d'assurance sur la vie "Philarmonis" avec pour support le "CIIC performance 400 +", lequel dispose, dans une mention préétablie figurant en dernière page, au-dessus de la signature de l'adhérent, M. X..., que ce dernier reconnaît avoir reçu "un exemplaire du présent bulletin d'adhésion et de la note d'information relatifs au contrat Philarmonis, ainsi que de l'annexe de présentation des supports et les notices d'information COB des supports choisis, et certifie avoir pris connaissance des dispositions contenues dans ces documents qui précisent notamment les conditions d'exercice du droit de renonciation." ; que la signature de ce bulletin d'adhésion par M. X... n'étant plus contestée devant la cour justifie de la remise effective de la note d'information Philarmonis figurant dans la liste des documents reçus par l'adhérent ; que, sur la note d'information du contrat d'assurance Philarmonis et ses deux annexes (pièce 2 de la société Sogecap), la cour relève que cette note d'information expose de façon claire et détaillée sous le titre «L'épargne constitué » : « Vos versements nets de frais sont convertis en unités de compte représentatives de chaque support choisi. Le nombre d'unités de compte inscrits à votre adhésion pour chaque support choisi s'obtient en divisant le montant du versement (net de frais sur versement) affecté à ce support par la valeur de souscription de l'unité de compte. [
]. La valeur de souscription retenue est celle du deuxième jour ouvré suivant la date d'effet du versement si le support est à cotation quotidienne. A tout moment, l'épargne constituée sur un support... est égale au produit du nombre d'unités de compte inscrites sur celui-ci par la valeur de l'unité de compte en euros. La valeur de l'unité de compte évolue de façon quotidienne ou hebdomadaire, selon le rythme de cotation propre à chaque OPCVM, support choisi de l'investissement. Ces rythmes de cotation sont précisés dans l'annexe jointe » ; qu'en outre, sont détaillés de façon explicite, sous le titre « Le remboursement de votre épargne » la valeur de rachat et de l'unité de compte en ces termes : « La valeur de rachat est égale au produit du nombre d'unités de compte inscrites sur le support faisant l'objet d'un rachat par la valeur de l'unité de compte en euros. La valeur des unités de compte retenue, en cas de rachat total ou partiel du support, ou en cas de décès de l'assuré, est la première valeur de rachat publiée suivant la date de réception à Sogecap de votre demande de rachat ou de la déclaration de décès de l'assuré, en respectant le délai minimum de deux jours ouvrés » ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 5 |
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que cette information est complétée par l'annexe à la note d'information qui détaille les différents supports proposés et par "l'annexe aux conditions générales et à la note d'information" (Pièce 2 de Sogecap) qui présente le nouveau support, disponible du 1er octobre 2001 au 18 décembre 2001, CIIC Performance 400+ , qui rappelle que "la valeur de l'unité de compte évolue de façon quotidienne ou hebdomadaire, selon le rythme de cotation propre à chaque OPCVM, support choisi de l'investissement ", étant relevé par la cour que le bulletin d'adhésion "Philarmonis" que M. X... ne conteste pas avoir reçu (pièce 5 de la Sogecap), précise, de façon non équivoque pour l'expert-comptable et commissaire aux comptes qu'est M. X..., sous l'intitulé, figurant en caractères gras, "Evolution de l'épargne" que l'unité de compte est "garanti en nombre" mais que son montant est "non garanti, évoluant à la hausse ou à la baisse en fonction des marchés financiers", cette mention alertant de façon explicite l'adhérent ayant choisi le support CIIC performance 400+ des risques liés au choix de ce produit boursier ; que cette note et les deux annexes de présentation des supports du contrat d'assurance reçus de Sogecap (pièce 22 de l'appelant) ont été complétées par la note d'information agréée par la COB devenue l'Autorité des marchés financiers (AMF) -pièce 3 de l'appelant- ; que, sur la notice d'information agréée par la COB relative aux organismes de placements collectif en valeurs mobilières (OPCVM), l'intermédiaire est tenu, au titre de son devoir d'information, de remettre la notice relative au placement préalablement à la souscription, conformément à l'art. 32, modifié, du règlement COB n° 89-02, relatif aux OPCVM qui impose l'établissement d'une notice "remise préalablement à toute première souscription" ; qu'en l'espèce, la notice d'information COB du support choisi, le CIIC performance 400+, remise à M. X..., préalablement à son adhésion, a été rédigée par la société de gestion, la société Lyxor Asset Management, concepteur du fonds commun de placement et obtenu l'agrément de l'AMF le 25 septembre 2001 ; que, d'une part, l'autorité de contrôle, en donnant son agrément, a nécessairement considéré que les informations figurant dans cette notice d'information sont conformes aux exigences de clarté et de lisibilité requises par l'article 32, modifié, du règlement COB n° 89-02 ; que, d'autre part, la cour relève que cette notice indique de façon explicite que les modalités de calcul de la valeur liquidative du FCP CIIC performance 400+ varient selon ses performances dans les termes suivants : « le capital remboursé à l'échéance sera égal au montant le plus élevé entre un pourcentage variable compris entre 100% et 425% de la valeur liquidative de référence et une participation comprise entre 80% et 120% à la valeur moyenne d'un panier d'actions internationales » ; que, s'il est exact que la remise de cette notice, imposée par les textes, ne constitue néanmoins, au regard de l'obligation générale d'information de l'intermédiaire, que l'un des éléments concourant à l'information du client, il convient de relever que M. X... a reçu des intermédiaires de l'assureur la documentation complémentaire constituée par la note d'information Philarmonis et ses annexes dont la valeur informative et la sincérité sont avérées ; que, sur la brochure publicitaire du support CIIC performance 400+ (pièce 16 de la société demeurant, la société Crystal Partenaires), si les circonstances de la remise à M. X... de ce document de présentation du support "CIIC performance 400+" ne sont pas établies, il est constant que l'adhérent l'a eu en sa possession et que ce document comporte sur sa page de couverture le logo du courtier grossiste le "groupe Union financière George V" aux droits duquel vient la société Crystal partenaires, dont la participation dans l'information donnée à M. X... et dans le schéma d'investissement, objet du présent litige, est dès lors établie ; que, s'il est exact que cette brochure publicitaire, manifestement destinée à promouvoir le produit proposé, comporte des affirmations alléchantes, telles que l'affirmation, étayée de statistiques et graphiques, selon laquelle, sur les 3044 tests réalisés, « dans 100 % des cas, le remboursement est au moins égal à 400 % », aucun élément ne permet d'en affirmer le caractère mensonger, étant observé que figure dans ce document la formule prudente suivante : « Ces simulations sont le résultat d'estimations de SG [Société générale] à un moment donné, sur la base de paramètres sélectionnés par SG, de conditions de marché à ce moment donné et de données historiques qui ne préjugent en rien des résultats futurs. En conséquence, les chiffres et prix indiqués dans ce document n'ont qu'une valeur indicative et ne sauraient constituer en aucune manière une offre ferme et définitive de la part d'Union financière George V et/ou SG » ; qu'au regard de l'ensemble de la documentation fournie à l'adhérent éclairé qu'est M. X..., la remise de cette brochure publicitaire ne suffit pas à établir que ce dernier n'a pas bénéficié, avant la souscription du contrat d'assurance, d'une information précise, exacte et sincère de la part de l'assureur et du courtier grossiste ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 6 |
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qu'il résulte de ces constatations et énonciations que l'appelant, expert-comptable, commissaire aux comptes et dirigeant d'une société d'expertise comptable Andersons Consulting, spécialisée notamment dans le courtage en prêts bancaires, ne justifie pas d'un manquement de la part de l'assureur et du courtier de leur obligation d'information et de conseil, M. X... ayant été dûment informé et alerté des spécificités et risques liés à un investissement boursier dans un produit international soumis aux fluctuations du marché financier, tant à la hausse qu'à la baisse » ;
Et aux motifs, à les supposer adoptés, que « [
] ; qu'en revanche, il y a lieu d'examiner la demande indemnitaire formée par M. X..., dirigée in solidum contre les trois défenderesses au visa des articles 1134, 1147, 1149, 1150 du code civil et L. 533-4 du code monétaire et financier ; que, sur les manquements reprochés à l'assureur, M. X... reproche à la société Sogecap, sur le fondement de l'article L. 533-4 du code monétaire et financier, un manquement à l'interdiction de se porter contrepartie. Il soutient qu'elle a, en tout état de cause, manqué à l'obligation générale de loyauté contractuelle et à celle de rendre compte de sa gestion ; que, selon lui, un manquement aux obligations d'information, de conseil et de mise en garde, est en outre constitué ; que la défenderesse réplique que l'article L. 533-4 ne lui est pas applicable dès lors qu'elle n'a pas le statut d'entreprise d'investissement et que l'adhésion à un contrat d'assurance sur la vie n'est pas constitutive d'un service d'investissement ; qu'en outre, elle entend démontrer avoir respecté son obligation d'information en remettant à l'adhérent une note conforme à la loi ; que, selon elle, faute de contact direct avec l'adhérent, elle n'avait pas à le conseiller ; qu'enfin, l'assureur conteste tout devoir de mise en garde, relevant d'après lui du seul prêteur ; que le tribunal rappellera que les prestataires de services d'investissement sont, aux termes de l'article L. 531-1 du code monétaire et financier, définis comme les "entreprises d'investissement et les établissements de crédit ayant reçu un agrément pour fournir des services d'investissement au sens de l'article L. 321-1 » ; que la notion de service d'investissement est précisée à l'article L. 321-1 du code monétaire et financier ; qu'il s'agit notamment de la réception, de la transmission et de l'exécution d'ordres pour le compte de tiers, de la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, de placement garanti et de placement non garanti ; que l'article D. 321-1 du même code définit lesdits services ; qu'ainsi, « constitue un service de placement garanti le fait de rechercher des souscripteurs ou des acquéreurs pour le compte d'un émetteur ou d'un cédant d'instruments financiers et de lui garantir un montant minimal de souscriptions ou d'achats en s'engageant à souscrire ou acquérir les instruments financiers non placés » ; que « constitue un service de placement non garanti le fait de rechercher des souscripteurs ou des acquéreurs pour le compte d'un émetteur ou d'un cédant d'instruments financiers sans lui garantir un montant de souscriptions ou d'acquisition » ; qu'en l'espèce, M. X... ne démontre pas que le support choisi par lui avait la nature d'un portefeuille d'instruments financiers sur lequel la société Sogecap aurait transmis ou conclu, pour son compte, des ordres ; qu'il ne rapporte pas davantage la preuve de l'existence d'un service de placement garanti ni non garanti ; que la simple circonstance que la Sogecap ait soumis à la commission des opérations de bourse un document d'information relatif à ce support ne saurait induire la reconnaissance, par l'assureur, de l'existence d'un service d'investissement dès lors que l'émission des actions et parts d'OPCVM était en 2001 nécessairement soumise à la publication préalable d'une note d'information visée par la COB ; que, par conséquent, les dispositions des articles L 533-4 et suivants code monétaire et financier n'ont pas vocation à s'appliquer à l'espèce ; qu'en outre, M. X..., qui soutient que l'assureur a manqué à l'obligation générale de loyauté imposée par les articles 1134 et 1135 du code civil, n'apporte nulle preuve de ce que l'assureur aurait utilisé pour son propre compte les fonds déposés par lui ; qu'au surplus, il est mal fondé à invoquer les dispositions de l'article 1993 du code civil en l'absence de preuve d'un mandat le liant à la société Sogecap ; que, s'agissant de l'obligation d'information, M. X... reproche d'abord à l'assureur de lui avoir fourni des informations mensongères, contenues dans un dépliant de présentation intitulé « CIIC performance 400 + », document que lui a remis son courtier la société Marianne assurances ; qu'il en déduit l'existence de manoeuvres dolosives ; que Sogecap réplique qu'elle n'est pas le rédacteur de cette plaquette de présentation et que le demandeur ne saurait donc s'en prévaloir à son encontre ; qu'il est constant que le document critiqué, intitulé « CIIC performance 400 + » porte sur sa couverture le logo et le nom « Union financière George V » ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 7 |
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qu'il se compose d'abord, sur deux pages, de la notice d'information relative au support et visée par la COB puis, sur six pages, de données se rapportant au même produit et vantant ses caractéristiques, sous les titres « un maximum de sécurités», « performance et sécurité », « des performances au sommet », « un historique de performance exceptionnel », « une garantie intermédiaire de valorisation à 8 ans du capital », « 15 actions Blue Chips aux fondamentaux de grande qualité » ; qu'au bas de chacune de ces six pages ainsi qu'au dos du dépliant figure le nom de l' Union financière George V ; que le nom de Sogecap n'apparaît pas ; qu'il est constant que ce document n'a pas été remis à M. X... par l'assureur ; que, dès lors, faute de lien établi entre la société Sogecap et la pièce litigieuse, la société Sogecap ne saurait être responsable du contenu dudit document ni des éventuelles conséquences de celui-ci sur la compréhension, par M. X..., du mécanisme du support considéré ; que M. X... reproche aussi à la société Sogecap de lui avoir délivré des informations incohérentes, au vu de la comparaison entre le prospectus publicitaire agréé par la COB et la notice d'information, toutes pièces qu'il soutient toutefois ne pas avoir reçues ; qu'il fonde ainsi son moyen sur l'analyse des pièces communiquées par la défenderesse à l'occasion de la présente procédure ; que la défenderesse entend démontrer avoir satisfait à son obligation d'information ;
que le tribunal constatera que M. X... a apposé sa signature sur le bulletin d'adhésion, sous la mention pré-imprimée suivante: « l'adhérent déclare avoir reçu un exemplaire du présent bulletin d'adhésion et de la note d'information relatifs au contrat Philarmonis, ainsi que de l'annexe de présentation des supports et les notices d'information COB des supports choisis » ; qu'il est donc établi que M. X... a été destinataire desdits documents, produits en pièces n°2 et 16 par la société Sogecap ; que le demandeur soutenant ne pas avoir été destinataire de ces pièces avant son engagement, il ne peut fonder le surplus que sur les pièces qui lui ont été communiquées par la société Sogecap lors de la présente procédure ; qu'ainsi, il y a lieu de considérer que ses pièces n° 18 et 18 bis sont nécessairement constituées de copies des pièces n° 2 et 16 de la défenderesse ; que, pourtant, la pièce n°18 bis ne comporte pas la dernière page de la pièce n°2, intitulée « annexe aux conditions générales et à la note d'information », et qui se rapporte spécialement au support CIIC performance 400 +, choisi par l'adhérent sur le bulletin d'adhésion et par conséquent inclus la mention pré-imprimée susvisée ; que M. X... n'explique nullement les raisons pour lesquelles il a ôté cette page ; que le tribunal analysera donc le document tel que produit par la société Sogecap ; qu'il constatera que l'annexe à la note d'information présente CIIC performance + comme étant l'un des supports éligibles par l'adhérent au contrat Philarmonis et le définit comme un FCP indexé sur un panier de 15 actions internationales ; que le prospectus visé par la COB décrit ledit support, sans avoir à évoquer la notion d'unités de compte laquelle se rapporte exclusivement aux modalités de l'épargne constituée sur le contrat d'assurance vie ; que, dès lors, aucune des critiques exposées par M. X... dans ses dernières écritures n'est fondée, les documents considérés n'étant en rien contradictoires ; que l'assureur a donc satisfait à son obligation d'information, telle que prévue par les dispositions de l'article L. 132-5-1 du code des assurances, et qui ne s'étendait pas aux actes de gestion accomplis par la société de gestion du FCP ; que nul manquement à l'obligation d'information ne sera donc retenu à l'encontre de la société Sogecap ; qu'en outre, l'assureur, qui n'a pas eu de contact direct avec l'adhérent, n'avait pas d'obligation de conseil à son égard ; qu'il n'était pas davantage tenu d'une obligation de mise en garde relative aux prêts ni à la fiabilité de l'opération globale dans le cadre de laquelle s'inscrivait l'adhésion au contrat d'assurance sur la vie, opération dont il n'est pas démontré qu'il ait eu le contrôle ; que, par conséquent, M. X... sera débouté de ses demandes formées contre la société Sogecap ; que, sur les manquements reprochés au promoteur, M. X... reproche à l' Union financière George V, à laquelle il attribue la mise en place de la totalité de l'opération englobant l'offre du produit financier et celle du prêt vendu par la CGLE, de lui avoir fourni une information dolosive, contenue dans le dépliant de présentation du produit CIIC performance +, et déterminante de son consentement ; qu'il considère que ces manoeuvres caractérisent, à tout le moins, un manquement aux devoirs de conseil et de mise en garde dont la défenderesse, en tant que mandataire de l'assureur, était débitrice à son égard ;
qu'il considère que l'exception de prescription n'est pas acquise dès lors que le point de départ du délai de cinq ans doit être fixé au jour où il a reçu la lettre datée du 18 mars 2008, émanant de l'Union financière George V ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 8 |
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que l'Union financière George V relève qu'elle n'a jamais été en contact avec M. X..., qu'elle ne lui est liée par aucun contrat et qu'elle n'est pas le rédacteur du document de présentation critiqué, lequel ne comporte d'après elle aucune fausse affirmation ; qu'elle en déduit l'absence de toute faute de sa part ; que le tribunal constatera que M. X..., qui entend mettre en oeuvre la responsabilité contractuelle de l'Union financière George V ne démontre pas l'existence d'un contrat passé entre eux ; qu'en effet, ils n'ont pas été en contacts directs et le document publicitaire supportant le logo de la défenderesse a été remis à M. X... par le courtier Marianne assurances ; que, dans ces conditions, la mention, sur le certificat d'adhésion et sur l'avis d'opération émis par la société Sogecap, du nom de l'Union financière George V en qualité de conseiller, ne suffit pas à rapporter la preuve d'un lien contractuel entre M. X... et l'Union financière George V ; qu'il en est de même du courrier daté du 18 mars 2008, aux termes duquel l'Union financière George V a pris l'initiative de transmettre à M. X... un bilan de l'évolution du support CIIC performance +, et lui a rappelé qu'il pouvait arbitrer au profit d'un autre support, sans pour autant lui conseiller d'y procéder ; que le demandeur ne rapporte pas davantage la preuve de l'existence d'un mandat liant l'assureur à l' Union financière George V ; qu'il sera par conséquent débouté de toutes ses demandes dirigées contre cette défenderesse » ;
Alors 1°) que l'assureur ou son intermédiaire qui proposent à leur client de souscrire un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte sont tenus de lui délivrer, fût-il averti, une information adaptée à ses connaissances, sa situation personnelle et ses objectifs ; que la publicité qu'ils délivrent pour proposer à leur client de souscrire des parts de fonds commun de placement doit être cohérente avec l'investissement proposé et mentionner le cas échéant les caractéristiques les moins favorables et les risques inhérents aux options qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés ; que l'obligation d'information qui pèse sur eux ne peut être considérée comme remplie par la remise de la notice visée par la Commission des opérations de bourse lorsque la publicité ne répond pas à ces exigences ; que la cour d'appel a elle-même relevé que la brochure publicitaire délivrée à M. X... comportait des « affirmations alléchantes, telles que l'affirmation, étayée de statistiques et graphiques, selon laquelle, sur les 3044 tests réalisés, "dans 100 % des cas, le remboursement est au moins égal à 400 %" » ; qu'en déboutant M. X... de ses demandes, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la publicité délivrée ne mentionnait pas les caractéristiques les moins favorables du placement qui lui était proposé et les risques inhérents aux options pouvant être le corollaire des avantages énoncés, a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Alors 2°) que l'assureur ou son intermédiaire qui proposent à leur client de souscrire un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte sont tenus de lui délivrer, fût-il averti, une information adaptée à ses connaissances, sa situation personnelle et ses objectifs ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 9), M. X... avait fait valoir qu'au moment de la souscription du contrat d'assurance vie, il n'avait pas été correctement informé sur la nature de son investissement telle qu'elle lui a ensuite été révélée par un courrier du 18 mars 2008, émanant du courtier, décrivant un investissement devant lui procurer un revenu exceptionnel (multiplication par quatre de la somme investie), à la condition qu'aucune des 15 actions composant un panier virtuel de référence ne clôture en dessous de 40 % de sa valeur initiale aux 12 dates de constatation trimestrielle des trois dernières années, même si la valeur moyenne du panier évolue à la hausse, alors qu'il pensait souscrire des parts de fonds communs de placement, suivant la mention de la note d'information qui lui était remise : « CIIC performance 400 + est un FCP géré par Lyxor Asset Management, filiale à 100% de la Société générale, indexé sur un panier de 15 actions internationales » ; que pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel s'est fondée sur les termes de la note d'information du contrat d'assurance Philarmonis et de ses deux annexes, énonçant que leur valeur informative et leur sincérité sont avérées, sur une mention de son bulletin d'adhésion, ainsi que sur les termes de la notice agréée par la COB, soulignant que l'autorité de contrôle avait considéré que les informations figurant dans cette notice d'information étaient conformes aux exigences de clarté et de lisibilité requises par l'article 32, modifié, du règlement COB n° 89-02 ; | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 9 |
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qu'en statuant ainsi, sans se prononcer sur les éléments de preuve invoqués par M. X... démontrant que la nature réelle de son investissement n'avait pas été portée à sa connaissance lors de la souscription du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Alors 3°) que dans ses écritures d'appel (conclusions, p. 13), M. X... avait fait valoir que la notice agréée par la COB avait été intégrée dans un format très réduit au sein d'une brochure colorée, contenant un descriptif dithyrambique du produit proposé, assortie de graphiques, de courbes et de formules séduisantes ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si cette présentation n'avait pas retiré tout caractère informatif à la notice fournie dans ces circonstances, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Alors 4°) que l'assureur ou son intermédiaire qui proposent à leur client de souscrire un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte sont tenus de lui délivrer, fût-il averti, une information adaptée à ses connaissances, sa situation personnelle et ses objectifs ; que pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel a relevé qu'il était expert-comptable, commissaire aux comptes et dirigeant d'une société d'expertise comptable, spécialisée notamment dans le courtage en prêts bancaires ; qu'en s'étant fondée sur la qualité d'investisseur averti qu'aurait eue M. X..., quand cette circonstance ne dispensait pas l'assureur et son intermédiaire de leur devoir d'information et de conseil, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Alors 5°) et subsidiairement que la cour d'appel a relevé que M. X... était expert-comptable, commissaire aux comptes et dirigeant d'une société d'expertise comptable, spécialisée notamment dans le courtage en prêts bancaires ; qu'en s'étant fondée sur la qualité d'investisseur averti de M. X..., sans faire ressortir en quoi sa profession lui conférait une compétence particulière en matière d'investissements financiers complexes, tels ceux qui lui étaient proposés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Alors 6°) et en toute hypothèse que dans ses écritures d'appel, M. X... avait fait valoir qu'il était néophyte en matière financière et qu'il s'était inscrit, fin 2007, à une session de formation à l'« executive M.Sc Ingénierie patrimoniale du dirigeant », mais qu'il n'avait pu valider cette formation, ce qui démontrait son « incompétence » en la matière (conclusions p. 22) ; que la cour d'appel a relevé que M. X... était expert-comptable, commissaire aux comptes et dirigeant d'une société d'expertise comptable, spécialisée notamment dans le courtage en prêts bancaires ; qu'en s'étant fondée sur la sur la qualité d'investisseur averti de M. X... pour le débouter de ses demandes, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions démontrant le contraire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. | cour d'appel de Versailles
16e chambre, décision 17-21.325 du 14/06/2018, partie 10 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par Mme Valérie X..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt n° RG : 14/25889 rendu le 1er avril 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige l'opposant à la Caisse nationale des barreaux français, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 mai 2018, où étaient présentes : Mme Flise, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, Mme Mainardi, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Y..., conseiller, les observations de Me Z..., avocat de Mme X..., l'avis de Mme A..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er avril 2015), que Mme X..., avocat, a interjeté appel de l'ordonnance d'un juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris, renvoyant l'affaire l'opposant à la Caisse nationale des barreaux français (la caisse) devant le tribunal de grande instance d'Orléans, qui lui a été signifiée selon les modalités de l'article 655 du code de procédure civile à une adresse de domiciliation professionnelle ; que la caisse ayant soulevé la tardiveté de l'appel, Mme X... a invoqué l'irrégularité de la signification ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de déclarer l'appel irrecevable, alors, selon le moyen :
1°/ que la signification doit être faite à personne ; que, si elle est impossible, l'acte de signification doit faire mention des diligences de l'huissier de justice pour tenter de signifier à personne, le simple fait de constater la réalité de l'adresse et l'absence du destinataire étant insuffisant ; qu'en estimant que l'huissier de justice avait pu se borner à constater la réalité de l'adresse professionnelle de Mme X... et son absence et n'avait pas à chercher son adresse personnelle pour y tenter de signifier l'acte, la cour d'appel a violé les articles 654 et 655 du code de procédure civile ;
2°/ que les juges du fond doivent se prononcer sur les pièces régulièrement versées aux débats ; que Mme X... produisait plusieurs pièces, dont un commandement de payer, établissant que la caisse connaissait son adresse personnelle, pièces qui avaient été retenues par le premier juge comme établissant cette connaissance ; que la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée, même implicitement, sur ces pièces, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que l'absence de recherche du domicile privé de Mme X... pour une signification à personne cause un grief à celle-ci dès lors qu'elle n'a pas été avisée de l'existence de l'acte ; qu'en ne constatant pas qu'un avis de passage avait été déposé et une lettre simple envoyée pour l'avertir du passage de l'huissier de justice, la cour d'appel a violé les articles 655 et 658 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant, par motifs adoptés non contraires du premier juge, souverainement estimé que Mme X... ne démontrait pas en quoi la signification, à la supposer irrégulière, lui avait causé un grief, la cour d'appel a, par ce seul motif et abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par les deux premières branches du moyen, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Z..., avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'appel formé par Mme X... contre l'ordonnance du juge de la mise en état du 16 novembre 2011 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'ordonnance du juge de la mise en état a été rendue une procédure opposant Mme X... en sa qualité d'avocate inscrite au barreau de Paris à l'encontre de la Caisse Nationale des Barreaux relativement au paiement de cotisations ; que Madame X... a fait assigner son adversaire le 14 mars 2011 en mentionnant elle-même expressément à titre d'adresse le [...] ; qu'elle ne peut donc prétendre qu'il ne s'agissait pas de l'adresse à laquelle devaient être délivrés les actes de procédure ; que son adversaire ne pouvait pas connaître une adresse personnelle distincte de celle mentionnée sur sa propre assignation ; | cour d'appel de Paris
Pôle 2 - Chambre 1, décision 17-18.599 du 07/06/2018, partie 1 |
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qu'ayant elle-même déclaré le [...] à titre d'adresse professionnelle, la discussion qu'elle développe donc sur une signification à opérer sur son lieu de travail au demeurant inconnu est inopérante ; il s'ensuit que la signification faite par l'huissier [...] était valable ; qu'en l'absence de la personne visée, celui-ci a effectué les formalités visés pour une délivrance à domicile conformément aux dispositions de l'article 655 du code de procédure civile ; il ressort de l'acte de signification en date du 5 avril 2012 que le domicile a été certifié par la secrétaire de la société de domiciliation, la signification à personne s'avérant impossible ; l'huissier a mentionné avoir rempli les prescriptions du texte précité et avoir adressé la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile ; l'huissier n'était donc pas tenu de rechercher l'adresse privée de Mme X... ; dès lors Mme X... n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait reçu ni lettre simple ni lettre recommandée à l'adresse du [...] sauf à penser qu'elle ne dispose plus d'aucune adresse professionnelle à Paris ce qui remettrait en cause son inscription à ce barreau ou à s'interroger sur les conditions de cette inscription au barreau avec une adresse professionnelle qui ne correspond pas à son lieu d'exercice ; qu'elle ne démontre pas qu'au jour de la signification, elle disposait d'une autre adresse professionnelle ; la signification n'a pas lieu d'être déclarée nulle ; dès lors la signification de l'ordonnance du juge de la mise en état ayant été effectuée le 5 avril 2012, l'appel interjeté le 28 novembre 2013 est tardif et comme tel irrecevable ; en conséquence l'ordonnance est confirmée ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Mme X... est une avocate inscrite au barreau de Paris et elle a pour adresse professionnelle [...] . Cette adresse figurait sur l'assignation que cette dernière a fait délivrer à la CNBF le 3 novembre 2010, ainsi que sur l'ordonnance du juge de mise en état. Le domicile professionnel du [...] pouvait donc constituer un lieu de signification valable au regard des dispositions de l'article 655 du code de procédure civile. L'acte de signification indique que le domicile a été certifié par la secrétaire de la société de domiciliation, la signification à personne s'avérant impossible en raison de l'absence de l'intéressée. Néanmoins en l'espèce la CNBF connaissait l'adresse personnelle de madame X... [...] pour lui y avoir notamment fait signifier plusieurs actes dont un commandement aux fins de saisie-vente du 5 novembre 2008 et avoir reçu des chèques portant cette adresse. Le CNBF verse aux débats une lettre de la SCP Louvrion-Plumet huissiers de justice associés à Boulogne-Billancourt, qui indique s'être rendue sur place [...] et avoir appris que madame X... était partie sans laisser d'adresse. Néanmoins cette lettre date du 20 juin 2014 et ne peut établir une impossibilité de signifier l'acte à la personne de l'intéressée le 5 avril 2012. Cependant en application de l'article 114 du code de procédure civile le destinataire de l'acte doit justifier d'un grief et si la signification au domicile professionnel de madame X... était irrégulière, elle ne démontre pas en quoi celle-ci, avec la nécessité d'aller chercher l'acte à l'étude de l'huissier de justice, lui a causé un grief. Il n' y a donc pas lieu de déclarer nulle la signification de l'ordonnance effectuée le 5 avril 2012 et l'appel doit être déclaré irrecevable alors qu'il a été effectué hors du délai de l'article 538 du code de procédure civile ;
1°) - ALORS QUE la signification doit être faite à personne ; que, si elle est impossible, l'acte de signification doit faire mention des diligences de l'huissier pour tenter de signifier à personne, le simple fait de constater la réalité de l'adresse et l'absence du destinataire étant insuffisant ; qu'en estimant que l'huissier avait pu se borner à constater la réalité de l'adresse professionnelle de Mme X... et son absence et n'avait pas à chercher son adresse personnelle pour y tenter de signifier l'acte, la cour d'appel a violé les articles 654 et 655 du code de procédure civile ;
2°) - ALORS QUE les juges du fond doivent se prononcer sur les pièces régulièrement versées aux débats ; que Mme X... produisait plusieurs pièces, dont un commandement de payer, établissant que la CNBF connaissait son adresse personnelle, pièce qui avaient été retenues par le premier juge comme établissant cette connaissance ; que la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée, même implicitement, sur ces pièces, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) - ALORS QUE l'absence de recherche du domicile privé de Mme X... pour une signification à personne cause un grief à celle-ci dès lors qu'elle n'a pas été avisée de l'existence de l'acte ; qu'en ne constatant pas qu'un avis de passage avait été déposé et une lettre simple envoyée pour l'avertir du passage de l'huissier, la cour d'appel a violé les articles 655 et 658 du code de procédure civile. | cour d'appel de Paris
Pôle 2 - Chambre 1, décision 17-18.599 du 07/06/2018, partie 2 |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze avril deux mille dix-huit, a rendu la décision suivante :
Sur le rapport de M. le conseiller Z... et les conclusions de M. l'avocat général X... ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
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M. Pascal Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 30 mars 2017, qui, pour arrestation, enlèvement, détention, séquestration avec libération avant le 7ème jour et menaces de mort, l'a condamné à trente mois d'emprisonnement et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires personnels produits ;
Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'après avoir examiné tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure, la Cour de cassation constate qu'il n'existe, en l'espèce, aucun moyen de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
DÉCLARE le pourvoi NON ADMIS ;
Ainsi prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier de chambre . | décision 17-85.923 du 11/04/2018, partie 1 |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la société Ecurie D... X..., société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 15 mars 2017 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à la Caisse de mutualité sociale agricole de Haute-Normandie, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 mai 2018, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme Taillandier-Thomas, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Szirek, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Taillandier-Thomas, conseiller, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Ecurie D... X..., de la SCP Briard, avocat de la Caisse de mutualité sociale agricole de Haute-Normandie, l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle inopiné l'ayant conduit à constater l'emploi de quatre travailleurs non déclarés au sein de la société Ecurie D... X... (la société), la caisse de mutualité sociale agricole de Haute-Normandie a procédé au redressement des cotisations de celle-ci pour l'année 2010 et lui a notifié une mise en demeure, puis une contrainte ; que, poursuivie devant la juridiction correctionnelle du chef de travail dissimulé, la société a été relaxée ; qu'elle a formé opposition devant une juridiction de sécurité sociale à la contrainte décernée à son encontre par la caisse ;
Attendu que pour valider la contrainte, l'arrêt, après avoir relevé que l'employeur a été relaxé des fins de la poursuite pour travail dissimulé par jugement correctionnel du 16 octobre 2014, retient que néanmoins, à défaut d'exposé des motifs du jugement, il ne peut être déduit de cette seule relaxe qu'il n'existait aucun contrat de travail entre la société et MM. Z..., A..., B... et C..., la matérialité de l'infraction supposant une dimension intentionnelle qui n'est pas requise s'agissant du paiement des cotisations sociales ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la société avait été relaxée du chef de travail dissimulé par une décision définitive d'une juridiction de jugement statuant sur le fond de l'action publique, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la caisse de mutualité sociale agricole de Haute-Normandie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse de mutualité sociale agricole de Haute-Normandie et la condamne à payer à la société Ecurie D... X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Ecurie D... X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société Ecurie D... X... de sa demande et d'AVOIR validé la contrainte de 49.777,97 € que lui a fait signifier la MSA le 4 mars 2013 correspondant aux cotisations, majorations et pénalités de retard pour l'année 2010 ;
AUX MOTIFS QUE « la cour rappelle que, pour qu'un contrat soit qualifié de contrat de travail, il faut qu'une personne accepte de fournir une prestation de travail au profit d'une autre personne en se plaçant dans un état de subordination juridique vis-à-vis de cette dernière, moyennant une rémunération. L'existence d'une relation de travail ne dépend, ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. | décision 17-18.142 du 31/05/2018, partie 1 |
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La preuve de l'existence et de l'exécution d'un contrat de travail incombe à la partie demanderesse, donc en l'espèce à la caisse. Par ailleurs, le jugement du tribunal de grande instance d'Évreux en date du 29 mars 2013, qui a condamné la société à payer à M. Z... diverses sommes en exécution de la convention de prestations de services, n'a pas autorité de chose jugée entre les parties, la caisse n'étant pas partie à ce procès et le tribunal n'étant pas saisi de la question de l'existence d'un contrat de travail. Enfin, l'autorité absolue de la chose jugée au pénal sur le civil s'étend à tout ce qui a été nécessairement jugé quant à l'existence du fait incriminé, à sa qualification et à la culpabilité ou à l'innocence de celui à qui ce fait est imputé. En l'espèce, la MSA avait dressé un procès-verbal d'infraction à la réglementation sur le travail dissimulé, des poursuites ont été engagées contre la société et X..., par le parquet, du chef d'omission intentionnelle de déclaration préalable à l'embauche de MM. Z..., B..., C... et A... mais les prévenus ont été relaxés par le tribunal correctionnel le 16 octobre 2014. Néanmoins, à défaut d'exposé des motifs du jugement, il ne peut être déduit de la seule relaxe de la société qu'il n'existait aucun contrat de travail entre celle-ci et MM. Z..., B..., C... et A..., la matérialité de l'infraction supposant une dimension intentionnelle qui n'est pas requise s'agissant du paiement des cotisations sociales. Il convient de vérifier dans les faits les conditions dans lesquelles était exercée l'activité de ces derniers » ;
ET AUX MOTIFS QUE « Sur le cas de M. Z... : La lecture de la convention de prestations de service du 1er juillet 2009 montre que M. Z... ne disposait d'aucune liberté en ce qui concerne le lieu d'entraînement des équidés et leur lieu d'hébergement (obligatoirement les écuries X...), leur mode de transport (camion fourni par les écuries X...), le choix du vétérinaire et du maréchal-ferrant (ceux des écuries X...), le choix des engagements en course et du jockey, ni celui du recours à une tierce personne pour leur entraînement, « embauchée par L'EARL X... », qui devaient être décidés d'un commun accord avec la société. Il ne s'agissait pas d'échanges normaux entre un amateur passionné mais incompétent et un professionnel comme voudrait le faire croire l'appelante mais bien d'un pouvoir décisionnel de X... sur le choix des engagements en course, du personnel et des conditions matérielles d'entraînement. Il est ainsi établi que l'exécution du travail devait se faire sous l'autorité du gérant de la société, qui avait pouvoir de donner des ordres et des directives. Les témoignages produits par la société selon lesquels X... est décrit comme une personne n'ayant aucune compétence en matière de course de trot et d'équidés et ne s'immisçant pas au quotidien dans la bonne marche des écuries, ne suffisent pas à démontrer le contraire. En effet, ils sont démentis par les termes mêmes de la convention ainsi qu'il vient d'être dit et par les auditions de MM. C..., A... et B..., recueillies par l'agent de contrôle assermenté de la caisse, faisant apparaître que X... cherchait à intervenir sur l'entraînement des chevaux et donnait des directives techniques aux lads, qu'il donnait régulièrement des ordres à M. Z... concernant le choix des trotteurs à faire courir et qui lui est aussi arrivé d'engager des chevaux sans en parler à ce dernier. Ces déclarations ayant été recueillies dans le cadre de rapports d'audition réalisés par un agent de contrôle assermenté, la société ne peut, sauf procédure d'inscription de faux, contester la véracité de ces documents. Il est par ailleurs démontré que l'essentiel des chevaux entraînés par M. Z... appartenaient à la société (34 sur 38), ces derniers représentant 64 engagements en course sur 80 sur la période du 1er janvier au 25 septembre 2010, date de fin de contrat. La société ne peut prétendre que son engagement auprès d'elle avait pour but de « compléter son activité » puisque en réalité, il entraînait et faisait courir quasi exclusivement des trotteurs de l'écurie X..., ce qui induisait une dépendance économique certaine. Enfin, le montant de la prestation était fixe et non fonction du nombre de chevaux à l'entraînement, ne variant tous les mois qu'en fonction des salaires et des charges appelées par la MSA au titre des « salariés » de M. Z.... Il est ainsi suffisamment établi par ce faisceau d'indices, nonobstant l'inscription de M. Z... au répertoire SIRENE en qualité d'entraîneur public, lequel ne constitue qu'une simple présomption de non-salariat, que ce dernier se trouvait placé dans un lien de subordination vis à vis de la société, caractérisant l'existence d'un contrat de travail. Les cotisations sociales étaient donc dues par la société à ce titre. Sur les cas de MM. B..., C... et A... : Ces derniers sont officiellement salariés de M. Z... or plusieurs éléments démontrent que le lien de subordination est en réalité établi entre ces salariés et la société X.... | décision 17-18.142 du 31/05/2018, partie 2 |
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Ainsi, MM. B..., C... et A..., ont déclaré que leurs contrats avaient été négociés avec X..., qu'ils recevaient des ordres de la part de celui-ci, que ce dernier demandait à C... de s'occuper de ses chevaux personnels à son domicile pendant les week-ends et sans rémunération, et que l'artifice consistant à les faire embaucher officiellement par M. Z... avait pour but l'obtention de la licence de lad jockey. Ces témoignages sont corroborés par deux courriels adressés par un membre de son cabinet d'expertise comptable, à M. Z... montrant que X... donnait des instructions sur la fréquence et les dates de leurs congés et que le montant du salaire de M. B... avait été décidé par X..., par le fait que l'entraîneur répercutait systématiquement l'intégralité des salaires et charges sociales sur la société et, enfin, par le fait que la convention prévoyait expressément que les parties pouvaient avoir recours aux services d'une tierce personne embauchée par l'EARL écuries X.... C'est donc en vain, au vu de ces éléments, que la société conteste avoir été l'employeur de MM. B..., C... et A... et être redevable des cotisations sociales les concernant. Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTÉS, QUE « L'article L. 8221-5 du code du travail dispose : "Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur 1.1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre du livre ler de la troisième partie ; 3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales". En l'espèce, suivant annonce parue dans le journal ParisTurf du 12 juin 2010, l'écurie D... X... indique rechercher des salariés pour entraînement + courses (pièce 16). Par ailleurs, il ressort du "contrat de prestations de services établi entre M. Z... et L'EARL X... que, "d'un commun accord, les parties pourront avoir recours aux services d'une tierce personne, embauchée par I'EARL Ecurie D... X..." (pièce 13, article 4). De fait, il apparaît que L'EARL Ecurie D... X... a géré le travail de MM. A..., C... et B..., s'agissant des congés de ces salariés (pièce 14) ou de l'établissement de leurs fiches de paie (pièces 40 et 41). Ces derniers ont d'ailleurs témoigné de leur situation de salarié de M. X... devant agent assermenté de la MSA (pièce 15). Par conséquent, L'EARL Ecurie D... X... apparaît mal fondée à contester leur qualité de salarié, et elle doit être déboutée de sa demande. Il convient de valider la contrainte pour son entier montant » ;
1) ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil s'attache au dispositif du jugement et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire ; qu'au cas présent, la chambre correctionnelle du tribunal de grande instance d'Évreux a, par un jugement devenu définitif du 16 janvier 2014, relaxé L'EARL Ecurie D... X... et Monsieur Éric X... du chef de l'emploi dissimulé de Messieurs Z..., C..., B... et A... ; qu'en retenant néanmoins que L'EARL Ecurie D... X... avait été l'employeur de Messieurs Z..., C..., B... et A... et qu'elle était en conséquence redevable de cotisations sociales les concernant, la cour d'appel a violé le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil et l'article 1355 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1 du code du travail et L. 725-1, L. 725-3 et L. 741-1 du code rural et de la pêche maritime ;
2) ALORS QUE pour écarter l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil découlant du jugement de la chambre correctionnelle du tribunal de grande instance d'Évreux du 16 janvier 2014 la cour d'appel s'est fondée sur le « défaut d'exposé des motifs [de ce] jugement » ; qu'en statuant ainsi, sans analyser et prendre en compte ce jugement produit par L'EARL Ecurie D... X... (pièce d'appel n° 65), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE sont présumés ne pas être liés avec le donneur d'ordre par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation ou inscription les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales ; | décision 17-18.142 du 31/05/2018, partie 3 |
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que L'EARL Ecurie D... X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que compte tenu de son inscription au Répertoire National d'identification des entreprises et des établissements (SIRENE), Monsieur Z... devait être présumé comme n'étant pas lié par un contrat de travail avec L'EARL Ecurie D... X... ; qu'en déduisant néanmoins l'existence d'un contrat de travail « nonobstant l'inscription de M. Z... au répertoire SIRENE en qualité d'entraîneur public », sans tenir compte de la présomption de non salariat de Monsieur Z... découlant de cette inscription au répertoire SIRENE, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-6 I 1° du code du travail, ensemble les articles L. 725-1, L. 725-3 et L. 741-1 du code rural et de la pêche maritime et 1353 du code civil ;
4) ALORS, ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur, qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que pour déduire l'existence d'un lien de subordination à l'égard de Messieurs Z..., C..., B... et A..., la cour d'appel s'est bornée à retenir que le propriétaire de l'écurie, Monsieur X..., leur donnait des instructions, leur versait un montant de prestation fixe, était propriétaire de la majorité des chevaux entraînés, et supportait in fine le coût des salaires et charges sociales exposés par Messieurs C..., B... et A... ; qu'en se bornant à de telles constatations pour déduire le lien de subordination, sans constater l'existence d'un pouvoir concret de contrôle et de sanction de l'activité des intéressés, autre que les obligations découlant du contrat de prestations de services conclu avec Monsieur Z... en sa qualité d'entraîneur de chevaux de L'EARL Ecurie D... X... , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime et L. 1221-1 du code du travail ;
5) ALORS, ENFIN, QU'en statuant sur la question de l'affiliation de Monsieur Z... au régime des salariés agricoles sans l'avoir appelé en la cause, la cour d'appel a violé les articles L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime, R. 142-19 du code de la sécurité sociale et 14 du code de procédure civile. | décision 17-18.142 du 31/05/2018, partie 4 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la société Etablissements Dahoud, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...],
contre l'ordonnance rendue le 6 avril 2016 par le président du tribunal de grande instance de Paris, dans le litige l'opposant à l'association Mutuelle d'assurance maritime X... (X... assuranceforeningen X...), dont le siège est [...],
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 10 avril 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Y..., conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Y..., conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Etablissements Dahoud, de Me C..., avocat de l'association Mutuelle d'assurance maritime X..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (président du tribunal de grande instance de Paris, 6 avril 2016), que la société mauritanienne Établissements Dahoud (la société Dahoud) a présenté au président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés en application de l'Accord de coopération en matière de justice du 19 juin 1961 entre la République française et la République islamique de Mauritanie (l'Accord), une demande d'exequatur d'un arrêt de la cour d'appel de Nouakchott du 22 février 2006 ayant condamné le propriétaire du navire « Maris » et son assureur, l'association norvégienne Mutuelle d'assurance maritime X... (l'association X...) à l'indemniser du préjudice résultant de la perte de trois caisses de matériel lors de leur transport entre le port d'Anvers et celui de Nouakchott ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Dahoud fait grief à l'ordonnance d'être rendue par une juridiction incompétente, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 38 de l'Accord, l'exequatur est accordé par le président du tribunal de grande instance, qui est saisi et statue suivant la forme prévue pour les référés, et non par le juge des référés ; que l'assignation de l'association X... aux fins d'exequatur de l'arrêt de la cour d'appel de Nouakchott du 22 février 2006 délivrée par la société Dahoud est une assignation à comparaître devant le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en la forme des référés ; qu'étant une ordonnance de référé, l'ordonnance attaquée par un juge incompétent, qui n'était pas celui saisi, en violation du texte susvisé ;
2°/ qu'aux termes de l'article 38 de l'Accord, l'exequatur est accordé par le président du tribunal de grande instance, qui est saisi et statue suivant la forme prévue pour les référés, et non par le juge des référés ; qu'en statuant sur la demande d'exequatur, le juge des référés qui a reçu délégation du président du tribunal de grande instance pour statuer en tant que tel, mais pas pour statuer sur l'exequatur d'une décision mauritanienne en application de l'Accord, a méconnu sa compétence, en violation du texte susvisé ;
Mais attendu qu'il résulte des mentions de l'ordonnance que celle-ci a été rendue par un vice-président du tribunal de grande instance de Paris agissant par délégation du président, qui a été saisi et a statué en la forme des référés ; qu'il s'en déduit, nonobstant l'erreur matérielle commise dans son intitulé et ultérieurement rectifiée, que cette décision a été rendue par le juge désigné à l'article 38 de l'Accord ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Attendu que la société Dahoud fait grief à l'ordonnance de rejeter sa demande d'exequatur, alors, selon le moyen, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'au soutien de son allégation selon laquelle le navire Maris et le X... étaient représentés par le cabinet de Maîtres Z... et A... dans l'instance relative à l'affaire n° 59/93 reprise devant la cour d'appel de renvoi de Nouakchott ayant donné lieu à l'arrêt du 22 février 2006, réputé contradictoire, dont l'exequatur était demandé, la société Dahoud produisait, d'une part, la première page du mémoire en cours de délibéré déposé par Maîtres Z... et A... devant cette cour au nom du propriétaire du bateau Maris et de son assureur et, d'autre part, l'attestation de remise d'une convocation n° 64/04 du 3 juin 2004, pour l'affaire n° 059/93, à TCI Africa dont le représentant l'avait signée le 6 juin 2004 ; | décision 16-29.095 du 24/05/2018, partie 1 |
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qu'en jugeant néanmoins qu'il était constant que l'association X... n'était pas représentée dans la procédure litigieuse, le délégué du président du tribunal de grande instance a dénaturé ces pièces par omission, en méconnaissance du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
Mais attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de dénaturation et de violation de l'article 36, c), de l'Accord, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, la décision du juge de l'exequatur qui a estimé que l'association X... n'avait pas été régulièrement citée devant la juridiction mauritanienne et en a déduit que l'exequatur ne pouvait être accordé à la décision étrangère, faute de satisfaire aux conditions exigées par l'Accord ; qu'il ne peut être accueilli ;
Sur la seconde branche du même moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce grief n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Etablissements Dahoud aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à l'association Mutuelle d'assurance maritime X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Dahoud.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'AVOIR été rendue par une juridiction incompétente et d'AVOIR débouté la société Établissements Dahoud de l'intégralité de ses demandes ;
1°) ALORS QU'aux termes de l'article 38 de l'Accord du 19 juin 1961 en matière de justice entre la République française et la République islamique de Mauritanie, l'exequatur est accordé par le président du tribunal de grande instance, qui est saisi et statue suivant la forme prévue pour les référés, et non par le juge des référés ; que l'assignation de la société X... aux fins d'exequatur de l'arrêt de la cour d'appel de Nouakchott du 22 février 2006 délivrée par la société Établissements Dahoud est une assignation à comparaître devant le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en la forme des référés ; qu'étant une ordonnance de référé, l'ordonnance attaquée par un juge incompétent, qui n'était pas celui saisi, en violation du texte susvisé ;
2°) ALORS QU'aux termes de l'article 38 de l'Accord du 19 juin 1961 en matière de justice entre la République française et la République islamique de Mauritanie, l'exequatur est accordé par le président du tribunal de grande instance, qui est saisi et statue suivant la forme prévue pour les référés, et non par le juge des référés ; qu'en statuant sur la demande d'exequatur, le juge des référés qui a reçu délégation du président du tribunal de grande instance pour statuer en tant que tel, mais pas pour statuer sur l'exequatur d'une décision mauritanienne en application du traité international du 19 juin 1961, a méconnu sa compétence, en violation du texte susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'AVOIR débouté la société Établissements Dahoud de l'intégralité de ses demandes ;
AUX MOTIFS QU'« aux termes des articles 36 à 41 du traité de coopération en matière de justice entre la République française et la République Islamique de Mauritanie du 19 juin 1961, en matière civile et commerciale, les décisions contentieuses et gracieuses rendues par les juridictions siégeant sur le territoire de la République française et sur le territoire de la République de Côte d'Ivoire [lire : Islamique de Mauritanie] ont, de plein droit, l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre État, si elles réunissent les conditions suivantes : - la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l'État où la décision est exécutée ; - la décision est, d'après la loi de l'État où elle a été rendue, passée en force de chose jugée et susceptible d'exécution ; - les parties ont été régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes ; - la décision ne contient rien de contraire à l'ordre public de l'État où elle est invoquée ou aux principes de droit public applicables dans cet État ; elle ne doit pas non plus être contraire à une décision judiciaire prononcée dans cet État et possédant à son égard l'autorité de la chose jugée ; les décisions visées à l'article précédent ainsi que les décisions déclarées exécutoires par provision ne peuvent donner lieu à aucune exécution forcée par les autorités de l'autre État, ni faire l'objet, de la part de ces autorités, d'aucune formalité publique telle que l'inscription, la transcription ou la rectification sur les registres publics qu'après y avoir été déclarées exécutoires ; | décision 16-29.095 du 24/05/2018, partie 2 |
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l'exequatur est accordé, quelle que soit la valeur du litige par le président du tribunal de grande instance ou de la juridiction correspondante du lieu où l'exécution doit être poursuivie ; le président est saisi et statue suivant la forme prévue pour les référés ; la décision ne peut faire l'objet que d'un recours en cassation ; le président se borne à vérifier si la décision dont l'exequatur est demandé remplit les conditions prévues à l'article 36 pour avoir de plein droit l'autorité de la chose jugée, il procède d'office à cet examen et doit en constater le résultat dans sa décision ; qu'il n'est pas discuté que la société Établissements Dahoud, ci-après désignée "les Ets Dahoud", a passé commande à la société belge Outilac de trois caisses d'outillage qui ont été chargées le 6 octobre 1990 au port d'Anvers par le bateau Maris, lequel devait décharger la marchandise le 7 octobre 1990 ; que, suite à un litige né entre les Ets Dahoud d'une part, et le bateau Maris et le club X... d'autre part quant à la perte des marchandises, la chambre civile et commerciale près le tribunal de la wilaya de Nouakchott a rendu le 26 mai 1993 un jugement condamnant le bateau Maris à payer aux Ets Dahoud la somme de 30 000 000 UM et retenu la garantie du club X... ; qu'opposition à ce jugement a été formée le 13 novembre 1993 par Me Abdel Wahab D..., avocat stagiaire au cabinet associé Z... et A..., sans plus de précisions ; que, par jugement rendu le 31 mai 1994, la chambre civile et commerciale près le tribunal de la wilaya de Nouakchott a confirmé la décision ; que, par arrêt rendu le 24 janvier 1995, la cour d'appel de Nouakchott a "confirmé le jugement de première instance" ; que cet arrêt a été cassé le 8 décembre 1996 par la cour suprême de Mauritanie qui a renvoyé les parties devant la même juridiction autrement composée ; que, par arrêt rendu le 22 février 2006, la chambre commerciale de la cour d'appel de Nouakchott, statuant [par arrêt] réputé contradictoire et en dernier ressort, "[a] condamn[é] le bateau Maris et son assureur club X... à payer conjointement à l'Ets Dahoud la somme de [...] (trente-cinq millions d'ouguiyas) au titre de sa marchandise qu'il n'a pas reçue ainsi que tous les préjudices subis et condamn[é] le bateau Maris et son assureur X... aux entiers dépens" ; que c'est cette dernière décision dont l'exequatur est poursuivi par les Ets Dahoud ; que le X... soutient que la juridiction mauritanienne n'était pas compétente pour statuer sur la demande présentée par les Ets Dahoud en lui opposant une clause d'arbitrage insérée dans le contrat ; que le X... n'a jamais soulevé ce moyen d'irrecevabilité devant les juridictions mauritaniennes, pas plus qu'il n'a soulevé l'incompétence territoriale de ces juridictions ensuite de la localisation à Oslo de son siège social ; qu'il ne saurait soulever ce moyen devant le juge de l'exequatur, dès lors que le juge du fond s'est prononcé et qu'une décision au fond, passée en force de chose jugée, a tranché la contestation dans des conditions qui lui auraient permis de soulever ce moyen ; qu'aux termes des dispositions, qui ont été rappelées plus haut, du traité de coopération en matière de justice entre la République française et la République islamique de Mauritanie du 19 juin 1961, les parties à l'instance dont l'exequatur est demandé doivent avoir été "régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes" ; qu'il résulte de la lecture du document produit en original par le demandeur que le Club X... a été convoqué suivant convocation n° 53/05 du 23/11/2005 délivrée à "Africa TCI représentant local du Bateau Maris et son assureur Club X...", que cette convocation ne précise pas l'objet, le lieu et la date de cette convocation, et que la société TCI Africa a refusé "de décharger la convocation au motif qu'elle ne représente pas le bateau Maris" ; qu'une réponse analogue a été faite le 16 mai 2006 par M. Mohamed E... Sid B... à qui l'huissier a tenté de notifier l'arrêt rendu le 22 février 2006 par la chambre commerciale de la cour d'appel de Nouakchott, en la qualité qu'il lui prêtait de représentant juridique du Club X... ; qu'il est constant que le Club X... n'était pas représenté dans la procédure litigieuse ; que le fait que le site internet commercial du Club X... mentionne la société TCI Africa en qualité de "correspondant" pour la Mauritanie n'implique pas que cette société soit investie de pouvoirs de représentation de la mutuelle d'assurance devant les juridictions mauritaniennes ; que les Ets Dahoud ne sauraient ainsi soutenir que le Club X... a été régulièrement attrait dans la procédure et qu'il s'est vu notifier la décision qui avait été rendue alors [que] dans les deux cas, le représentant de la société TCI Africa a refusé de prendre l'acte et qu'ils ne produisent aucun document établissant que cette société détenait un pouvoir de représentation juridique du X... ; que la décision dont l'exequatur est demandé a ainsi été rendue sans que la partie défenderesse ait été valablement citée ou représentée ; | décision 16-29.095 du 24/05/2018, partie 3 |
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qu'elle ne répond pas aux exigences de la convention liant la République française et la République islamique de Mauritanie et ne peut être déclarée exécutoire sur le territoire français » ;
1°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'au soutien de son allégation selon laquelle le navire Maris et le X... étaient représentés par le cabinet de Maîtres Z... et A... dans l'instance relative à l'affaire n° 59/93 reprise devant la cour d'appel de renvoi de Nouakchott ayant donné lieu à l'arrêt du 22 février 2006, réputé contradictoire, dont l'exequatur était demandé, la société Établissements Dahoud produisait, d'une part, la première page du mémoire en cours de délibéré déposé par Maître Z... et A... devant cette cour au nom du propriétaire du bateau Maris et de son assureur (pièce n° 20 du bordereau de production annexé aux conclusions devant le président du tribunal de grande instance) et, d'autre part, l'attestation de remise d'une convocation n° 64/04 du 3 juin 2004, pour l'affaire n° 059/93, à TCI Africa dont le représentant l'avait signée le 6 juin 2004 (pièces n° 4 et 21 du bordereau de production) ; qu'en jugeant néanmoins qu'il était constant que société X... n'était pas représentée dans la procédure litigieuse, le délégué du président du tribunal de grande instance a dénaturé ces pièces par omission, en méconnaissance du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
2°) ALORS QU'en matière civile et commerciale, les décisions contentieuses et gracieuses rendues par les juridictions siégeant sur le territoire de la République islamique de Mauritanie ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire français si, notamment, les parties ont été régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes ; qu'en jugeant que la décision dont l'exequatur était demandée avait été rendue sans que la partie défenderesse ait été valablement citée ou représentée, quand il n'était pas contesté que la société X... avait formé opposition au premier jugement rendu par défaut, avait comparu devant la première cour d'appel et avait formé le pourvoi en cassation ayant abouti au renvoi de la procédure devant la cour d'appel autrement composée, de sorte que c'est la même instance qui s'était poursuivie devant la cour d'appel de renvoi, ce dont le juge de l'exequatur a déduit que la société X... n'était pas recevable à invoquer devant lui le moyen pris de l'incompétence de la juridiction mauritanienne fondée sur l'existence d'une clause compromissoire puisque la contestation avait été tranchée par la décision étrangère dans des conditions qui auraient permis à la société X... de soulever ce moyen, le délégué du président du tribunal de grande instance n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations dont s'évinçaient que la société X... était représentée à l'instance ayant abouti à sa condamnation au profit de la société Établissements Dahoud, et a violé ainsi l'article 36 c) de l'Accord de coopération en matière de justice entre la République française et la République islamique de Mauritanie du 19 juin 1961. | décision 16-29.095 du 24/05/2018, partie 4 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois n° W 16-18.621, X 16-18.622, Y 16-18.623, Z 16-18.624, A 16-18.625, B 16-18.626, C 16-18.627, D 16-18.628, E 16-18.629, F 16-18.630, H 16-18.631, G 16-18.632, J 16-18.633, K 16-18.634, M 16-18.635, N 16-18.636, P 16-18.637, Q 16-18.638, R 16-18.639, S 16-18.640, T 16-18.641, U 16-18.642, V 16-18.643, W 16-18.644, X 16-18.645, Y 16-18.646, Z 16-18.647, A 16-18.648, B 16-18.649, C 16-18.650, D 16-18.651, E 16-18.652, F 16-18.653, H 16-18.654, G 16-18.655, J 16-18.656, K 16-18.657, M 16-18.658, N 16-18.659, P 16-18.660, Q 16-18.661, R 16-18.662, S 16-18.663, T 16-18.664 et U 16-18.665 formés par :
1°/ M. Christian X..., domicilié [...],
2°/ Mme Annie Y..., domiciliée [...] ,
3°/ Mme Delphine Z..., domiciliée [...],
4°/ M. Julien Z..., domicilié [...],
5°/ Mme Michelle A..., domiciliée [...],
- ces trois derniers agissant en qualité d'ayants droit de Salvador Z...,
6°/ Mme Ginette B..., domiciliée [...],
7°/ M. Patrick C..., domicilié [...],
8°/ M. Didier D..., domicilié [...],
9°/ Mme Valérie E..., domiciliée [...],
10°/ M. Jean-Pierre F..., domicilié [...],
11°/ M. Christian G..., domicilié [...],
12°/ Mme Josiane H..., domiciliée [...],
13°/ M. Joseph I..., domicilié [...],
14°/ Mme Jacqueline J..., domiciliée [...],
15°/ Mme Francette K..., domiciliée [...],
16°/ M. Philippe K...,
17°/ Mme Yolande K...,
domiciliés [...],
18°/ M. Jean-Gilbert L..., domicilié [...],
19°/ M. Alain M..., domicilié [...],
20°/ Mme Monique N..., domiciliée [... ,
21°/ M. O... P... AAA..., domicilié [...],
22°/ Mme Catherine Q..., domiciliée [...],
23°/ Mme Trinidad R..., domiciliée [...],
24°/ M. Yannick S..., domicilié [...],
25°/ Mme Christiane T..., domiciliée [...],
26°/ M. Michel U..., domicilié [...],
27°/ M. Daniel V..., domicilié [...],
28°/ Mme Jeannine W..., domiciliée [...],
29°/ M. Alexandre W..., domicilié [...],
30°/ Mme Brigitte W..., domiciliée chez M. Renaud XX...[...],
31°/ Mme Irène W..., domiciliée [...],
32°/ Mme Jeannine W..., domiciliée [...],
33°/ Mme Martine W..., domiciliée [...] ,
34°/ M. Philippe W..., domicilié chez Mme Christine YY... [...],
35°/ M. Pierre W..., domicilié [...],
36°/ M. Serge W..., domicilié [...],
- ces huit derniers agissant en qualité d'ayants droit de Jean-Marc W...,
37°/ Mme Marie-Christine ZZ..., domiciliée [...],
38°/ M. Claude AA..., domicilié [...],
39°/ M. Alain BB..., domicilié [...],
40°/ M. P... CC..., domicilié [...] ,
41°/ Mme Josiane DD..., domiciliée [...],
42°/ Mme Joëlle EE..., domiciliée [...],
43°/ Mme Anne-Marie FF..., domiciliée [...],
44°/ Mme Chantal GG..., domiciliée [...],
45°/ Mme Jeannette HH..., domiciliée [...],
46°/ M. Michel II..., domicilié [...],
47°/ M. Jean-Claude JJ..., domicilié [...],
48°/ Mme Monique KK..., domiciliée [...],
49°/ Mme Françoise LL..., domiciliée [...],
50°/ Mme Claudie MM..., domiciliée [...],
51°/ M. José NN..., domicilié [...],
52°/ M. Jean-Louis OO..., domicilié [...],
53°/ Mme Roselyne PP..., domiciliée [...],
54°/ Mme Elsa QQ..., domiciliée [...],
contre des arrêts rendus le 7 avril 2016 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2 - chambre sociale), dans les litiges les opposant à :
1°/ M. Jean-Claude RR..., domicilié [...], pris en qualité de mandataire liquidateur de la société par actions simplifiée Bouyer,
2°/ M. Sébastien SS..., domicilié [...], pris en qualité d'administrateur judiciaire de la société par actions simplifiée Bouyer,
3°/ à la société Funkwerk AG, dont le siège est [...] Allemagne),
4°/ à l'AGS Centre de gestion et d'étude, dont le siège est [...],
défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leurs pourvois, les deux moyens de cassation communs annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 10 avril 2018, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme TT..., conseiller référendaire rapporteur, M. Chauvet, conseiller doyen, MM. Maron, Pietton, Mmes Leprieur, Richard, conseillers, Mmes Duvallet, Barbé, M. Le Corre, Mme Prache, conseillers référendaires, M. | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 1 |
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UU..., avocat général référendaire, Mme Becker, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme TT..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de M. X... et des 53 autres salariés ou leurs ayants droit, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Funkwerk AG, l'avis de M. UU..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu la connexité, joint les pourvois n° 16-18.621 à 16-18.665 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 7 avril 2016), que la société Bouyer, jusqu'alors gérée par son fondateur et ayant une activité de production de systèmes de sonorisation des lieux publics et des moyens de transport, a été cédée en 1989 à la société SonoFinance appartenant au groupe REL puis, en 1994, a été rachetée par la société Montalbanaise de sonorisation appartenant au groupe Natexis auquel a succédé en octobre 2000 le groupe Tyco ; qu'en janvier 2008, la société Funkwerk a pris le contrôle de la société Bouyer en devenant son actionnaire unique ; que par jugement du 12 janvier 2010, le tribunal de commerce a ordonné l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au profit de la société Bouyer, puis, par décision du 26 mai 2010, a autorisé sa cession au profit de la société Coflec et le licenciement de 64 salariés ; que par jugement du 26 août 2010, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société Bouyer, M. R... ayant été désigné en qualité de liquidateur ; que M. X... et 44 autres salariés de la société Bouyer, licenciés pour motif économique courant juin 2010, ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l'obligation de prévention de sécurité ainsi que des dommages-intérêts pour licenciements sans cause réelle et sérieuse notamment à l'encontre de la société Funkwerk sur le fondement d'une situation de coemploi et, à titre subsidiaire, sur le fondement de fautes délictuelles de cette dernière ayant conduit à la liquidation judiciaire de l'employeur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les salariés font grief aux arrêts de dire que la société Funkwerk ne pouvait être qualifiée de coemployeur et de rejeter l'ensemble de leurs demandes formulées à son encontre, alors selon le moyen :
1°/ que la qualité de coemployeur peut être reconnue à une société juridiquement distincte d'une autre, elle-même employeur, quand est caractérisée entre elles une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, sans qu'il soit nécessaire de constater l'existence d'un rapport de subordination individuel de chacun des salariés de la filiale à l'égard de la société mère ; qu'ayant relevé que la société Funkwerk avait acquis 100 % du capital de la société Bouyer, que le directeur général de cette dernière, M. VV..., avait été nommé par la société Funkwerk, qu'il était placé sous la dépendance hiérarchique directe d'un dirigeant de cette dernière, à laquelle il devait rendre compte régulièrement de sa gestion et que les deux sociétés avaient des activités complémentaires, il en résultait une confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre les deux sociétés ; qu'en considérant néanmoins que la société Funkwerk ne pouvait être qualifiée de coemployeur du personnel de sa filiale, la société Bouyer, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant par là même l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que la qualité de coemployeur de deux sociétés juridiquement distinctes ne peut être retenue que s'il est caractérisé entre ces sociétés une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, sans qu'il soit nécessaire de constater l'existence d'un rapport de subordination individuel de chacun des salariés de la filiale à l'égard de la société mère ; qu'ayant relevé que M. VV..., directeur général de la société Bouyer, était rattaché à l'autorité hiérarchique d'un dirigeant de la société Funkwerk et qu'il devait rendre compte à la direction de la société mère de l'avancement des négociations quant au plan de sauvegarde de l'emploi, sans en déduire une immixtion dans la gestion de la société Bouyer, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ;
Et attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d'appel a constaté la réalité d'une autonomie décisionnelle de la société Bouyer par rapport à la société mère Funkwerk, notamment dans la gestion sociale et financière de l'entreprise ainsi que dans la stratégie commerciale ou la production, et que leurs activités et clientèles étaient différentes ; | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 2 |
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qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu en déduire l'absence, entre les deux sociétés, d'une confusion d'intérêts, d'activité et de direction et qu'en conséquence, la société Funkwerk n'avait pas la qualité de coemployeur ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que les salariés font grief aux arrêts de dire que la société Funkwerk n'avait commis aucune faute à leur égard, alors selon le moyen :
1°/ qu'ayant constaté que la société Bouyer, détenue à 100 % par la société Funkwerk, avait connu une dégradation extrêmement rapide de sa trésorerie et que la société mère avait refusé de financer à perte un plan de sauvegarde, la cour d'appel devait en déduire que cette société avait concouru à la déconfiture de l'employeur et à la disparition des emplois qui en est résulté ; qu'en considérant néanmoins que la société Funkwerk n'avait commis aucune faute, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, dans sa version alors applicable ;
2°/ que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; que la cour d'appel, après avoir constaté que la société Bouyer était détenue à 100 % par la société Funkwerk, a jugé que les deux sociétés constituant des entités juridiquement distinctes, la société mère n'avait pas la possibilité de s'immiscer dans la gestion de sa filiale pour mettre en oeuvre en ses lieu et place une stratégie industrielle et commerciale ainsi qu'une politique de gestion des ressources humaines, que ce soit en termes de plan de formation ou de prévention des risques psychosociaux ; qu'en se prononçant ainsi sans rechercher si la société Funkwerk, qui avait pourtant nommé le directeur général de la société Bouyer et qui en était l'actionnaire à 100 %, n'était pas en mesure de prévenir la dégradation de sa situation économique et financière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa version alors applicable ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que la situation de la société Bouyer était compromise depuis le début des années 2000 en l'absence de mise en oeuvre de moyens commerciaux, technologiques ou industriels par les acquéreurs successifs, qu'une large partie de la trésorerie injectée avant la cession au profit de la société Funkwerk avait été absorbée au cours de l'exercice 2008 par les pertes de la société dont la dégradation extrêmement rapide de la trésorerie n'avait pu être empêchée malgré de multiples actions menées au sein de l'entreprise au cours de l'année 2009, que l'avance en compte courant de la société Bouyer au profit de la société Funkwerk constatée au 26 novembre 2009 avait été remboursée et que la facturation de "management fees" entre les deux sociétés correspondait à de réelles prestations, que la société Funkwerk n'avait pas à mettre en oeuvre au lieu et place de sa filiale une stratégie industrielle et commerciale ainsi qu'une politique de gestion des ressources humaines notamment par des plans de formation ou de prévention des risques psychosociaux, et que la dégradation rapide de la trésorerie de la société Bouyer était de nature à légitimer le refus de financer un plan de sauvegarde de l'emploi par la société Funkwerk qui était elle-même en difficultés économiques ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider que la société Funkwerk n'avait pas, par les décisions de gestion prises, commis de faute ayant compromis la bonne exécution par sa filiale de ses obligations ni contribué à sa situation de cessation des paiements ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens communs aux pourvois n° W 16-18.621 à U 16-18.665 produits par la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X... et les 53 autres salariés ou leurs ayants droit
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Funkwerk ne pouvait être qualifiée de co-employeur et d'avoir rejeté, en conséquence, l'ensemble des demandes du salarié formulées à son encontre ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'
« Il appartient au salarié de démontrer que la société FUNKWERK AG avait à son égard la qualité de co-employeur ; qu'il n'est ni invoqué ni démontré que la prestation de travail du salarié a été exécutée sous la subordination de la société FUNKWERK AG ; | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 3 |
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qu'en dehors de l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'au soutien de la démonstration d'une telle ingérence de la société FUNKWERK AG dans la gestion économique et sociale de la société Bouyer, le salarié invoque les éléments suivants : depuis janvier 2008, la société FUNKWERK AG était l'actionnaire unique de la société Bouyer qui était totalement dépendante du groupe, le dirigeant de la société Bouyer a été désigné par elle, il provenait du groupe et en référait systématiquement au groupe qui prenait toutes les décisions économiques et sociales, la société FUNKWERK AG s'était engagée à financer le plan social puis est revenue sur cet engagement, provoquant ainsi l'état de cessation de paiement de la société Bouyer ; que le fait qu'une filiale soit détenue à 100 % par une autre société crée nécessairement un lien de dépendance par rapport à la société mère et s'il n'est pas contesté que la société FUNKWERK AG avait désigné le directeur général de sa filiale, cette décision n'était que l'expression de sa situation d'actionnaire unique de la société Bouyer et ne peut caractériser en soi une immixtion anormale de la société mère dans la gestion de sa filiale, et ce, même si ce dirigeant provient du groupe ; que ce dirigeant, Monsieur VV..., était rattaché à l'autorité hiérarchique d'un dirigeant de la société mère, il n'est pas démontré que ce rattachement se traduisait par une ingérence de la société FUNKWERK AG dans la gestion sociale ; qu'en particulier, il n'est ni justifié ni même allégué que la société FUNKWERK AG soit intervenue ou se soit substituée à l'employeur contractuel que ce soit dans le recrutement de tel salarié, dans le déroulement des carrières, dans la fixation des rémunérations du personnel ou dans l'exercice du pouvoir disciplinaire de celle-ci ; que certes, il ressort de l'examen des comptes rendus de réunions du comité d'entreprise de la société Bouyer que Monsieur VV... devait rendre compte à la direction de la société mère de l'avancement des négociations quant au plan de sauvegarde de l'emploi ; que, cependant, la lecture de ces comptes rendus démontre que ce plan a été élaboré au sein de la société Bouyer en concertation avec les institutions représentatives du personnel de cette société sans qu'il soit établi que les mesures prévues ont été dictées par la société mère ; que la réalité de l'autonomie décisionnelle de la société Bouyer à ce sujet est d'ailleurs confortée par le refus finalement opposé par la société FUNKWERK AG à la prise en charge financière du second plan adopté au sein de la société Bouyer ; que, par ailleurs, sur le plan de la stratégie commerciale, les activités respectives, des deux sociétés étaient certes complémentaires mais distinctes puisque la société Bouyer produisait et commercialisait des systèmes de sonorisation des lieux publics et moyens de transport (amplificateurs, haut-parleurs, microphones) alors que le groupe FUNKWERK est spécialisé dans les systèmes de communication informatique professionnels, les alarmes, les logiciels et les solutions téléphoniques ; que les deux sociétés avaient donc des activités et des clientèles différentes et il n'est ni démontré ni même allégué que la société mère intervenait dans la gestion des commandes, la fabrication des produits ou la fixation de leurs prix ; qu'enfin, s'il est exact, que le 5 janvier 2010, Monsieur VV... indiquait au comité d'entreprise que la société FUNKWERK AG lui avait demandé de préparer le dossier de cessation de paiement de la société Bouyer, la saisine du tribunal de commerce était inéluctable compte tenu du rapport d'alerte établi le 31 décembre 2009 par le commissaire aux comptes et de la situation financière dans laquelle se trouvait la société Bouyer ; que dès lors, à défaut de lien de subordination et faute pour le salarié de caractériser une immixtion de la société FUNKWERK AG dans la gestion économique et sociale de la société Bouyer excédant la nécessaire coordination des actions économiques entre des sociétés appartenant à un même groupe, il convient de considérer que la société FUNKWERK AG n'a pas la qualité de co-employeur » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
« Pour retenir que la société Funkwerk AG est, ou pas, le co-employeur avec la SAS BOUYER des salariés, il faut au préalable définir le rôle et la fonction de chaque société ; (...) que l'article L. 1224-1 du code du travail fixe une liste de situations dans lesquelles les contrats de travail en cours sont maintenus en cas de modification de la situation juridique de l'employeur ; que cette liste n'est pas exhaustive et la jurisprudence considère qu'il y a maintien des contrats en cours chaque fois qu'il y a continuité de la même entreprise ; | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 4 |
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qu'en effet, la Cour de cassation a posé comme principe que les articles 1er et 3ème de la directive du 14 février 1977 du Conseil des communautés européennes et l'article L. 1224-1 du code du travail s'applique même en l'absence d'un lien de droit entre les employeurs successifs, à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que la mise en oeuvre de l'article L. 1224-1 du code du travail en cas de modification est soumise à deux conditions : l'existence d'une entité économique autonome, le maintien de l'identité et la poursuite de l'activité de l'entité économique ; que l'article L. 1224-1 du code du travail s'applique à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivi ou reprise ; qu'à ce jour, selon une jurisprudence constante : « constitue une entité économique un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; que cette définition paraît en réalité assez proche de celle donnée par la jurisprudence communautaire et celle issue de la directive du 12 mars 2001 ; que pour cette dernière, l'entité économique est entendue comme un ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite d'une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire ; qu'il ressort de la définition jurisprudentielle contenue dans l'arrêt du 7 juillet 1998, que l'entité économique doit comprendre plusieurs éléments : des moyens corporels, des éléments incorporels, du personnel propre ; qu'en principe, la présence d'un personnel propre constitue un élément supplémentaire en vue de la reconnaissance d'une entité économique autonome ; que toutefois, dans certains secteurs reposant essentiellement sur de la main-d'oeuvre, la jurisprudence tant communautaire que nationale peut être amenée à considérer cette condition relative au personnel comme le seul élément constitutif de l'entité ; que selon cette définition jurisprudentielle, l'ensemble des moyens humains ou matériels doit être organisé ; qu'un objectif propre doit en outre être poursuivi ; que les salariés de la SAS BOUYER n' apportent pas la preuve qu'ils étaient directement sous les directives de la société FUNKWERK AG, tant en ce qui concerne la direction, l'administratif, la gestion financière, la fabrication, la conception des produits et leurs commercialisations ; qu'en conséquence, le Conseil retient que la SAS BOUYER a conservé son entité économique autonome lors du rachat par la société FUNKWERK AG ; que celui qui invoque le bénéfice d'un contrat de travail doit prouver l'existence d'un lien de subordination avec le "Co-employeur" dans le cas présent ; qu'un lien de subordination se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le lien de subordination se caractérise également par l'autorité et le pouvoir de contrôle de l'employeur sur les modalités d'exécution des tâches, la fixation des horaires, la désignation du lieu du travail, les conditions matérielles d' exercice de l'activité et les contraintes déterminées unilatéralement par l'employeur : « respect des délais, remise périodique de comptes rendus d'activité, affectation des secteurs d'activité etc. ; que les contrats de travail établis lors de l'embauche initiale des salariés, ils ont subi aucune modification lors du rachat de la SAS BOUYER par la société FUNKWERK AG ; que l'ensemble du personnel recevait les directives directement de la SAS BOUYER et non de la société Funkwerk AG ; qu'en conséquence, le Conseil retient le lien de subordination de l'ensemble des salariés à la SAS Bouyer ; que pour que la société FUNKWERK AG soit retenue comme co-employeur, dût-elle avoir rempli trois confusions : d' intérêts, d'activité et de direction ; que, sur la confusion d'intérêts : la société SAS Bouyer était autonome sur le plan financier ; que ce n'était pas la société FUNKWERK AG qui gérait directement le financier, tout au plus, sa participation à la décision du montant à allouer aux deux plans sociaux que les salariés ont refusés ; que la société FUNKWERK AG était, certes, le principal actionnaire, mais cela ne suffit pas et les salariés n'apportent pas de preuve contraire pour reconnaître une ingérence de la société FUNKWERK AG à la gestion financière de la SAS BOUYER ; que, sur la confusion d'activité : aucune preuve fourni par l'ensemble du personnel de la SAS BOUYER pour reconnaître que la société FUNKWERK AG avait une quelconque fonction dans l'organisation et le fonctionnement de la SAS Bouyer, soit au point de vue de la production, de la conception, de la gestion du personnel, de la commercialisation des produits ; que le seul élément est une note de la société Funkwerk AG destinée à la clientèle, qui avance une synergie commerciale entre les deux sociétés avec des productions complémentaires, mais cela ne suffit pas pour retenir une confusion d'activité de la part de la société FUNKWERK AG dans la SAS BOUYER ; que, sur la confusion de direction, la société Funkwerk AG, lors du rachat de la SAS BOUYER, a repris 100 % des actions de celle-ci, elle était en droit, de ce fait, à pouvoir désigner la personne qui assumerait la direction de la SAS BOUYER ; | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 5 |
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qu'aucune preuve ne peut être retenue pour affirmer que la société FUNKWERK AG s'ingérait dans la direction et la gestion de la SAS BOUYER, pour preuve, lorsque la direction de la SAS BOUYER et les membres du comité d'entreprise se sont accordés sur un plan de sauvegarde de l'emploi en novembre 2009, la direction de la SAS BOUYER a demandé une aide financière de la part de la société FUNKWERK AG ; que cette aide n'a pas été accordée par le groupe, ce qui prouve la dépendance des directions des deux sociétés, puisque le plan de sauvegarde avait été entériné par la direction de la SAS BOUYER, et refusé par la société FUNKWERK AG ; que suivant tous les éléments développés ci-dessus, et en conséquence, le Conseil dit et juge que la société FUNKWERK AG n'est pas retenue comme co-employeur de l'ensemble des salariés de la SAS Bouyer » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE
La qualité de co-employeur peut être reconnue à une société juridiquement distincte d'une autre, elle-même employeur, quand est caractérisée entre elles une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, sans qu'il soit nécessaire de constater l'existence d'un rapport de subordination individuel de chacun des salariés de la filiale à l'égard de la société mère ; qu'ayant relevé que la société Funkwerk avait acquis 100 % du capital de la société Bouyer, que le directeur général de cette dernière, M. VV..., avait été nommé par la société Funkwerk, qu'il était placé sous la dépendance hiérarchique directe d'un dirigeant de cette dernière, à laquelle il devait rendre compte régulièrement de sa gestion et que les deux sociétés avaient des activités complémentaires, il en résultait une confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre les deux sociétés ; qu'en considérant néanmoins que la société Funkwerk ne pouvait être qualifiée de co-employeur du personnel de sa filiale, la société Bouyer, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant par là-même l'article L. 1221-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE
La qualité de co-employeur de deux sociétés juridiquement distinctes ne peut être retenue que s'il est caractérisé entre ces sociétés une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, sans qu'il soit nécessaire de constater l'existence d'un rapport de subordination individuel de chacun des salariés de la filiale à l'égard de la société mère ; qu'ayant relevé que Monsieur VV..., directeur général de la société Bouyer, était rattaché à l'autorité hiérarchique d'un dirigeant de la société Funkwerk et qu'il devait rendre compte à la direction de la société mère de l'avancement des négociations quant au plan de sauvegarde de l'emploi, sans en déduire une immixtion dans la gestion de la société Bouyer, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1221-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Funkwerk n'avait commis aucune faute à l'égard du salarié ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE
« Malgré l'absence de reconnaissance de la qualité de co-employeur, la responsabilité délictuelle de la société mère peut être engagée s'il est démontré qu'elle a commis des fautes ayant concouru à la déconfiture de sa filiale ; qu'en l'espèce, Monsieur X... soutient que la société FUNKWERK AG a volontairement abandonné la société Bouyer que ce soit économiquement, commercialement et socialement et a ainsi contribué d'une part, aux licenciements collectifs de la moitié des salariés et, d'autre part, au niveau très faible d'employabilité de tous les salariés ainsi qu'à la dégradation de leur état de santé ; (...) que le rapport du cabinet Syndex conclut « à la responsabilité de la société FUNKWERK AG dans la situation économique et sociale de la société Bouyer » ; que cette affirmation ne peut qu'être largement nuancée : en premier lieu, il ressort des éléments relevés dans ce rapport que la situation de la société Bouyer était compromise depuis le début des années 2000 et que les acquéreurs successifs, notamment le groupe TYCO, précédent actionnaire, n'avaient mis en place aucun moyen conséquent au niveau commercial, technologique et industriel ; que la situation financière avait certes été assainie avant la cession des actions de la société Bouyer au profit de la société FUNKWERK AG mais il n'est pas contesté qu'une large partie de la trésorerie injectée avant la cession par le cédant (TYCO) avait été absorbée au cours de l'exercice 2008 par les pertes de la société ; qu'en second lieu, les deux sociétés constituant des entités juridiquement distinctes, la société mère n'avait pas la possibilité de s'immiscer dans la gestion de sa filiale pour mettre en oeuvre en ses lieu et place une stratégie industrielle et commerciale ainsi qu'une politique de gestion des ressources humaines que ce soit en termes de plan de formation ou de prévention des risques psychosociaux ; que par ailleurs, si le premier plan de sauvegarde de l'emploi n'a été amorcé qu'en juin 2008, ce plan relevait de l'initiative de la direction de la société Bouyer et, compte tenu du changement d'actionnaire intervenu en janvier 2008, le délai écoulé ne peut être qualifié d'excessif. | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 6 |
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En outre, la société FUNKWERK AG ne peut se voir imputer à faute la durée de la procédure de contestation du premier plan de sauvegarde, étant observé qu'après l'annulation judiciaire de celui-ci, la société Bouyer a immédiatement mis en oeuvre les consultations nécessaires en vue de l'élaboration d'un second plan ; qu'en troisième lieu, l'examen des comptes rendus de réunions du comité d'entreprise fait apparaître que contrairement à ce qui est affirmé dans le rapport du cabinet Syndex, des actions ont été menées au sein de la société Bouyer : en janvier 2009, le directeur général présentait un nouveau découpage des zones de commercialisation emportant redistribution des secteurs de l'équipe commerciale (compte rendu CE du 27.01.2009), un projet de division de la société en deux entités destiné à réduire les dépenses était prévu (compte rendu CE du 20.05.2009), en juin 2009, le nouveau directeur général évoquait devant le comité d'entreprise la nécessité de définir une nouvelle stratégie de l'entreprise (compte rendu CE du 23.06.2009), en octobre 2009, le directeur général annonçait la nécessaire rationalisation de la gamme de produits fabriqués par l'entreprise ainsi qu'un séminaire des commerciaux, prévu le 14 octobre, pour définir les lignes de conduite ; que l'amélioration de la production était soulignée (compte rendu CE du 6.10.2009), en novembre 2009, le directeur général informait les membres du comité d'entreprise que le groupe avait décidé de consentir en 2010 un prêt de 2,7 millions d'euros à la société Bouyer (compte rendu du 9.11.2009) ; qu'en quatrième lieu, le commissaire aux comptes, après avoir sollicité le 3 décembre 2009 les explications de la société Bouyer, soulignait, dans son rapport d'alerte établi le 31 décembre 2009, l'extrême gravité de la dégradation de la trésorerie de la société Bouyer, passée de 3.820 K€ au 31 décembre 2008 à 346 K€ à fin décembre 2009, ainsi que le montant des besoins mensuels de trésorerie de la société Bouyer (250 K€ à 300 K€) qui rendaient impossible le financement du plan de sauvegarde et compromettaient à très court terme la situation financière de la société ; que cette dégradation extrêmement rapide de la trésorerie de la société est de nature à expliquer l'attitude de la société mère ainsi que son refus de financer à perte un plan de sauvegarde, étant souligné que le prétendu engagement pris initialement par la société FUNKWERK AG à ce sujet ne repose que sur les affirmations des salariés, reprises dans le rapport du cabinet Syndex mais qui ne sont étayées par aucune pièce probante ; que ce refus ne peut donc être qualifié de légèreté blâmable et a fortiori de fautif d'autant que, compte tenu de la situation financière de la société Bouyer, l'intervention financière de la société mère aurait pu être qualifiée de soutien abusif au sens de l'article L. 650-1 du code de commerce et que le groupe FUNKWERK rencontrait lui-même des difficultés économiques ; qu'enfin, si l'existence d'un compte courant d'un montant de 900 K€ au 26 novembre 2009 auprès de la société FUNKWERK AG est établie par le rapport d'alerte, il ressort du courrier de la société Bouyer du 18 décembre 2009 que cette avance a été remboursée suite au rapport, ce qui met à néant l'argumentation reposant sur une ponction abusive de trésorerie ; que par ailleurs, la facturation de managment fees entre une société mère et ses filiales notamment pour les prestations de direction générale fournies par la société holding ne caractérise pas en soi une pratique abusive dès lors qu'il n'est ni démontré ni même allégué que ces sommes auraient été versées sans contrepartie réelle ; qu'il n'est ainsi pas établi que la société FUNKWERK AG a, par sa faute ou sa légèreté blâmable, compromis la bonne exécution par sa filiale de ses obligations ou a contribué à la situation de cessation de paiement de la société Bouyer ; qu'en conséquence, la décision déférée qui a débouté Monsieur X... de ses demandes à l'encontre de la société FUNKWERK AG sera confirmée » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE
« C'est en premier lieu le groupe FUNKWERK AG qui est mis en eu cause par les salariés en précisant que pendant les deux aimées de son actionnariat au sein de la SAS Bouyer, leurs travaux de formation étant restés faible, ce que renforce leur faible développement des compétences el leur faible niveau d' employabilité ; que ce constat est mentionné dans le rapport ERGOTEC ; qu'il ressort des différents relevés de carrière des salariés, que la majorité de ceux-ci ne sont pas restés à leur niveau d'embauche, ce qui tend à prouver qu'il ont bien reçu une formation soit interne, soit externe de l'entreprise ; que l'article L 632 1-1 du code du travail est issu des lois du 4 mai 2004 et du 18 janvier 2005, de sorte que, avant 2004, l'obligation de l'employeur au titre de la formation était fondée uniquement sur l'obligation générale d'exécution loyale du contrat ; que le deuxième alinéa de l'article L. 632 1-1 du code du travail a été instauré par une loi du 24 novembre 2009 ; | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 7 |
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qu'en matière de responsabilité contractuelle, il appartient au demandeur, conformément aux principes généraux du droit, d'établir que sont réunis trois éléments distincts : une faute commise par le défendeur, un préjudice subi par le demandeur, le lien de causalité entre ces deux parties ; qu'aucun des salariés de la SAS BOUYER n'apportent un quelconque manquement de la société sur le plan de la formation, tout au plus, ils incriminent le groupe FUNKWERK AG, en se référençant sur les rapports ERGOTEC et SYNDEX, de ne pas avoir assumé ses responsabilité sur le plan de la formation du personnel ; qu'il est à noter que ces rapports énoncent des informations générales qui sont assez éloignés des cas concrets de chaque salarié ; que dans les conclusions de l'ensemble du personnel, il n'existe aucun cas concret de manquement de formation qui aurait bloqué une évolution de carrière d'un salarié, ni d' un quelconque préjudice subi suite à un manquement de formation ; que suivant les éléments ci-dessus développés, les salariés de la SAS BOUYER ne rapportent pas de preuve d'une quelconque faute commise par l'employeur sur un plan de manquement de son devoir de formation, ni qu'ils aimaient subi un préjudice à ce manquement, ils ne rapportent également aucun lien de causalité entre la faute et le préjudice : en conséquence, l'ensemble des salariés de la SAS BOUYER seront déboulés de leurs demandes de dommages et intérêts formulées à ce titre » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'
Ayant constaté que la société Bouyer, détenue à 100 % par la société Funkwerk, avait connu une dégradation extrêmement rapide de sa trésorerie et que la société mère avait refusé de financer à perte un plan de sauvegarde, la cour d'appel devait en déduire que cette société avait concouru à la déconfiture de l'employeur et à la disparition des emplois qui en est résulté ; qu'en considérant néanmoins que la société Funkwerk AG n'avait commis aucune faute, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, dans sa version alors applicable ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE
Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; que la cour d'appel, après avoir constaté que la société Bouyer était détenue à 100 % par la société Funkwerk, a jugé que les deux sociétés constituant des entités juridiquement distinctes, la société mère n'avait pas la possibilité de s'immiscer dans la gestion de sa filiale pour mettre en oeuvre en ses lieu et place une stratégie industrielle et commerciale ainsi qu'une politique de gestion des ressources humaines, que ce soit en termes de plan de formation ou de prévention des risques psychosociaux ; qu'en se prononçant ainsi sans rechercher si la société Funkwerk AG, qui avait pourtant nommé le directeur général de la société Bouyer et qui en était l'actionnaire à 100 %, n'était pas en mesure de prévenir la dégradation de sa situation économique et financière, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil dans sa version alors applicable. | décision 16-18.621 du 24/05/2018, partie 8 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société L'opticien Afflelou, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , anciennement dénommée FP2A venant aux droits de la société AA IDF, anciennement dénommée Alain Afflelou succursales,
contre l'arrêt rendu le 10 mai 2017 par la cour d'appel de Limoges (chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Iéna, société civile professionnelle, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 5 avril 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, MmeCorbel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Bénabent, avocat de la société L'opticien Afflelou, de la SCP Briard, avocat de la société Iéna ;
Sur le rapport de MmeCorbel, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société L'opticien Afflelou aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société L'opticien Afflelou ; la condamne à payer à la société Iéna la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision.
Moyens produits par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société L'opticien Afflelou.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif de ce chef, d'avoir condamné la société Afflelou, en sa qualité de cédante d'un fonds de commerce comprenant le droit au bail et de garante solidaire de M. Y..., cessionnaire, à payer à la société Iena, bailleur, la somme de 270 101,16 euros au titre des arriérés de loyers, de charges et de remboursements de taxes foncières ;
AUX MOTIFS QU' « il ressort de l'état du passif de la liquidation judiciaire de M. Y... visé par le juge-commissaire et le mandataire judiciaire (pièce de la SCP n° 55), ainsi que de l'avis d'admission du 25 novembre 2014 (pièce n° 53), que la créance de la SCP a été admise pour la somme de 2 336,86 euros à titre de privilège général, de 25 790,74 euros à titre de privilège spécial et de 272 438 euros à titre chirographaire ;
Que l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision d'admission de la créance locative au passif de M. Y..., débiteur principal, est opposable à son garant solidaire en ce qui concerne l'existence, le montant et la nature de cette créance, de sorte que - sans préjudice de la preuve qui est désormais apportée par la production des différentes factures de loyers et charges (pièces de la SCP n° 26 à 52), prenant notamment en compte, de manière certaine (cf. pièce n° 37), les trop-perçus résultés de la fixation judiciaire du loyer commercial par arrêts de la cour d'appel de Limoges, ainsi que des demandes de remboursement de taxes foncières (pièces n° 29, 36, 41, 46, 51 et 61 à 66) - la SCP apparaît bien fondée à réclamer à la société Afflelou le paiement de la somme de 270 101,16 euros, toutes taxes comprises, à laquelle elle limite le montant de sa demande ;
Que la SCP est, en revanche, infondée à solliciter le paiement d'intérêts légaux et conventionnels à compter de la date d'exigibilité des loyers, dont le cours a été arrêté par le jugement d'ouverture de la procédure collective et qui n'ont pas été mentionnés dans les déclarations de créance au passif des procédures collectives du débiteur principal ;
que si, dans le dispositif de l'assignation initiale du 23 février 2010 de la société anonyme ALAIN AFFLELOU SUCCURSALES (pièce de l'intimée n° 1) - ayant, au reste, abouti à une ordonnance de péremption d'instance du conseiller de la mise en état du tribunal de grande instance de Limoges du 1er avril 2014 (pièce de l'intimée n° 3), la SCP a employé le terme juridiquement inapproprié de 'caution', alors cependant que les motifs de cet acte indiquaient clairement qu'elle visait l'engagement solidaire du cédant, la société Afflelou ne saurait, pour autant, en inférer que la SCP, libre de modifier le fondement de son action en paiement, y compris en cause d'appel, se serait par-là même contredite à ses dépens ; | décision 17-20.947 du 17/05/2018, partie 1 |
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Qu'exactement réassignée, le 19 septembre 2014, en sa qualité de cédante du fonds de commerce et de garante solidaire des loyers, et non de caution, la société Afflelou se trouve, dès lors, mal fondée à se prévaloir des dispositions des articles 2313 et 2314 du code civil à l'effet d'être déchargée de ses engagements et de ses obligations de codébitrice solidaire ;
Qu'il sera, en outre, superfétatoirement observé que la SCP, qui a effectué une déclaration de créance à titre entièrement privilégié, a été partiellement admise à ce titre à concurrence des sommes de 2 336,86 euros au titre des frais de justice et de 25 790,74 euros au titre des loyers impayés depuis la prise d'effet du bail jusqu'au jugement d'ouverture du redressement judiciaire du 16 décembre 2004 (sic lire 2009) (cf. pièces n° 12, 53 et 55) ;
Que, sans préjudice de la procédure en fixation du montant du loyer commercial suivie devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Limoges (jugement du 25 novembre 2009, pièce de la SCP n° 8), puis devant la cour d'appel de Limoges (arrêts des 11 janvier 2011 et 25 septembre 2013, pièces n° 9 et 10), il apparaît que, les 4 et 25 novembre 2010, la SCP a adressé à M. Y... des lettres recommandées valant mises en demeure de payer (pièces n° 56 et 59), que les 23 janvier 2009, 27 août 2009, 16 novembre 2010 et 19 avril 2011, elle lui a fait délivrer des commandements de payer (pièces n° 6, 7, 54, 57 et 58) et que les 11 mars 2009, puis les 2 et 3 août 2011, elle l'a fait assigner en référé, ainsi que Me Philippe Z... ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de M. Y..., en paiement provisionnel des arriérés de loyers et charges et en résiliation immédiate du bail, procédure à laquelle elle a, le 5 décembre 2013, appelé en intervention forcée la société ALAIN AFFLELOU SUCCURSALES (pièces n° 54) ;
Que, dans ces conditions, aucune négligence fautive ni manque de diligence n'apparaissent caractérisés à l'encontre de la SCP, qui puissent engager sa responsabilité à l'égard de la société AFFLELOU, en sorte que cette dernière est mal fondée à solliciter l'allocation de dommages-intérêts qui viendraient se compenser avec la somme de 270 101,16 euros dont elle est redevable ;
Que, de même, en l'absence d'une quelconque faute ou défaillance imputable à la SCP, la société AFFLELOU ne saurait demander à être déchargée, à ce titre, de son obligation de garante solidaire » ;
ALORS QUE lorsqu'une clause d'un contrat de cession de bail prévoit que le cédant restera garant solidaire à l'égard du bailleur du paiement du loyer et de l'exécution du bail par le cessionnaire, le cédant est en droit d'opposer au bailleur ses fautes pour être déchargé en tout ou partie de cette obligation ; que commet une négligence fautive envers le garant, le bailleur qui, après plusieurs commandements de payer délivrés au locataire et demeurés infructueux, omet de mettre un terme, par une procédure judiciaire, à la persistance des manquements contractuels visés par le premier commandement ; qu'en l'espèce, la société Afflelou faisait expressément valoir, devant la Cour d'appel, que la société Iena, après s'être désistée de la première procédure en référé engagée le 11 mars 2009 à l'encontre de M. Y..., cessionnaire, avait attendu les 2 et 3 août 2011, soit plus de deux ans, pour réassigner en référé respectivement le locataire défaillant et Maître Z..., ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de M. Y..., en paiement des arriérés de loyers et charges et en résiliation immédiate du bail (conclusions, p. 15 et 16) ; qu'en décidant néanmoins que le bailleur n'aurait commis aucune négligence dans le recouvrement de sa créance ayant provoqué un accroissement anormal de la dette du preneur, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si, indépendamment des multiples commandements de payer délivrés à M. Y... et restés sans suite, le bailleur n'avait pas commis une faute en laissant s'écouler plus de deux ans entre le désistement d'instance et la réintroduction d'une nouvelle procédure judiciaire en résiliation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Afflelou à payer à la société Iena, bailleur, la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
| décision 17-20.947 du 17/05/2018, partie 2 |
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AUX MOTIFS QUE « bien que parfaitement informée, tant par la SCP que par un courrier du 17 septembre 2010 de Me Z... (pièce de l'intimée n° 2), mandataire judiciaire auprès duquel elle a produit sa propre créance au titre de l'exercice éventuel d'une action récursoire (pièce de l'intimée n° 4), des vicissitudes de l'exploitation du fonds de commerce cédé, et plus spécialement du non-paiement des loyers et charges, ainsi que des taxes foncières, par M. Y... dont elle s'était portée garante solidaire, la société Afflelou n'a cependant donné aucune suite aux mises en demeure qui lui ont été adressées par lettres recommandées de la SCP des 27 février et 14 août 2009, puis du 15 novembre 2010, de s'en acquitter aux lieux et place du cessionnaire (v. pièces n° 13, 14 et 15), et n'a pas davantage accompli de mesures particulières à l'encontre de ce dernier, alors même qu'à défaut pour la SCP de déférer à sa mise en demeure d'engager une procédure en résiliation du bail et en expulsion du locataire, alors bénéficiaire d'un plan de redressement judiciaire adopté le 17 novembre 2010, il s'engageait, aux termes d'une lettre recommandée de son avocat du 22 novembre 2010, à agir directement contre ce dernier par application de l'article 1165 du code civil (cf. pièce de la SCP n° 24) ;
Qu'en s'abstenant ainsi totalement, et sans motif valable, de remplir les obligations de garante solidaire du cessionnaire, auxquelles elle s'était contractuellement engagée par l'acte de cession de fonds de commerce du 9 mai 2005 (pièce de la SCP n° 2), la société Afflelou a occasionné un préjudice économique et financier à la SCP, spécialement privée, depuis février 2009, des sommes nécessaires au paiement des charges et taxes foncières afférentes à son bien immobilier ; qu'en réparation, elle sera donc condamnée à lui verser une somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts » ;
1) ALORS QUE tenu de respecter le principe du contradictoire, le juge ne peut soulever d'office un moyen sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, outre la question de la négligence fautive de la société Iena dans le recouvrement de sa créance, le litige portait sur l'existence d'une prétendue « résistance abusive » de la société Afflelou (conclusions de la société Iena, p. 9-10) ; qu'en retenant de son propre mouvement (arrêt, p. 3 § 5), sans avoir au préalable invité les parties à s'expliquer sur ce moyen relevé d'office, que la société Afflelou aurait été tenue, en vertu d'un courrier recommandé de son avocat du 22 novembre 2010, d'accomplir des « mesures particulières à l'encontre (du cessionnaire) » visant à l'exécution de ses propres engagements contractuels par le locataire, la Cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, tout contrat n'est valable que si la chose, objet de l'obligation, est déterminée ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a cru pouvoir s'emparer d'une phrase imprécise - et sortie de son contexte - d'un courrier de l'avocat de la société Afflelou du 22 novembre 2010 qui énonçait que « faute de déférer à la présente mise en demeure, la société Alain Afflelou Succursales agira directement à l'encontre de Monsieur Philippe Y... en application des dispositions de l'article 1165 du code civil », pour en déduire que la société Afflelou aurait souscrit l'obligation, au profit de la société Iena, d'accomplir des « mesures particulières à l'encontre (du cessionnaire) » afin que celui-ci exécute ses propres engagements contractuels envers le bailleur ; qu'en statuant ainsi, alors que l'obligation « d'agir directement à l'encontre de Monsieur Philippe Y... » n'était pas suffisamment précise pour satisfaire à l'exigence de détermination de la prestation, la Cour d'appel a violé l'article 1129 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
3) ALORS QUE, ENCORE PLUS SUBSIDIAIREMENT la clause de garantie solidaire à la charge du cédant figurant au bail initial est d'interprétation stricte ; que le bail du 18 mai 2004 stipulait seulement que le preneur restait garant solidaire de tous cessionnaires « pour le paiement des loyers et l'exécution de l'ensemble des clauses du bail et notamment en ce qui concerne l'affectation donnée aux lieux loués » ; qu'en présupposant que l'engagement du cédant aurait inclus celui de prendre des « mesures particulières » à l'encontre du cessionnaire afin que ce dernier exécute ses propres engagements contractuels à l'égard du bailleur, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1165 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. | décision 17-20.947 du 17/05/2018, partie 3 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. Jean-Pierre Z... , domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 5 septembre 2016 par la cour d'appel de Rennes (6e chambre A), dans le litige l'opposant à Mme Stéphanie Y... , épouse Z... , domiciliée [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 mars 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme X..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme X..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat de M. Z... , de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de Mme Y... , l'avis de Mme A..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche et en sa troisième branche qui est recevable :
Vu l'article 1180-5 du code de procédure civile ;
Attendu que, lorsque le juge décide qu'un droit de visite s'exercera dans un espace de rencontre, il fixe la durée de la mesure et détermine la périodicité et la durée des rencontres ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. Z... et de Mme Y... , fixé la résidence des trois enfants mineurs au domicile de leur mère, avec un droit de visite dans un espace de rencontre au profit du père ;
Attendu qu'après avoir fixé la résidence des trois enfants chez leur mère, l'arrêt retient que M. Z... bénéficiera d'un droit de visite deux fois par mois au sein ou à l'extérieur de la structure Le Cerf-volant à Lorient, pendant une durée de six mois renouvelable à l'initiative de la structure d'accueil ;
Qu'en statuant ainsi, sans préciser la durée des rencontres ni celle de la mesure dès lors que la structure d'accueil peut prendre l'initiative d'un renouvellement, la cour d'appel, qui a délégué ses pouvoirs, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. Z... exercera un droit de visite deux fois par mois au sein ou à l'extérieur de la structure Le Cerf-Volant, durant six mois, éventuellement renouvelable à l'initiative de celle-ci, l'arrêt rendu le 5 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. Z...
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR fixé la résidence des enfants chez la mère, dit que M. Z... exercera un droit de visite deux fois par mois au sein ou à l'extérieur de la structure Le Cerf-Volant, [...] , durant six mois, éventuellement renouvelables à l'initiative de celle-ci, dit que la mère devra amener les enfants à la structure et les ramener à l'issue du droit de visite, dit que le père devra prendre contact avec la structure afin de voir désigner un référent, dit qu'après deux visites non honorées, consécutives ou non, par le père, sans motif légitime, les visites seront suspendues jusqu'à la mise en place d'un nouveau calendrier, dit que le droit de visite sera exercé conformément au règlement intérieur de la structure, notamment en ce que les éventuelles sorties auront lieu à l'initiative et sous le contrôle de celle-ci et rappelé que les parents devront formaliser, par l'intermédiaire de la structure, les accords modifiant les modalités de visite, et y ajoutant, dit qu'il appartiendra à M. Z... , chaque fin de trimestre, de justifier de sa situation professionnelle et de l'avoir débouté de ses demandes ;
| décision 17-15.831 du 15/05/2018, partie 1 |
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AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur le droit de visite et d'hébergement du père : selon l'article 373-2-6 du code civil, le juge doit régler les questions qui lui sont soumises en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts de l'enfant mineur ; c'est sous cette condition générale que le juge fixe en particulier la résidence de l'enfant, soit en alternance au domicile de chacun des parents, soit au domicile de l'un d'eux, auquel cas il statue sur le droit de visite et d'hébergement de l'autre parent ainsi que le prévoit 373-2-9 du Code civil ; le premier juge a substitué au droit de visite et d'hébergement classique accordé à Monsieur Z... par l'ordonnance de non-conciliation un droit de visite en lieu neutre en relevant que les enfants supportaient mal les modalités initiales du droit d'accueil à raison des propos dénigrants de ce dernier à l'égard de Madame Y... et du comportement anormalement intrusif de la compagne de ce dernier ; au soutien de sa demande de réformation de ce chef du jugement entrepris, Monsieur Z... fait valoir que ces allégations n'étaient pas justifiées par les pièces produites et que ses filles, qu'il voit régulièrement au Cerf-Volant, seraient demanderesses de le voir hors de ce cadre qu'elles ne comprennent pas ;cependant, contrairement à ce qu'il soutient, les affirmations de Madame Y... sont corroborées par une pièce parfaitement objective, à savoir un courriel d'une professeur de Clara du 16 avril 2015, qui indique que celle-ci ‘
était blanche en rentrant en classe et est parti vomir', et que l'enfant, interrogée par elle sur la cause de ses troubles, lui a répondu ‘
qu'elle n'était pas bien parce que son papa lui avait dit des choses méchantes sur sa maman, alors que ce n'était pas vrai' ; il est ainsi clairement établi que Monsieur Z... a tenu, devant l'un des enfants au moins, des propos dénigrants à l'égard de leur mère suffisamment graves pour occasionner chez Clara des troubles psychosomatiques caractérisés et dûment constatés par un tiers neutre ;par ailleurs, le fait, affirmé par Monsieur Z... , que ses filles seraient en demande de voir leur père hors d'un cadre médiatisé, n'est aucunement justifié par lui, alors que, d'une part, il lui appartenait, si tel était le cas, de solliciter l'audition à tout le moins des deux aînées, ce qu'il n'a pas cru devoir faire, et que d'autre part, Madame Y... fait état de propos inadaptés du père lors des droits de visite médiatisés ; au vu de ces éléments, il n'apparaît pas, en l'état, de l'intérêt des enfants de modifier les dispositions du jugement entrepris concernant le droit d'accueil de leur père ; il y a donc lieu de débouter Monsieur Z... de sa demande formée de ce chef, le jugement étant confirmé à cet égard » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « sur les conséquences du divorce pour les enfants ; qu'il y a lieu d'homologuer l'accord des parties sur la fixation de la résidence habituelle des enfants chez leur mère, conforme à l'intérêt de celles-ci et aux droits et obligations des parents ; s'agissant du droit d'accueil paternel, Mme Y... fait état, sans être d'aucune façon contredite, de ce que les enfants supportent mal les modalités usuelles en cours, leur père la dénigrant dans des termes inadmissibles, et la compagne de celui-ci étant anormalement intrusive ; la requérante versant en outre, au soutien de ses dires, une attestation du professeur de l'enfant Clara selon laquelle cette enfant lui a rapporté des propos dénigrants de son père, il sera donc fait droit à la demande de droit d'accueil en lieu neutre » ;
1°) ALORS, D'UNE PART, QUE le juge qui décide que le droit de visite d'un parent s'exercera dans un espace de rencontre neutre doit fixer la durée de cette mesure et déterminer la périodicité et la durée des rencontres ; qu'en jugeant que M. Z... exercera un droit de visite deux fois par mois au sein ou à l'extérieur de la structure Le Cerf-Volant, [...] , durant six mois éventuellement renouvelables à l'initiative de celle-ci, sans préciser la durée exacte de ces rencontres, la cour d'appel a violé les articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-9 du Code civil ainsi que l'article 1180-5 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS, D'AUTRE PART, QU'il appartient au juge aux affaires familiales, et à lui seul, de fixer les modalités d'exercice de l'autorité parentale et du droit de visite d'un parent à l'égard de son enfant, de même qu'il lui revient de prendre les mesures permettant de garantir la continuité et l'effectivité du maintien des liens de l'enfant avec chacun de ses parents ; qu'en jugeant que le droit de visite de M. Z... , exercé au sein de la structure Le Cerf-Volant deux fois par mois pendant six mois, pourrait éventuellement être renouvelé à l'initiative de ladite structure et que les parents devront formaliser, par l'intermédiaire de la structure, les accords modifiant les modalités de visite, la cour d'appel a commis un excès de pouvoirs négatif et a en conséquence violé les articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-9 du Code civil ainsi que l'article 1180-5 du Code de procédure civile ;
| décision 17-15.831 du 15/05/2018, partie 2 |
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3°) ALORS, A TOUT LE MOINS ET A TITRE SUBSIDIAIRE, QUE les juges du fond, lorsqu'ils fixent les modalités d'exercice de l'autorité parentale et du droit de visite d'un parent à l'égard de son enfant, ne peuvent déléguer les pouvoirs que la loi leur confère ; qu'en jugeant que le droit de visite de M. Z... , exercé au sein de la structure Le Cerf-Volant deux fois par mois pendant six mois, pourrait éventuellement être renouvelé à l'initiative de ladite structure et que les parents devront formaliser, par l'intermédiaire de la structure, les accords modifiant les modalités de visite, quand, ni la structure d'accueil, ni les parents ne peuvent en aucun cas se substituer au juge en la matière, la cour d'appel a derechef violé les articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-9 du Code civil ainsi que l'article 1180-5 du Code de procédure civile. | décision 17-15.831 du 15/05/2018, partie 3 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Christine Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 18 novembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige l'opposant à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France, société coopérative à capital variable, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 mars 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z..., conseiller rapporteur, Mme Vallansan, conseiller, Mme A..., avocat général référendaire, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme Y..., de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France ;
Sur le rapport de M. Z..., conseiller, l'avis de Mme A..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les dispositions visées par l'article L. 533-11 du code monétaire et financier relatives à l'obligation pour les prestataires de service d'investissement d'agir de manière honnête, loyale et professionnelle, servant au mieux les intérêts des clients ; que par ailleurs les dispositions de l'article L. 533-13-I du même code, selon lesquelles : «en vue de fournir le service de conseil en investissement ou celui de gestion de portefeuille pour le compte de tiers, les prestataires de services d'investissements s'enquièrent auprès de leurs clients, notamment leurs clients potentiels, de leurs connaissances et de leur expérience en matière d'investissement, ainsi que de leur situation financière et de leurs objectifs d'investissement, de manière à pouvoir leur recommander les instruments financiers adaptés ou gérer leur portefeuille de manière adaptée à leur situation ; que lorsque les clients, notamment les clients potentiels, ne communiquent pas les informations requises, les prestataires s'abstiennent de leur recommander des instruments financiers ou de leur fournir le service de gestion de portefeuille pour compte de tiers » ; que l'ensemble de ces dispositions crées par l'ordonnance n° 2007-544 du 12 avril 2007 - art. 4 JORF 13 avril 2007 en vigueur le 1er novembre 2007 ne sont applicables qu'aux prestations délivrées postérieurement au 1er novembre 2007 et ne peuvent donc être valablement invoquées par Mme Y... pour la souscription des contrats d'assurance vie signés le 2 mai 2002 ; que c'est par conséquent à l'aune des dispositions de l'article 1147 du code civil, dans sa version en vigueur antérieurement au 1er octobre 2016, que doit être appréciée l'obligation d'information et de conseil à la charge à la charge du Crédit agricole intervenant en qualité de courtier pour la souscription des contrats d'assurance vie et de prestataire de services d'investissement pour la souscription des titres de créances Euro Medium Term Notes dits EMTN ; que par ailleurs c'est par référence aux dispositions de l'article 1984 du code civil que doit être apprécié, en l'absence d'un mandat formel de conseil en gestion patrimoniale, s'il peut se déduire de la relation entre le client et le prestataire d'un service d'investissement ou de courtage l'existence d'un mandat tacite ; que le devoir de loyauté impose à la banque d'alerter son client quant aux conséquences financières prévisibles des options prises par lui en matière de rachats, de vente et de crédit ; que le mandat tacite impose de rechercher s'il résulte des faits que le prestataire a été informé des attentes et des besoins du client et s'il est personnellement intervenu au lieu et place de son client dans le choix des placements proposés par ses soins ; | décision 17-10.961 du 09/05/2018, partie 1 |
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que la qualité d'opérateur averti s'évince de l'expérience dont dispose l'opérateur pour comprendre l'information reçue compte tenu du risque présenté par l'opération demandée ou certaines de ses conditions ; sur les assurances vie : qu'il est établi par les certificats médicaux du Docteur B..., le 10 février 2014, et du Dr C..., le 9 juin 2015, que Mme Y... présente depuis 1990 un syndrome dépressif chronique sous traitement et une addiction à l'alcool non sevrée qui ont nécessité plusieurs hospitalisations en le mois d'octobre 2009 et le mois d'octobre 2014 ; que le Dr C... précise qu'il lui est apparu « durant ces 5 années qu'elle était en grande difficulté pour suivre les affaires en lien avec son héritage familial déléguant selon ses dires à son conseiller bancaire » ; que M. F... atteste, dans le cadre de la sommation interpellative qui lui a été délivrée le 6 juillet 2016, « avoir été désigné par le frère de Mme Y..., Philippe Y..., pour assister celle-ci dans les opérations de restructuration du groupe GHM et assurer au mieux la protection de ses intérêts » ; que M. D... conseiller fiscal de Mme Y... atteste : « avoir toujours établi les déclarations fiscales de celle-ci en lien avec les informations données par M. E... du Crédit agricole et que Mme Y... ne disposait pas des compétences requises et avait besoin d'être épaulée dans la gestion de son patrimoine » ; qu'en l'espèce le Crédit agricole via la Banque de Gestion Privée Indosuez qui est l'une de ses filiales, a proposé à Mme Y... au terme de trois études patrimoniales respectivement datées du 8 avril 2002, du 10 avril 2002 et du 5 juillet 2004 une stratégie de gestion patrimoniale préconisant la souscription de deux contrats d'assurance vie ; que ces trois études ont identifié les besoins de trésorerie de Mme Y..., son objectif de transmission de son patrimoine à son fils et ont anticipé le paiement de l'impôt sur la plus-value en chiffrant et préconisant son provisionnement ; que la qualité d'opérateur averti de Mme Y..., nonobstant le fait qu'elle ait pu siéger par le passé au sein du conseil d'administration du groupe, n'est donc pas établie et ne saurait s'évincer de l'expérience acquise par ses proches ou ses conseillers sauf à démontrer que ceux-ci sont directement intervenus à sa place dans les choix litigieux ; que s'agissant néanmoins des choix de souscription des contrats d'assurance vie et des différentes avances qui ont été consenties à Mme Y... par l'assureur Generali sur ces contrats, il ne résulte ni des échanges de courriels entre les différents interlocuteurs de Mme Y... ni des pièces contractuelles versées aux débats que le Crédit agricole ou l'un des conseillers de Mme Y... se soit substitué à elle tant pour la signature des contrats que pour les opérations de rachat ; qu'il apparaît bien au contraire que Mme Y... a personnellement signé les contrats ainsi que les différentes demandes de rachats qui se sont étalées de 2002 à 2012 et qu'elle a directement sollicité ces avances auprès de l'assureur Generali qui n'est pas à la cause et qui seul peut être attrait sur le fondement de l'article L. 132-27-1 du code des assurances créé par l'ordonnance n° 2009-106 du 30 janvier 2009 - art. 3, pour les opérations postérieures à l'entrée en vigueur de l'ordonnance, le Crédit agricole étant intervenu en qualité de courtier pour la proposition des contrats d'assurance vie ; qu'il n'est pas non plus établi que la banque soit d'une quelconque manière intervenue ou ait incité Mme Y... à obtenir les avances litigieuses ; qu'ainsi le dépassement de son mandat de courtier par le Crédit agricole n'est nullement établi ; que le devoir de mise en garde de la banque ne vaut que pour les opérations boursières présentant un risque et que ce risque n'est pas caractérisé en l'espèce s'agissant des titres EMTN émis par le Crédit Agricole le 23 avril 2010 dans un horizon de 5 années, le capital de ces titres étant selon l'information communiquée préalablement à Mme Y... « intégralement garanti dans le cas où l'indice Euro Stoxx 50 réaliserait une performance négative entre le 23 avril 2010 et le 16 avril 2015 » ; qu'ainsi le choix effectué par Mme Y... de solliciter le rachat en plusieurs étapes des contrats d'assurance vie et de liquider les titres EMTN avant leur échéance, sauf à démontrer que ce rachat et cette liquidation sont la conséquence d'un manquement du Crédit agricole à son devoir de conseil, preuve que Mme Y... échoue à rapporter, sont étrangers au devoir de mise en garde de la banque dès lors que Mme Y... a choisi de liquider ces titres avant leur échéance contractuelle ; qu'il y a donc lieu de constater qu'aucun manquement ne peut être imputé à la banque concernant la souscription des contrats d'assurance vie ; que s'agissant des avances sur contrat il appartient à Mme Y... de rapporter la preuve que celles-ci sont directement causées par un déficit de trésorerie imputable à une mauvaise stratégie patrimoniale ; | décision 17-10.961 du 09/05/2018, partie 2 |
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que toutefois il résulte des propres déclarations de Mme Y... (page 37 de ses conclusions) qu'ayant hérité de 101 millions d'euros et placé 84 millions au mois de juillet 2004 sur les deux contrats d'assurance vie, elle disposait d'un reliquat de 17 millions d'euros, dont, de son propre aveu, 6 millions sur son compte courant ; qu'elle ne démontre nullement l'insuffisance de cette somme pour faire face au paiement de l'impôt recouvré au titre de l'année 2003 et ce, alors même qu'elle reconnaît avoir acquis au cours de cette même année 2003 une villa à Cassis au prix de 2,3 millions d'euros dont elle indique, sans en donner le montant, que les travaux de rénovation « ont considérablement dépassé le budget de 731.000 euros prévu initialement » (27 millions d'euros selon la banque) ; qu'il s'ensuit que Mme Y... échoue à rapporter la preuve que ces avances sont la conséquence d'un défaut d'anticipation et de provision des charges fiscales inhérentes à la succession ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Mme Y... prétend qu'elle est un emprunteur profane, que la banque était tenue de l'éclairer sur les avantages et inconvénients des placements opérés, que les conseils prodigués se sont révélés néfastes pour son patrimoine puisqu'ils ont conduit à des pertes de 9,8 millions d'euros ; que dans ses dernières écritures, elle fait peser sur la banque un défaut de mise en garde en raison de son état de faiblesse ; que la banque fait valoir que Mme Y... n'est pas profane au regard de son milieu familial, de son patrimoine colossal, de ses prises de décision et de ses arbitrages ; qu'il est de règle que le banquier dispensateur de crédit est tenu d'un devoir d'information ; qu'il peut être tenu d'une obligation de mise en garde ; qu'il n'est pas, en raison du devoir de non-immixtion, tenu d'un devoir de conseil, sauf s'il a contracté une obligation spécifique à cet égard ; que la banque qui consent un prêt à un emprunteur non averti est tenue, lors de la conclusion du contrat, d'un devoir de mise en garde en considération de ses capacités financières et des risques d'endettement excessif nés de l'octroi du prêt ; que le banquier, auquel il appartient de démontrer qu'il a rempli son obligation de mise en garde, est dispensé de cette obligation s'il établit que son client a la qualité d'emprunteur averti ; qu'en l'espèce, Mme Y..., qui a perçu une somme de 101 millions dans le cadre de la cession d'un groupe de sociétés d'origine familiale entre 2002 et 2004, a choisi de faire gérer son patrimoine au sein d'une agence du Crédit agricole ; que Mme Y... souhaitait une gestion prudente de son patrimoine ; qu'il est acquis que Mme Y... a bénéficié d'une information en matière patrimoniale et a reçu des propositions d'investissement en avril 2002 et en juillet 2004 ; que les premières opérations qui portent sur des placements en assurance vie, sont sans risque ; que d'autre part, contrairement à ce qui est allégué, les études patrimoniales démontrent que la banque avait anticipé l'impôt sur le revenu et autres taxes ; que le montage prévoyait en particulier le provisionnement de la taxation sur les contrats d'assurance-vie ; qu'à la suite de ces informations, Mme Y... a investi une partie de ce capital en assurance vie Aster Selection et Aster Selection Capitalisation auprès de la compagnie Generali dont le Crédit agricole assurait le courtage ; que ces placements étaient conformes aux objectifs de prudence ; puis, qu'elle a investi en 2007 dans un produit EMTN Perspective 5 ans ; qu'il ressort des courriers échangés que cette souscription d'un emprunt obligataire risqué lui a été conseillé par son frère et a été visé par son conseil fiscal, Me D... ; que selon la banque, Mme Y... est une personne avertie, dès lors qu'elle a siégé en qualité de membre du conseil de surveillance du groupe Y... de 1996 à 2010 et qu'elle a toujours bénéficié de la présence de conseillers juridiques, patrimoniaux et fiscaux ; que le fait que Mme Y... ait été entourée de personnes compétentes ne suffit pas à la définir comme étant un emprunteur averti ; que l'allégation de faiblesse est étayée par une attestation rédigée par le médecin traitant de Mme Y..., en date de 2014, qui fait état d'une addiction à l'alcool non sevrée et d'un syndrome dépressif de longue durée ; que l'attestation de Philippe Y..., frère de la requérante, rédigée à la même date, relate les problèmes de santé de sa soeur, témoigne de son incapacité à gérer ; qu'il précise qu'elle n'a pas suivi ses conseils de confier sa fortune à un cabinet expert, qu'elle a choisi de confier son patrimoine à M. E..., préposé au sein du Crédit agricole, avec lequel elle entretenait des relations de confiance ; que les attestations produites sont intervenues postérieurement à l'introduction de l'instance ; qu'il n'est versé aucune autre pièce médicale, relative à une vulnérabilité préoccupante, ni à une démarche de l'entourage de Mme Y..., en vue de la placer sous une mesure de protection financière au cours des dix années litigieuses ; qu'au regard de ces éléments, l'état de faiblesse n'est pas suffisamment caractérisé ; ( | décision 17-10.961 du 09/05/2018, partie 3 |
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) que s'agissant des EMTN (Euro Medium Term Notes) qui sont considérés comme des titres de créance négociables donc des obligations au sens de la classification réglementaire, ils s'appuient sur des combinaisons d'autres instruments financiers, valeurs mobilières (actions, obligations) et produits dérivés (options, SWAP...) ; qu'en l'espèce, le souscripteur bénéficie de la garantie en capital à. échéance du 23 avril 2015 ; que dans ces conditions, ce placement ne relevait pas davantage du placement à caractère spéculatif ; sur le défaut de loyauté : que Mme Y... fait grief à la banque de lui avoir conseillé de se financer au moyen d'avances coûteuses et inadaptées générant des intérêts payés au profit de l'assureur et du banquier ; qu'elle lui reproche des conseils en investissement immobilier désastreux ; que le banquier est tenu d'un devoir de non-immixtion ; qu'il ne doit pas agir, prendre de décisions à la place de son client ; que la première question posée concerne les décisions relatives aux avances et rachats partiels qui ont été opérés dès 2002 ; que Mme Y... reproche à la banque de ne pas l'avoir alertée sur les options prises entre rachats partiels et avances, impliquant dans l'hypothèse de rachat, qu'elle diminuait le montant de ses encours et devait s'acquitter de l'impôt lié au rachat ; que dans l'hypothèse d'un emprunt, elle subissait un coût mais préservait son patrimoine ; que l'assureur des produits d'assurance vie est la compagnie Generali, dès lors le Crédit agricole n'avait pas à intervenir ; qu'il n'est pas démontré l'ingérence de la banque dans les décisions d'opérer des retraits de liquidités, par le moyen de rachats partiels ; que douze rachats ont été effectués par Mme Y..., sur le contrat « Aster Sélection » pour la période 2002 à 2012, pour un montant de 16.098.000 €, et quatre rachats effectués sur le contrat « Aster Sélection Capitalisation » pour la période 2010-2011, pour un montant de 5.854.251,90 €, soit un total de rachats pour un montant total de 21.952.251,90 € ; que s'agissant des emprunts de 13 et de 59 millions, la banque a certes perçu corrélativement une rémunération, mais l'objet de ces prêts était l'obtention de liquidités au profit de Mme Y... ; qu'entre 2002 et 2012, les dépenses opérées par Mme Y... se sont élevées à un montant de 44.430.755 € ; que l'explication des difficultés financières de Mme Y... trouve clairement son origine dans l'ampleur de ses dépenses ; que la vigilance de la banque ne peut se substituer au contrôle de l'opportunité des dépenses de son client ; qu'elle ne peut être tenue responsable de ce fait ; qu'enfin, M. E... a clairement été l'interlocuteur privilégié de Mme Y... mais il n'est pas démontré l'existence d'un mandat de gestion conclu entre Mme Y... et M. E..., directeur d'agence du Crédit agricole ; qu'il ressort des courriers et décisions de rachats sur la période de 2002 à 2012 qu'ils émanent de Mme Y... ; que toutes les opérations ont été signées par Mme Y... (pièces 13, 22 à 33) ; que s'agissant des courriers échangés entre M. E..., Philippe Y... et le cabinet Samare, la décision relative à l'emprunt obligataire souscrit en 2007 par Mme Y..., a été prise sur les conseils du frère de Mme Y... ;
1) ALORS QUE le courtier en assurance est tenu d'un devoir de conseil de l'assuré tant au moment de la souscription du contrat qu'au cours de la vie de celui-ci ; qu'il assume la charge de prouver qu'il a exécuté son devoir de conseil ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a retenu que le Crédit agricole était intervenu comme courtier pour la souscription des contrats d'assurance vie auprès de la société Generali et que Mme Y... n'était pas une cliente avertie ; qu'en ne constatant à aucun moment l'existence et le contenu des conseils que le Crédit agricole aurait délivrés à l'assurée, tant au moment de la souscription des contrats d'assurance vie que durant la vie de ceux-ci, avant de débouter Mme Y... de ses demandes formées sur ce fondement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil, ensemble l'article 1315 ancien du même code ;
2) ALORS, subsidiairement, QUE le courtier en assurance est tenu d'un devoir de conseil quant à l'adéquation du contrat d'assurance souscrit aux besoins du client et aux particularités de sa situation ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a retenu que le Crédit agricole était intervenu comme courtier pour la souscription des contrats d'assurance vie auprès de la société Generali et que Mme Y... n'était pas une cliente avertie ; | décision 17-10.961 du 09/05/2018, partie 4 |
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qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée (conclusions de Mme Y... en date du 29 juillet 2016, p. 7-8, p. 18-22, p. 30-34, p. 37-38), si le Crédit agricole n'avait pas méconnu son devoir de conseil en lui faisant placer la quasi-intégralité de son patrimoine sur des contrats d'assurance vie ne lui laissant pas suffisamment de liquidités disponibles pour régler ses dettes fiscales et procéder par ailleurs à des investissements immobiliers, ce qui l'avait contrainte à solliciter des avances sur lesdits contrats puis à emprunter de l'argent auprès de la banque, soit une solution beaucoup plus onéreuse que celle qui aurait dû être préconisée, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil ;
3) ALORS, subsidiairement, QUE le devoir de conseil du courtier en assurance ne prend pas fin avec la souscription du contrat, mais doit s'exécuter au cours de celui-ci ; qu'au cas d'espèce, en ne s'expliquant pas davantage sur l'accomplissement par le Crédit agricole de son devoir de conseil relativement au choix de l'assurée de demander des avances sur les contrats d'assurance vie, plutôt que de procéder à des rachats moins onéreux, pour dégager des liquidités (conclusions de Mme Y... en date du 29 juillet 2016, p. 9 et p. 37-38), la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil ;
4) ALORS QUE les contrats doivent être exécutés de bonne foi ; que dans ses conclusions, Mme Y... faisait valoir que le Crédit Agricole avait manqué à son devoir de loyauté dans son activité de gestion en lui conseillant de mobiliser sur deux contrats d'assurance-vie la quasi-totalité du gain issu de la vente du groupe familial, la privant ainsi des liquidités dont elle avait besoin, tout en générant d'important frais de gestion et des pertes financières très importantes (concl. p. 41) ; qu'en déboutant Mme Y... de ses demandes sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas systématiquement privilégié ses propres intérêts sur ceux de sa cliente, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 alinéa 3 ancien du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les investissements immobiliers : que le Crédit agricole n'est pas intervenu en qualité de courtier dans les acquisitions réalisées par Mme Y... entre 2005 et 2008 au sein d'Etablissements Hospitaliers pour Personnes Agées Dépendantes ni en qualité de mandataire de sorte que sa responsabilité ne saurait être recherchée, étant précisé que Mme Y... se borne à faire état de désordres affectant la construction de l'un des établissements sans justifier aucunement de la rentabilité locative des deux autres établissements dans lesquels elle a respectivement investi 361.547 euros en 2005 et 619.554 en 2008 ; qu'il n'est pas non plus établi que la signature des deux promesses unilatérales de vente du 14 et du 22 juin 2012 en vue de l'acquisition de deux appartements à Paris ait été conseillée par le Crédit agricole ni a fortiori que la banque se soit substituée à l'appelante pour la signature de ces promesses alors qu'il est avéré que le Crédit agricole a limité son intervention à l'octroi de deux financements auxquels il n'a pas été donné suite par Mme Y... sans qu'aucune raison de part et d'autre ne soit avancée quant à la renonciation aux deux promesses unilatérales de vente ; que la preuve d'un manquement du Crédit agricole à son devoir de conseil, de mise en garde et de loyauté n'est aucunement rapportée ; que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE s'agissant des investissements immobiliers, le mandat confié à la société Clarimm, destiné à la recherche d'investissement dans les maisons de retraite, ne montre pas l'intervention du Crédit agricole dans cette opération (pièce 43) ; que les projets d'investissement immobilier portant sur l'acquisition de deux appartements situés à Paris, n'ont pas abouti, non pas du fait de l'absence de financement par la banque, qui en justifie, mais en raison de la décision de Mme Y..., qui a renoncé à se porter acquéreur des deux biens, moyennant le versement d'indemnités ;
1) ALORS QUE le banquier est tenu de réparer les conséquences dommageables résultant d'un mauvais conseil d'investissement qu'il a délivré à son client ; | décision 17-10.961 du 09/05/2018, partie 5 |
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qu'au cas d'espèce, en repoussant les demandes de Mme Y..., en tant qu'elles étaient fondées sur le mauvais conseil que lui avait donné le Crédit agricole, par la voix de son salarié M. E..., de réaliser des investissements dans des maisons de retraite, via des ventes en l'état futur d'achèvement d'appartements destinés à la location en meublé, motif pris de ce que la banque n'était intervenue ni en qualité de courtier, ni en qualité de mandataire, sans s'expliquer, comme l'y invitait Mme Y... (conclusions du 29 juillet 2016, p. 14-15), d'une part, sur le fait que M. E... avait déclaré devant témoins que c'était lui qui était à l'origine des investissements dans les maisons de retraite, d'autre part, sur le fait que c'était M. E... qui assurait au quotidien la gestion de ces investissements, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil ;
2) ALORS QUE le banquier est tenu de réparer les conséquences dommageables résultant d'un mauvais conseil d'investissement qu'il a délivré à son client ; qu'au cas d'espèce, en énonçant encore, pour repousser les demandes de Mme Y... fondées sur le mauvais conseil que lui avait donné le Crédit agricole, par la voix de son salarié M. E..., de réaliser des investissements dans des maisons de retraite, sur la circonstance que Mme Y... se serait bornée à faire état de désordres affectant la construction de l'un des immeubles et ne justifierait pas de la rentabilité des deux autres établissements, sans s'expliquer sur les revenus détaillés par Mme Y..., pièces à l'appui, s'agissant de la résidence d'Aubagne (perception de 163.637 € en 7 ans) et de la résidence de Bugatel (aucun loyer perçu avant 2011) (conclusions du 29 juillet 2016, p. 15), la cour d'appel a, de ce point de vue encore, privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil ;
3) ALORS QUE le banquier est tenu de réparer les conséquences dommageables résultant d'un mauvais conseil d'investissement qu'il a délivré à son client ; qu'au cas d'espèce, en repoussant les demandes de Mme Y..., en tant qu'elles étaient fondées sur le mauvais conseil que lui avait donné le Crédit agricole, par la voix de son salarié M. E..., de procéder à l'acquisition de deux appartements situés à Paris, que la banque était supposée financer, avant de faire volte-face en raison de l'insuffisance des liquidités de Mme Y..., entraînant pour celle-ci la perte des indemnités d'immobilisation et l'obligation de payer l'agent immobilier en pure perte, motif pris de ce qu'il n'était pas établi que cette acquisition ait été conseillée par la banque et que la raison pour laquelle les deux promesses de vente n'avaient pas été suivies d'effet n'était pas donnée par les parties, sans s'expliquer, comme l'y invitait Mme Y... (conclusions du 29 juillet 2016, p. 13-14), sur le fait que M. E... avait déclaré devant témoins que c'était lui qui avait conseillé à Mme Y... de signer les deux promesses de vente, investissement que la banque avait finalement refusé de financer, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil. | décision 17-10.961 du 09/05/2018, partie 6 |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Eric Y..., domicilié [...] ,
2°/ Mme Françoise Z..., épouse Y...,
3°/ M. Gérard Y...,
tous deux domiciliés [...] , agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de curateurs de M. Eric Y...,
4°/ M. Régis Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 8 mars 2017 par la cour d'appel de Rennes (5e chambre), dans le litige les opposant au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, dont le siège est [...] ,
défendeur à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 21 mars 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme A..., conseiller référendaire rapporteur, M. Besson, conseiller, Mme Parchemal, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller référendaire, les observations de la B... , avocat de M. Eric Y..., de Mme Z..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, de M. Gérard Y..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, et de M. Régis Y..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, l'avis de M. C..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 mars 2017), que M. Eric Y... a été victime d'une tentative de meurtre, dont l'auteur, M. E... , a été condamné par une cour d'assises ; que M. Gérard Y... et Mme Françoise Z..., épouse Y..., parents de la victime, agissant en qualité de co-curateurs de leur fils et en leurs noms personnels, ainsi que M. Régis Y..., frère de la victime ( les consorts Y...), ont saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) d'une demande de réparation de leurs préjudices ;
Attendu que les consorts Y... font grief à l'arrêt de dire que le montant de la réparation du préjudice subi par M. Eric Y... devait être réduit de 70 % et de réduire en conséquence le montant des provisions allouées à ce dernier et à ses parents et frère, alors, selon le moyen :
1°/ que toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes lorsque ces faits soit ont entraîné la mort, soit une incapacité permanente ou totale de travail personnelle égale ou supérieure à un mois ; que ne peut être retenu comme fautif le comportement de la victime d'une infraction qui ne peut être rattaché à des conséquences aussi imprévisibles et dramatiques que celles imputables à l'auteur des faits, à défaut de lien de causalité avec le dommage ; qu'en retenant, pour réduire le droit à réparation de M. Eric Y... de 70 %, qu'en exerçant des violences et en proférant des menaces à l'encontre de Mme D... alors qu'il était alcoolisé, il avait commis une faute en lien direct avec l'infraction dont il avait eu à souffrir, M. E... étant intervenu violemment pour faire cesser ces violences et menaces, en constatant que la faute commise par M. Eric Y... consistait à avoir chassé M. E... de son domicile et avoir ligoté Mme D... en la menaçant de relations sexuelles, et que M. E... était revenu pour lui asséner au moins trois coups de masse sur la tête provoquant de nombreux foyers de contusions hémorragiques temporales, pariéto-occipitales et fronto-basales droits ainsi qu'une hémorragie méningée et un hématome extradural frontal droit ayant entraîné de graves séquelles invalidantes justifiant une curatelle renforcée, ce dont il résultait que le comportement de M. Eric Y... ne pouvait être retenu comme fautif dès lors qu'il ne pouvait être rattaché à des conséquences aussi imprévisibles et dramatiques que celles imputables à l'auteur des faits, à défaut de lien de causalité avec le dommage, la cour d'appel a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
2°/ que toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes lorsque ces faits soit ont entraîné la mort, soit une incapacité permanente ou totale de travail personnelle égale ou supérieure à un mois ; | décision 17-16.771 du 03/05/2018, partie 1 |
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que le caractère disproportionné de la réaction de l'auteur de l'agression aux faits fautifs de la victime ne peut aboutir à supprimer le droit à indemnisation ou, à tout le moins, à le réduire de manière très importante ; qu'au demeurant, en se déterminant de la sorte quand la disproportion entre la prétendue faute de la victime et les dommages qu'elle avait subis ne pouvait en toute hypothèse justifier une réduction de 70 % de son droit à indemnisation, la cour d'appel a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'ayant constaté que c'était en entendant les appels au secours de Mme D..., que M. Eric Y... avait accueillie à son domicile et dont il avait ligoté les pieds, les mains et la taille tout en la menaçant de lui faire subir des relations sexuelles imposées par des tiers, que M. E... avait décidé de pénétrer dans la maison de M. Eric Y... pour la délivrer, et avait asséné à celui-ci plusieurs coups de masse sur la tête, la cour d'appel a pu décider que M. Eric Y... avait, en exerçant des violences et en proférant des menaces à l'encontre de Mme D..., commis une faute en lien direct avec l'infraction dont il a eu à souffrir, et dont elle a souverainement estimé qu'elle limitait le droit à indemnisation dans la proportion qu'elle a déterminée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston,, avocat aux Conseils, pour M. Eric Y..., Mme Z..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, M. Gérard Y..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, et M. Régis Y....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le montant de la réparation du préjudice subi par M. Eric Y... devait être réduit de 70 % et d'AVOIR réduit en conséquence le montant des provisions allouées à ce dernier et à ses parents et frère ;
AUX MOTIFS QUE dans la nuit du 8 au 9 mars 2013, M. Eric Y..., né le [...] , a été victime de violences commises par M. Mickaël E... ; que ce dernier a été condamné par la cour d'assises du Finistère le 21 mai 2015 à une peine de 12 ans de réclusion criminelle pour tentative de meurtre ; que par un jugement en date du 9 juillet 2013, le juge des tutelles du tribunal d'instance de Quimper a désigné M. Gérard Y... et Mme Françoise Z..., épouse Y..., parents de la victime, en qualité de co-curateurs dans le cadre d'une curatelle renforcée ; que par une requête déposée le 15 janvier 2014, M. Gérard Y... et Mme Françoise Z..., épouse Y..., en leurs noms et en qualité de co-curateurs de leur fils, ainsi que M. Régis Y..., frère de ce dernier, ont saisi la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ; que par la décision déférée, la commission d'indemnisation a réduit le droit à indemnisation des requérants dans la limite de 30 % ; que l'article 706-3 du code de procédure pénale a institué en faveur de victimes d'infraction un mode de réparation autonome répondant à des règles propres ; qu'en conséquence, une commission d'indemnisation n'est pas liée par les décisions de juridictions pénales statuant en matière civile ; qu'en vertu du dernier alinéa de l'article 706-3 du code de procédure pénale, la réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime ; qu'il doit alors être recherché s'il existe un lien de causalité direct entre la faute de la victime et l'atteinte à son intégrité physique ; qu'il ressort des pièces produites que les protagonistes des faits, M. Eric Y..., Mme Estelle D... et M. Mickaël E... , se sont connus lors de cures de désintoxication, toujours en cours pour ces deux derniers ; que par ailleurs, M. Mickaël E... était hébergé par M. Eric Y... et Mme Estelle D... était devenue la petite amie de ce dernier et entretenait des relations sexuelles avec celui-ci ; que le 8 mars 2013, M. Eric Y... et Mme Estelle D... se sont alcoolisés au domicile du premier après avoir acheté deux bouteilles de vodka ; que M. Mickaël E... les a rejoints et s'est alcoolisé lui-même ; qu'au cours de la nuit, M. Eric Y... est monté dormir à l'étage, laissant les deux autres dans le salon ; que vers h 30 le 9 mars, M. Eric Y... est redescendu et a surpris les deux autres en train de s'embrasser ; que M. Eric Y... est entré dans une violente colère, a chassé de son domicile M. | décision 17-16.771 du 03/05/2018, partie 2 |
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Mickaël E... en le faisant sortir par la fenêtre puis s'en est pris à Mme Estelle D... en la ligotant autour des pieds, des mains et de la taille avec du chatterton tout en la menaçant de faire venir des copains pour lui imposer des relations sexuelles ; qu'entendant les appels au secours de Mme Estelle D..., M. Mickaël E... a décidé de pénétrer à nouveau dans la maison pour la délivrer ; que M. Mickaël E... a alors asséné au moins trois coups de masse sur la tête de M. Eric Y... ; que ce dernier présentera de nombreux foyers de contusions hémorragiques temporales, pariéto-occipitales et fronto-basales droits ainsi qu'une hémorragie méningée et un hématome extradural frontal droit ; que l'enquête a démontré que M. Eric Y... était violent lorsqu'il était alcoolisé ; qu'au moment de l'intervention des forces de l'ordre ou des services médicaux, M. Mickaël E... présentait une alcoolémie de 0,89 mg/l d'air expiré, Mme Estelle D... une alcoolémie de 0,49 mg/l d'air expiré et M. Eric Y... de 2,22 mg/l de sang ; qu'il s'en déduit qu'en exerçant des violences et en proférant des menaces à l'encontre de Mme Estelle D..., M. Eric Y... a commis une faute en lien direct avec l'infraction dont il a eu à souffrir, M. Mickaël E... étant intervenu violemment pour faire cesser ces violences et menaces ; que dans ce contexte, il y a lieu de réduire le droit à indemnisation de M. Eric Y... de 70 % ; que la décision déférée sera infirmée en ce sens ; que le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions ne conteste pas le principe des provisions mais sollicite la réduction de leurs montants ; que compte-tenu de la réduction du droit à indemnisation de la victime, il sera alloué à titre de provision une somme de 30.000 € à M. Eric Y..., une somme de 1.100 € à M. Gérard Y..., une somme de 1.100 € à Mme Françoise Z... Y... et une somme de 550 € à M. Régis Y... ; que la décision déférée sera infirmée en ce sens (v. arrêt, p. 4 à 6) ;
1°) ALORS QUE toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes lorsque ces faits soit ont entraîné la mort, soit une incapacité permanente ou totale de travail personnelle égale ou supérieure à un mois ; que ne peut être retenu comme fautif le comportement de la victime d'une infraction qui ne peut être rattaché à des conséquences aussi imprévisibles et dramatiques que celles imputables à l'auteur des faits, à défaut de lien de causalité avec le dommage ; qu'en retenant, pour réduire le droit à réparation de M. Eric Y... de 70 %, qu'en exerçant des violences et en proférant des menaces à l'encontre de Mme D... alors qu'il était alcoolisé, il avait commis une faute en lien direct avec l'infraction dont il avait eu à souffrir, M. E... étant intervenu violemment pour faire cesser ces violences et menaces, en constatant que la faute commise par M. Eric Y... consistait à avoir chassé M. E... de son domicile et avoir ligoté Mme D... en la menaçant de relations sexuelles, et que M. E... était revenu pour lui asséner au moins trois coups de masse sur la tête provoquant de nombreux foyers de contusions hémorragiques temporales, pariéto-occipitales et fronto-basales droits ainsi qu'une hémorragie méningée et un hématome extradural frontal droit ayant entraîné de graves séquelles invalidantes justifiant une curatelle renforcée, ce dont il résultait que le comportement de M. Eric Y... ne pouvait être retenu comme fautif dès lors qu'il ne pouvait être rattaché à des conséquences aussi imprévisibles et dramatiques que celles imputables à l'auteur des faits, à défaut de lien de causalité avec le dommage, la cour d'appel a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
2°) ALORS QUE toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes lorsque ces faits soit ont entraîné la mort, soit une incapacité permanente ou totale de travail personnelle égale ou supérieure à un mois ; que le caractère disproportionné de la réaction de l'auteur de l'agression aux faits fautifs de la victime ne peut aboutir à supprimer le droit à indemnisation ou, à tout le moins, à le réduire de manière très importante ; qu'au demeurant, en se déterminant de la sorte quand la disproportion entre la prétendue faute de la victime et les dommages qu'elle avait subis ne pouvait en toute hypothèse justifier une réduction de 70 % de son droit à indemnisation, la cour d'appel a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale. | décision 17-16.771 du 03/05/2018, partie 3 |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze avril deux mille dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire X... et les conclusions de M. l'avocat général Y... ;
Statuant sur la requête du procureur général près la cour d'appel de NANCY, tendant au renvoi devant une autre juridiction, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de la procédure sur plainte assortie d'une déclaration de constitution de partie civile déposée par M. Stéphane Z... entre les mains du doyen des juges d'instruction au tribunal de grande instance d'Epinal suivie devant ledit juge d'instruction contre personne non dénommée du chef, notamment, de discrimination ;
Vu ladite requête, dont elle adopte les motifs ;
Vu les dispositions de l'article 665, alinéa 2, du code de procédure pénale ;
DESSAISIT le juge d'instruction au tribunal de grande instance d'Epinal de la procédure dont il est saisie contre personne non dénommée du chef sus-énoncé ;
RENVOIE, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, la connaissance de l'affaire au juge d'instruction au tribunal de grande instance de Metz ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Soulard, président, M. X..., conseiller rapporteur, M. Moreau, Mme Drai, MM. Stephan, Guéry, de Larosière de Champfeu, conseillers de la chambre, Mme Carbonaro, M. Beghin, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Y... ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ; | décision 18-82.160 du 11/04/2018, partie 1 |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. Christian X...,
2°/ Mme Arlette Y..., épouse X...,
3°/ Mme Maryline X...,
tous trois domiciliés [...] ,
contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 9), dans le litige les opposant :
1°/ à M. Alain Z..., domicilié [...] ,
2°/ à Mme Yolande A..., épouse B..., domiciliée [...] ,
3°/ à M. Michel B..., domicilié [...] ,
4°/ à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) de l'Ile-de-France, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 mars 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme C..., conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat des consorts X..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. Z..., de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) de l'Ile-de-France ;
Sur le rapport de Mme C..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... ; les condamne in solidum à payer à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural de l'Ile-de-France la somme de 3 000 euros et à M. Z... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. Christian X..., Mme Arlette Y..., épouse X..., et Mme Maryline X... de l'intégralité de leurs demandes ;
AUX MOTIFS QUE « Le fond
L'article L. 412-1 du code rural ouvre aux locataires de biens ruraux, en cas d'aliénation à titre onéreux de ce bien par son propriétaire, un droit de préemption.
L'article L. 412-5 du code rural prévoit que : "Bénéficie du droit de préemption le preneur ayant exercé, au moins pendant trois ans, la profession agricole et exploitant par lui-même ou par sa famille le fonds mis en vente.
Il peut exercer personnellement ce droit, soit pour exploiter lui-même, soit pour faire assurer l'exploitation du fonds par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité participant à l'exploitation ou par un descendant si ce conjoint, partenaire ou descendant a exercé la profession agricole pendant trois ans au moins ou est titulaire d'un diplôme d'enseignement agricole.
II peut aussi subroger dans l'exercice de ce droit son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité participant à l'exploitation ou un descendant majeur ou mineur émancipé qui remplissent les conditions prévues à l'alinéa précédent.
Le droit de préemption ne peut être exercé si, au jour où il fait connaître sa décision d'exercer ce droit, le bénéficiaire ou, dans le cas prévu au troisième alinéa ci-dessus, le conjoint, le partenaire d'un pacte civil de solidarité ou le descendant subrogé est déjà propriétaire de parcelles représentant une superficie supérieure à trois fois la surface minimum d'installation prévue à l'article L 312-6 du code rural et de la pêche maritime"
Il en résulte donc le preneur en place peut:
-soit exercer personnellement le droit de préemption et en conséquence acquérir lui-même les biens mis en vente à la condition qu'il ne soit pas déjà propriétaire (article L. 415-5 al 6) d'une superficie supérieure à 3 fois la surface minimum d'installation prévue à l'article L. 312-6 du code rural.
| cour d'appel de Paris
Pôle 4 - Chambre 9, décision 17-20.057 du 12/04/2018, partie 1 |
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-soit exercer personnellement ce droit de préemption mais pour faire assurer l'exploitation du fonds par son conjoint, son partenaire passé ou l'un de ses descendants à la condition que ces derniers aient exercé la profession agricole pendant 3 ans au moins ou soient titulaires d'un diplôme d'enseignement agricole.
-soit subroger dans l'exercice de son droit de préemption son conjoint, son partenaire pacsé ou l'un de ses descendants majeur ou mineur émancipé à la condition qu'il remplisse les mêmes conditions que ci-dessus, c'est à dire justifie avoir exercé la profession agricole pendant 3 ans au moins ou être titulaire d'un diplôme d'enseignement agricole.
II n'est pas contesté qu'en l'espèce, les consorts B... ont régulièrement notifié au preneur leur intention de vendre le fonds par un courrier portant exercice de leur droit de préemption, ni que les époux X... ont fait connaître leur intention d'exercer ce droit dans le délai de deux mois.
Toutefois, le preneur qui ne rapporte pas la preuve qu'il exploite le fonds loué à la date de la vente ne peut bénéficier du droit de préemption et, de même, dans le cas d'une subrogation, il appartient au preneur de prouver que son subrogé remplit les conditions d'ordre public pour ce faire.
En l'occurrence, Monsieur et Madame X... n'ont pas préempté pour eux-mêmes mais ont substitué dans leurs droits leur fille Maryline et cette substitution n'était possible que dans la mesure où la personne "substituée" démontrait, au regard des dispositions de l'article L 412-5 du code rural, avoir exercé la profession agricole pendant trois ans au moins ou être titulaire d'un diplôme d'enseignement agricole.
Or les consorts X... n'ont justifié de rien mais, au contraire, dans la lettre qu'ils ont adressée au propriétaire pour faire valoir l'exercice de leur droit de préemption, les époux X... ont écrit que leur fille « est en voie d'obtention des diplômes agricoles requis pour satisfaire aux conditions de capacité agricole et d'installation » ce qui démontre qu'elle ne détenait pas à la date de la préemption le diplôme nécessaire.
Une déclaration de préemption faite par un preneur à son profit ou, par subrogation, au profit d'un descendant alors que les conditions légales d'exercice du droit de préemption ne sont pas remplies doit être déclarée nulle et de nul effet et en aucun cas ne peut entraîner vente parfaite par rencontre des consentements comme le soutiennent les consorts X....
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions. » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
« Sur le fond
Sur la demande en nullité de la vente
Attendu que sur le fondement de l'article 412-l du code rural et de la pêche maritime, le propriétaire bailleur d'un fonds de terre ou d'un bien rural qui décide ou est contraint de l'aliéner à titre onéreux, sauf le cas d'expropriation pour cause d'utilité publique, ne peut procéder à cette aliénation qu'en tenant compte du droit de préemption au bénéfice de l'exploitant preneur en place;
Attendu que l'article 412-5 du même code dispose que bénéficie du droit de préemption le preneur ayant exercé, au moins pendant trois ans, la profession agricole et exploitant par lui-même ou par sa famille le fonds mis en vente; qu'il peut exercer personnellement ce droit, soit pour exploiter lui-même, soit pour faire assurer l'exploitation du fonds par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité participant à l'exploitation ou par un descendant si ce conjoint, partenaire ou descendant a exercé la profession agricole pendant trois ans au moins ou est titulaire d'un diplôme d'enseignement agricole;
Attendu enfin que l'article 412-8 du même code prévoit que le notaire chargé de la vente doit faire connaître au preneur bénéficiaire du droit de préemption, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par acte d'huissier de justice le prix les charges les conditions et les modalités de la vente projetée, ainsi que, le cas échéant, les nom et domicile de la personne qui se propose d'acquérir; que cette communication vaut offre de vente aux prix et conditions qui y sont contenus;
Que ce même article dispose encore que le preneur dispose d'un délai de deux mois à compter de la réception de la lettre recommandée ou de l'acte d'huissier pour faire connaître, dans les mêmes formes, au propriétaire vendeur, son refus ou son acceptation de l'offre aux prix, charges et conditions communiqués avec indication des nom et domicile de la personne qui exerce le droit de préemption; qu'en cas de préemption, celui qui l'exerce bénéficie alors d'un délai de deux mois à compter de la date d'envoi de sa réponse au propriétaire vendeur pour réaliser l'acte de vente authentique ; que passé ce délai, sa déclaration de préemption sera nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure à lui faite par acte d'huissier de justice et restée sans effet;
| cour d'appel de Paris
Pôle 4 - Chambre 9, décision 17-20.057 du 12/04/2018, partie 2 |
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Qu'en l'espèce, il est constant que les consorts B..., bailleurs, ont régulièrement notifié leur intention de céder le fonds donné à bail aux époux X..., par un courrier portant offre d'exercice de leur droit de préemption en date du 26/10/2012;
Qu'il est également constant que les époux X... ont fait connaître leur intention d'exercer ce droit de préemption, entendant subroger leur fille Maryline X... dans l'exercice de ce droit, dans le délai de deux mois prévu par les textes susvisés;
Qu'à réception de cette missive, la SAFER d'Ile de France, représentant les époux B..., a sommé les preneurs de lui adresser les pièces justifiant de la qualité de leur fille pour prétendre bénéficier de ce droit de préemption;
Qu'il n'est pas démontré que les époux X... ont répondu à cette sollicitation;
Que les demandeurs ne démontrent pas davantage, dans le cadre de cette instance, la qualité de Madame Maryline X... pour bénéficier d'un droit de préemption par substitution à ses parents;
Qu'en effet, Madame Maryline X... n'est pas titulaire d'un diplôme d'enseignement agricole;
Que les pièces versées aux débats, sous la forme d'attestations émanant de proches de Madame Maryline X..., sont insuffisantes à établir son exercice de la profession agricole pendant une durée d'au moins trois ans;
Qu'il s'évince de ces éléments que Madame Maryline X... ne pouvait valablement prétendre à exercer un droit de préemption, de sorte que sa déclaration de préemption doit être regardée comme nulle, n'ayant de surcroît pas été suivie de la réalisation de la vente sollicitée dans le délai de deux mois, acte qui ne pouvait, en tout état de cause, être valablement reçu devant notaire;
Qu'en conséquent, les consorts X... doivent être déboutés de l'intégralité de leurs demandes; » ;
1°) ALORS QUE la notification faite par le bailleur ou son mandataire au preneur des prix, charges, conditions et modalités de la vente projetée vaut offre de vente aux conditions qui y sont contenues ; qu'en conséquence, l'acceptation par le preneur de cette offre rend la vente parfaite ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que les époux X..., preneurs à bail de la parcelle mise en vente avaient, dans le délai de deux mois, régulièrement accepté l'offre de vente qui leur avait été notifiée par la Safer, mandataire des consorts B..., de sorte que la vente était parfaite entre les parties, la cour d'appel a violé les articles L. 412-8 du code rural et de la pêche maritime, 1583 et 1589, alinéa 1er, du Code civil ;
2°) ALORS QU'est valable l'acceptation du preneur qui a exercé un droit de préemption dont il n'était pas titulaire dès lors que le bailleur, en lui notifiant l'offre de vente en connaissance de cause, a renoncé à se prévaloir de l'absence de droit de préemption ; qu'en retenant, pour juger nulle et de nul effet la déclaration de préemption des époux X..., que les conditions légales d'exercice du droit de préemption n'étaient pas remplies sans rechercher, comme elle y était invitée, si les bailleurs, qui avaient connaissance de l'absence de droit de préempter des preneurs, n'avaient pas renoncé à s'en prévaloir en leur notifiant la vente, de sorte que la validité de la vente, parfaite par l'acceptation des preneurs, ne pouvait être contestée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 412-5 du code rural et de la pêche maritime ;
3°) ALORS QU'en cas de préemption, celui qui l'exerce bénéficie alors d'un délai de deux mois à compter de la date d'envoi de sa réponse au propriétaire vendeur pour réaliser l'acte de vente authentique ; que passé ce délai, sa déclaration de préemption sera nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure à lui faite par acte d'huissier de justice et restée sans effet ; que l'action en nullité appartient au propriétaire vendeur et à l'acquéreur évincé lors de la préemption ; que dès lors, en jugeant que la déclaration de préemption des époux X... était nulle et de nul effet sans constater que ceux-ci avaient été mis en demeure de réaliser l'acte de vente authentique ni rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la non réalisation de l'acte de vente authentique dans le délai de deux mois n'était pas due au refus des bailleurs de régulariser un tel acte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 412-8 du code rural et de la pêche maritime. | cour d'appel de Paris
Pôle 4 - Chambre 9, décision 17-20.057 du 12/04/2018, partie 3 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Alain X..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant à M. Gérard X..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 mars 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Auroy, conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. Alain X..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. Gérard X... ;
Sur le rapport de Mme Auroy, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Alain X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. Gérard X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. Alain X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a refusé d'annuler les avenants d'assurance-vie souscrits par Monsieur Marc X... et modifiant le nom du bénéficiaire ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « il est constant que seize contrats d'assurance-vie ont été souscrits par Marc X... entre le 28 octobre 1986 et le 11 mars 2003 et que quatorze de ces contrats ont fait l'objet d'un avenant modifiant le bénéficiaire et instituant M. Gérard X... comme tel, dix entre le 15 mars 2003 et le 20 mai 2003 et quatre, le 17 juin 2004 ; que M. Alain X... soutient, sur le fondement de l'article 901 du code civil, que son père n'a pu valablement modifier le nom du bénéficiaire des contrats d'assurance-vie litigieux, en raison d'une insanité d'esprit qui a vicié son consentement, alors que M. Gérard X..., en application de l'article 414-2 du code civil, estime que l'action en nullité ne peut aboutir ; que Marc X... a fait l'objet d'une ordonnance d'administration légale sous contrôle judiciaire rendue par le juge des tutelles du tribunal d'instance d'Etampes le 9 mai 2006 et que, si à la date de signature des avenants, il n'était pas encore placé sous sauvegarde de justice, une procédure avait bien été engagée, avant son décès, aux fins d'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle ; que, dans cette hypothèse, s'agissant, non pas d'une libéralité, mais d'une convention signée entre le défunt et la société d'assurance, l'article 414-2 du code civil dont il résulte qu'après sa mort, les actes faits par ce dernier autres que la donation entre vifs et le testament, peuvent être attaqués par ses héritiers pour insanité d'esprit, doit recevoir application ; que M. Alain X... entend démontrer l'existence de troubles mentaux liés à la maladie d'Alzheimer diagnostiquée par les médecins chez son père; qu'il prétend que Marc X... "se trouvait dans un état de totale dépendance et de vulnérabilité bien avant 2005, altérant ses fonctions cérébrales et intellectuelles de manière irréversible" ; que M. Gérard X... soutient que la preuve de la date de l'apparition des troubles n'est pas rapportée, une véritable démence n'étant évoquée par les médecins qu'à compter de décembre 2005 ; que l'insanité d'esprit, comme cause de nullité des actes passés par celui qui en était atteint au moment où il fait ces libéralités, comprend toutes les variétés d'affections mentales par l'effet desquelles l'intelligence du défunt aurait été obnubilée ou sa faculté de discernement déréglée ; que dès lors l'insanité d'esprit doit être appréciée essentiellement au regard des avis médicaux figurant au dossier et qu'il y a lieu d'écarter les témoignages produits qui proviennent de personnes censées être dépourvues de connaissances médicales, notamment en matière de troubles de l'esprit ; qu'il est constant que le 22 novembre 2005, Marc X... a été hospitalisé, d'abord jusqu'au 5 décembre 2005, à la suite d'une chute à son domicile ; que la maladie d'Alzheimer n'est diagnostiquée qu'à cette occasion et des nombreuses hospitalisations qui s'en sont suivies jusqu'au décès ; | cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-19.000 du 11/04/2018, partie 1 |
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que la description de la maladie qui s'est manifestée, notamment, par des pertes de mémoire, des accès de violence et une altération des fonctions cérébrales et intellectuelles, ne témoigne que de son état à l'époque de cette hospitalisation et par la suite, ne laissant pas présumer un manque de lucidité et une insanité d'esprit constitutive d'une altération durable des facultés mentales empêchant toute expression de la volonté avant la fin de l'année 2005 et donc durant la période litigieuse qui se situe entre mars 2003 et juin 2004 ; que la demande d'annulation des avenants formée par l'appelant sera rejetée » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU' « Il est établi, notamment au regard des documents obtenus par l'expert désigné par le juge de la mise en état, que seize contrats d'assurance-vie ont été souscrits par Monsieur Marc X... entre le 28 octobre 1986 et le 11 mars 2003 ; que quatorze de ces contrats ont fait l'objet d'un avenant modifiant le bénéficiaire et instituant Monsieur Gérard X... comme tel, dix entre le 15 mars 2003 et le 20 mai 2003 et quatre, le 17 juin 2004 ; que Monsieur Alain X... soutient que sen père n'a pas pu valablement changer le nom des bénéficiaires aux dates indiquées du fait de sa perte d'autonomie progressive. Il affirme qu'au « cours des années 2003 et 2004, soit moins d'un an avant sa perte totale d'autonomie, Monsieur X... père ne disposait pas de toutes ses capacités mentales et n'a pu valablement donner son consentement au changement de la clause bénéficiaire de pas moins de 14 contrats d'assurance vie auprès de quatre organismes bancaires, dont 10 contrats en 10 jours. » ; qu'il affirme égaiement, mais sans le démontrer, que son père était hébergé chez son frère qui semble s'être chargé de la gestion de son patrimoine bien avant sa désignation en tarit que représentant légal ; que pour démontrer la perte d'autonomie de son père, Monsieur Alain X... s'appuie sur divers certificats médicaux et une attestation d'un voisin et en déduit que son père était atteint de la maladie d'Alzheimer depuis 2001 ; que le certificat médical établi le 5 mars 2007 par le docteur Christine A... est ainsi libellé : « Je soussignée Docteur A... Christine certifie rédiger un certificat médical concernant Mr X... MARC à la demande d'un de ses .fils es lui remettre en main propre pour qu'il puisse l'utiliser comme qui de droit. J'ai suivi le X... Marc à partir du 16/04/02 puis 11 a souvent consulté ma remplaçante le Dr B... les mercredis jusqu'à son départ en 02/05. En 2005, j'ai pu constater que l'autonomie de Mr X... Marc n'était plus la m'elle tant sur le plan physique (déplacement plus lent, accompagné toujours, par son fils qui le conduisait alors qu'il venait seul en voiture auparavant) que psychique (difficulté de compréhension majorée par une forte surdité, obligation de répéter les consignes et les questions, demandant à son fils de bien écouter pour lui retransmettre les informations, signant avec difficulté un chèque). » ; qu'est également versé aux débats un autre document, non daté, signé du même médecin, intitulé dossier médical, qui comprend les éléments suivants : « Les antécédents médicaux du patient sont les suivants : Diabète non insulinodépendant, Arythmie complète par fibrillation auriculaire, Apnée du sommeil appareillée ; Prothèse totale des deux hanches ; Surdité bilatérale appareillée ; Insuffisance veineuse et artérite des membres inférieurs. »
En octobre 2005 se sent nerveux, a peur de tomber chez lui, n'écoute plus les consignes. » ; que ce document retrace ensuite les hospitalisations qui sont intervenues è partir de fin 2005 jusqu'au décès de Monsieur Marc X... ; que le médecin ayant procédé à l'examen de Monsieur Marc X... le 5 décembre 2005 au service des urgences du centre hospitalier d'[...] écrit : « 11DM A la suite d'un court séjour en médecin pour chute à domicile, séjour en maison de convalescence à [...] présente des troubles du comportement avec agressivité importante. D'après son médecin traitant, troubles de l'orientation mineurs observés depuis un an. » ; qu'à la suite de hospitalisation du 5 décembre 2005, le médecin écrit, notamment, au docteur A... : « Le patient a présenté des troubles du comportement avec agressivité importante durant son séjour en maison de convalescence à [...] après un court séjour en médecine pour chute à domicile
Patient très agressif
Examen neurologique : désorientation temporo-spatiale... Évolution dans le service : au plan des troubles du comportement : bonne évolution avec amélioration sous EQUANIL à doses progressivement croissante et arrêt du TIAPRIDAL
Au total : troubles du comportement sur syndrome démentiel chez un patient de 76 ans, contrôlé par EQUANIL. Le patient est transféré ce four vers le moyen séjour pour une réévaluat ion gériatrique et organisation de « ; que contrairement à ce qu'indique Monsieur Gérard X..., il est bien fait mention dans un document médical de la maladie d'Alzheimer mais c'est dans le dossier médical daté du 4 janvier 2007 (pièce Il du demandeur) qui fait état à l'occasion d'une hospitalisation du 6 novembre 2006 d'une « démence sénile de type Alzheimer, » ; | cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-19.000 du 11/04/2018, partie 2 |
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que tous les autres documents médicaux versés aux débats font état de troubles du comportement à caractère agressif mais ils décrivent une situation constatée à partir de l'hospitalisation du 5 décembre 2005 ; qu'aucun d'entre eux ne permet de dater l'apparition des troubles ; que seule la mention reproduite ci-dessus faite par le médecin lors de l'hospitalisation du 5 décembre 2005 et qui rapporte les dires du médecin traitant permet de dire que des troubles mineurs de l'orientation sont apparus en 2004 ; que cette mention est insuffisante pour caractériser un trouble de nature à vicier le consentement de Monsieur Marc X... lors de la signature des avenants a ses contrats d'assurance-vie alors que ceux-ci ont été signes plus de 18 mois avant la constatation réelle des troubles pour dix d'entre eux et plus d'un an pour quatre d'entre eux ; que pour établir la présence de troubles entre 2001 et 2004, Monsieur Alain X... produit une attestation de Monsieur G... D... ainsi libellée: « Je connais Alain X... depuis 11 ans et je suis souvent venu le voir à [...] et je connaissais aussi son fils qui a plusieurs reprises s'est conduit de façons très étrange, comme la fois je l'ai vu insulter ses locataires alors qu'ils étaient tranquillement chez eux et cela a duré une vingtaine de minutes. Cela s'est passé en 2001. Je l'ai vu aussi lancer des insultes envers des enfants de 8 à dix ans et les a poursuivi dans la rue en les menaçant de sa canne en leur disant « je vous tuerai, connasse, voleur ». Un jour nous mangions en terrasse et il est sorti de sa véranda en slip et a urine au milieu du jardin devant tous le monde même devant les enfants et en plus m'a insulté de tous les noms sans motifs apparant. Ce sont des faits qui se sont reproduit à plusieurs reprises durant la période de 2001 à 2004. » ; si, contrairement à ce que demande Monsieur Gérard X..., il n'y a pas lieu d'écarter cette attestation qui n'est pas contredite par le fait que la maison de Monsieur .Alain X... a' était pas encore terminée en 2001 ce qui, selon lui> n'aurait pas permis au témoin du constater ce qu'il rapporte, il n'en demeure pas moins que si elle décrit des faits troublants et semble démontrer une certain agressivité de Monsieur Marc X..., elle ne permet pas d'en déduire que lors de la signature des avenants en 2003 et 2004 la santé mentale de celui-ci ne lui permettait pas d'établir consciemment les avenants litigieux ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de prononcer la nullité de ces avenants. Sur le caractère manifestement exagéré des primes versées L'article L. 132-13 du code des assurances dispose : « Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant ; que ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés. » ; que Monsieur Alain X... reproche à l'expert de ne pas avoir recherché l'étendue du patrimoine de Marc X... et le montant de ses ressources au moment de la souscription des contrats d'assurance-vie et de ne pas avoir interrogé les caisses de retraite ou le service des impôts. Toutefois l'expert a indiqué : « Le patrimoine du décédé était exclusivement constitué d'actifs mobiliers repris sur l'acte de partage établi part Maître C... (pièce 2 H... ). Le patrimoine immobilier avait fait l'objet d'une donation partage avec réserve d'usufruit très antérieure. Existaient par ailleurs des contrats d'assurance vie. Aucune déclaration ISF n'a été remplie. » En réponse à un dire de l'avocat de Monsieur Alain X... lui reprochant de. ne pas avoir rempli totalement sa mission, l'expert répond « qu'il n'appartient pas à l'expert de justice de se substituer à la carence des parties et de mener pour leur compte des investigations de juge d'instruction. Il souligne l'ancienneté des périodes de souscription (près de 30 ans), leur durée dans le temps (une dizaine d'années) et par conséquence l'importance des travaux et des coûts d'une telle démarche si même elle est possible eu égard au fait qu'elle ne peut porter que sur des données fiscalement officielles et dont les archives auraient été conservées » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, s'il incombe aux juges du fond d'apprécier la valeur probante des attestations produites, il leur est interdit, dès lors que le principe de la liberté de la preuve est en cause, d'écarter par principe des attestations s'agissant de l'insanité d'esprit d'un de cujus, au motif qu'elles émanent de personnes dépourvues de connaissances médicales ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé le principe de la liberté de la preuve, ensemble l'article 1341 du code civil (et 1358 nouveau) ;
| cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-19.000 du 11/04/2018, partie 3 |
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ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, si même elles émanaient de personnes non pourvues de compétences médicales, les juges du fond étaient tenus de les analyser, d'en dégager le contenu, et de dire, au cas par cas, eu égard à son contenu et à l'auteur de l'attestation, de dire si elle pouvait être tenue pour probante ; qu'en s'abstenant de procéder de la sorte, les juges du fond ont violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ET ALORS QUE, TROISIEMEMENT, l'arrêt ne saurait être considéré comme légalement justifié au regard du principe de la liberté de la preuve, au motif que le jugement a analysé l'attestation de Monsieur D... dès lors qu'au stade de l'appel, cette attestation a été écartée pour une raison de principe, ce qui s'oppose à ce que les motifs des premiers juges soient réputés adoptés ; qu'à cet égard encore, l'arrêt a été rendu en violation du principe de la liberté de la preuve, et de l'article 1341 du code civil (et 1358 nouveau).
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a refusé d'annuler les testaments des 25 avril 2002 et 31 mai 2002 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article 901 du code civil dispose que "Pour faire une libéralité, II faut être sain d'esprit. La libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l'erreur, le dol ou la violence" ; que la charge de la preuve de l'insanité d'esprit du testateur incombe à, celui qui agit en annulation ; que les observations précédentes relatives l'état de santé de Marc X... permettent d'écarter de façon définitive une altération durable et continue de ses facultés mentales au moment de la rédaction des deux testaments litigieux ; que M. Alain X... n'apporte pas la preuve que ces testaments ne sont pas la transcription de la volonté du défunt, même s'ils sont rédigées en termes parfois maladroits ; qu'il n'apporte pas davantage la preuve qu'ils ne sont pas écrits et signés de la main du défunt » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « l'article 901 du Code civil dispose : « Pour faire une libéralité, il faut être sain d'esprit. La libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l'erreur, le dol ou la violence. » ; que Monsieur Alain X... soutient que les facultés intellectuelles de son père étaient fortement dégradées dès l'année 2001 ; que cette affirmation, comme il a été dit ci-dessus, n'est corroborée par aucun élément médical mais seulement par l'attestation de Monsieur D... qui à elle seule ne permet pas d'en déduire qu'en 2003 Monsieur Marc X... n'était pas en mesure d'établir des testaments. Si Monsieur Alain X... avait noté des troubles du comportement chez son père dès 2001 il est étonnent n'ait pas saisi le juge des tutelles qui n'est intervenu qu'en 2006 soit cinq ans après l'apparition des troubles et près de quatre ans après la signature des testaments ; que le fait que ces deux testaments aient été rédiges dans des termes semblables, que l'on puisse constater une très légère différence dans la signature et que certains termes n'existent pas dans la langue française mais restent malgré tout compréhensibles puisque Monsieur Marc X... en donne lui-même la traduction, ne permet pas d'en déduire que Monsieur Marc X... n'avait pas l'intention réelle et la capacité de léguer les sommes d'argent inscrites dans ces documents à l'un de ses fils » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, la cassation à intervenir sur le premier moyen, s'agissant des avenants aux contrats d'assurance-vie, ne peut manquer d'entraîner, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt concernant les testaments en application de l'article 625 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et tout cas, s'il incombe aux juges du fond d'apprécier la valeur probante des attestations produites, il leur est interdit, dès lors que le principe de la liberté de la preuve est en cause, d'écarter par principe des attestations s'agissant de l'insanité d'esprit d'un de cujus, au motif qu'elles sont dépourvues de connaissances médicales ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé le principe de la liberté de la preuve, ensemble l'article 1341 du code civil (1358 nouveau) et 901 du code civil ;
ALORS QUE, TROISIEMEMENT, et en tout cas, si même elles émanaient de personnes non pourvues de compétences médicales, les juges du fond étaient tenus de les analyser, d'en dégager le contenu, et de dire, au cas par cas, eu égard à son contenu et à l'auteur de l'attestation, de dire si elle pouvait être tenue pour probante ; qu'en s'abstenant de procéder de la sorte, les juges du fond ont violé l'article 455 du code de procédure civile ;
| cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-19.000 du 11/04/2018, partie 4 |
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ET ALORS QUE, QUATRIEMEMENT, l'arrêt ne saurait être considéré comme légalement justifié au regard du principe de la liberté de la preuve, au motif que le jugement a analysé l'attestation de Monsieur D... dès lors qu'au stade de l'appel, cette attestation a été écartée pour une raison de principe, ce qui s'oppose à ce que le motifs des premiers juges soient réputés adoptés ; qu'à cet égard encore, l'arrêt a été rendu en violation du principe de la liberté de la preuve, et de l'article 1341 du code civil (1358 nouveau) et 901 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande visant au rapport à la succession des primes manifestement excessives versées par le de cujus sur les contrats d'assurance-vie qu'il a souscrits ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « les sommes perçues par le bénéficiaire d'une assurance-vie ne sont pas rapportables à la succession, sauf si les primes étaient manifestement exagérées au égard aux facultés du souscripteur; que le caractère manifestement exagéré des primes s'apprécie au moment du versement au regard de la situation patrimoniale du souscripteur et de l'utilité, pour lui, de la souscription ; que Marc X... a souscrit 16 contrat d'assurance-vie en y versant des primes d'un montant total de 133.480 euros entre 1995 et 2003, de plus de 10.000 euros chaque année et qui ont pu atteindre 35.146,63 euros en 2001, 17.700 miros en 2002 et près de 25.000 euros en 2003 ; que, s'il est constant que durant cette période, il percevait, un revenu annuel moyen d'environ 11.600 euros et des loyers pour un montant annuel de 19.417,32 euros, le versement de ces primes s'apprécie également au regard de la consistance de son patrimoine, alors qu'il est établi qu'il disposait par ailleurs de liquidités et de compte titres qui au jour de la succession, soit bien des années après, a encore été évalué à la somme de 460.950,55 euros; que ces primes n'apparaissent donc pas manifestement exagérées au regard de la situation patrimoniale du souscripteur » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « il n'est pas contesté que les revenus annuels de Monsieur Marc X... étaient supérieurs à 30 000 € par an ; qu'il ne peut être non plus contesté que lors du partage effectué par Maître C..., notaire, 1e 18 juillet 2007, entre les deux frères, l'actif de succession s'élevait à 460 950,55 euros compose de liquidités à hauteur de 81 460,83 € et principalement de comptes titres pour le reste, alors que la passif s'élevait à 23 938,85€ ; qu'il convient aussi de noter que les versements contestés par Monsieur Alain X... ont été effectués entre 1995 et 2003, c'est-à-dire à une période où lui-même figurait encore parmi les bénéficiaires des contrats ; qu'au vu de ces éléments et alors que Monsieur Alain X... n'apporte aucun début de preuve à l'appui de ses affirmations, il ne fait pas de doute que Monsieur Marc X... disposait d'une aisance financière lui permettant de souscrire plusieurs contrats d'assurance vie alors de plus qu'il avait fait donation de biens immobiliers à ses fils, en en gardant l'usufruit ; que rien ne permet donc d'établir que les primes versées sur plus de 14 ans sont manifestement exagérées au regard des facultés financières de Monsieur Marc X... » ;
ALORS QUE, pour apprécier le caractère manifestement exagéré des primes d'assurance-vie, les juges du fond sont tenus de prendre en compte, non seulement la situation patrimoniale du souscripteur, mais également l'utilité des versements pour le souscripteur, notamment eu égard à son âge ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur l'utilité des versements, pour Monsieur Marc X..., eu égard notamment à son âge, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 132-13 du code des assurances. | cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-19.000 du 11/04/2018, partie 5 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix avril deux mille dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LAVIELLE, les observations de la société civile professionnelle MARLANGE et DE LA BURGADE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CROIZIER ;
REJET du pourvoi formé par M. Hassan Z..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 9 janvier 2018, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, de vol avec arme, association de malfaiteurs et séquestration, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 144, 145-3, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté et ordonné le maintien en détention de M. Z... ;
"aux motifs que, le 6 mars 2015 vers 2 heures, des malfaiteurs ont pénétré dans un entrepôt Fedex sis à [...] (Yvelines), et rassemblé le personnel sur la plate-forme de livraison, l'un d'eux menaçant les employés avec un fusil à pompe en les tenant en respect ; qu'un camion de type fourgonnette Renault immatriculé [...] qui s'avérait volé à la société Derichebourg entre le 4 et le 5 mars 2015 à [...] (Seine-Saint-Denis), puis faussement immatriculé, était chargé de divers colis (téléphones mobiles et objets hi-teck) ; que selon les descriptions faites par les employés séquestrés, quatre malfaiteurs étaient présents, trois habillés de noir et porteurs d'une cagoule, un quatrième arrivé 30 minutes après au volant de la fourgonnette ; que l'individu porteur du fusil à pompe avait aussi une bombe lacrymogène dans sa poche, un autre individu, celui qui aidait à charger le camion avait une arme de poing, et un troisième, le plus calme qui semblait donner des ordres, utilisait un pied de biche pour ouvrir les cartons, dont il semblait connaître le contenu ; que selon le témoignage des employés, à 3 h 15, deux malfaiteurs auraient quitté les lieux, et à 3 h 20 un individu vêtu de sombre faisant vraisemblablement partie des malfaiteurs serait parti à bord d'un véhicule particulier, en empruntant le parking voisin, laissant le dernier malfaiteur surveiller seul les captifs ; que, pour prendre la fuite, à 4 heures, le malfaiteur décrit comme porteur du fusil, resté en dernier sur les lieux, a dérobé le véhicule Renault Scénic immatriculé [...] d'un employé présent, M. A... ; que le 6 mars 2015, à 4 h 25, soit dans un temps voisin de la commission des faits précités, dans le département de la Seine-Saint-Denis, à [...], au niveau de la RN2 à la sortie de la bretelle d'autoroute, la police municipale a interpellé M. Z..., qui conduisait la fourgonnette ; qu'une partie seulement de la marchandise a alors été récupérée ; que lors de l'interpellation de M. Z..., un véhicule Volkswagen Golf a foncé en direction d'un policier qui avait sorti son arme pour l'arrêter, et qui n'a pas été percuté par le véhicule uniquement parce qu'il avait eu le réflexe de se jeter sous la camionnette en stationnement ; que la Golf VW est parvenue à prendre la fuite tous feux éteints et à vive allure en direction de [...] ; que toujours le 6 mars 2015, à 12 h 30, également à [...], le véhicule Renault Scénic, volé à l'issue de la séquestration des employés de Fedex, a été découvert totalement incendié, dans un parking extérieur situé face au [...] ; qu'un ADN identifié à M. Z... a été découvert à partir d'une trace de sang sur deux morceaux des cartons, et d'un mélange sur une caisse métallique ; que sur le pied de biche découvert dans la fourgonnette et sur la caisse métallique saisie dans les entrepôts Fedex, une autre trace d'ADN a été découverte, identifiée à M. B... ; considérant que la participation de M. Z... aux faits de vol en bande organisée et de séquestration ressort des déclarations de M. B... mais, également de la quasi-concomitance de son interpellation avec la commission des faits, sachant qu'il était au volant de la camionnette ayant servi à transporter les marchandises dérobées ; qu'il a déclaré qu'un certain "Mohamed" lui avait demandé de conduire ce véhicule dont il ne connaissait pas le contenu jusqu'à la cité Emmaüs ; que pour autant il n'a pas été en mesure de fournir une quelconque information permettant l'identification de cette personne et son audition ; que de plus son ADN a été retrouvé sur les cartons contenant les objets multimédia dérobés alors qu'il a affirmé ne pas les avoir touchés, et également sur la même caisse métallique que celle porteuse de l'ADN de M. B..., ce qui tend à prouver qu'il est entré dans l'entrepôt ; | décision 18-80.371 du 10/04/2018, partie 1 |
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que par ailleurs, les investigations menées en matière de téléphonie laissent penser que les faits de séquestration et de vol ont été précédés de repérage par MM. B... et Z..., et mettent en cause également M. Mustapha C..., selon un détail repris dans les motifs de l'arrêt du 10 octobre 2017 ; qu'il ressort des éléments de téléphonie développés toujours dans cet arrêt que MM. B... et Z... se sont retrouvés à plusieurs reprises les jours précédant la commission des faits mais également le jour même quelques heures auparavant et se sont rendus sur les lieux pour effectuer des repérages ; qu'il ressort des éléments de l'enquête et de l'information que la fourgonnette utilisée par les malfaiteurs pour transporter la marchandise dérobée a été fournie a été volée la nuit précédant la commission du vol ; qu'il ressort également de la procédure que ce véhicule a été faussement immatriculé pour commettre ce vol ; que d'ailleurs M. B... a reconnu avoir participé au changement des plaques d'immatriculation avec M. Z... ; qu'il importe de souligner que M. Z... a été appréhendé à [...] au volant de la fourgonnette à 4 heures 20 ; que le conducteur du véhicule Golf présent lors de son interpellation et qui failli renverser un policier n'a pu être identifié ; que les trois mis en cause seuls identifiés à ce stade de l'information sont MM. Z..., B... et C... ; que selon l'appréciation faite par l'arrêt de la chambre de l'instruction l'ensemble des infractions reçoivent une qualification criminelle à l'exception de la mise en circulation du véhicule faussement plaqué constitue un délit connexe, outre le délit d'association de malfaiteurs ; que dès lors en cas de renvoi devant la juridiction criminelle et de verdict de culpabilité M. Z... encourt une lourde peine ; que compte tenu de ses liens familiaux avec le Maroc tout laisse penser qu'il pourrait plus qu'un autre bénéficier de facilités pour être hébergé et ainsi se soustraire à ses juges, mû par la crainte du verdict criminel ; que l'enquête de personnalité a mis en exergue l'absence de motivation de M. Z... dans la réalisation des démarches et de questionnement sur son avenir ; que son incarcération s'est accompagnée de plusieurs incidents et non d'efforts en vue d'une insertion socio-professionnelle ; qu'ainsi en dépit de l'absence d'antécédents judiciaires de l'intéressé et à supposer établis les faits reprochés, le risque de réitération de faits similaires est indéniable, compte tenu du caractère lucratifs des méfaits ; que ni les contraintes d'une assignation à résidence avec surveillance électronique, ni celles d'un contrôle judiciaire ne permettraient de prévenir avec certitude les risques énoncés plus haut et de garantir la présence du mis en examen, en passe d'être accusé, à tous les actes de la procédure ; qu'en effet, ces mesures, quelles qu'en soient les modalités, ne présentent pas un degré de coercition suffisant pour atteindre ces finalités ; que ces mesures ne permettraient pas d'éviter avec certitude une réitération des faits ; que seule la détention est de nature à parvenir à ces objectifs ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter la demande de mise en liberté et d'ordonner le maintien en détention de M. Z... ;
"1°) alors que, lorsque la durée de la détention provisoire excède un an en matière criminelle, les décisions ordonnant sa prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent comporter les indications particulières qui justifient en l'espèce la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure ; qu'en rejetant la demande de mise en liberté de M. Z... et en ordonnant son maintien en détention provisoire qui durait depuis plus de un an, sans préciser les circonstances particulières qui auraient justifié la poursuite de l'information, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2°) alors que, lorsque la durée de la détention provisoire excède un an en matière criminelle, les décisions ordonnant sa prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent comporter les indications particulières qui justifient en l'espèce la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure ; qu'en rejetant la demande de mise en liberté de M. Z... et en ordonnant son maintien en détention provisoire qui durait depuis plus de un an, sans préciser la durée prévisible d'achèvement de la procédure, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. Z..., détenu depuis le 7 mars 2015, a interjeté appel de l'ordonnance de mise en accusation rendue par le juge d'instruction le 13 juin 2017 ; que, par arrêt du 10 octobre suivant, la chambre de l'instruction a ordonné un supplément d'information ; que, le 29 décembre 2017, M. Z... a saisi cette juridiction d'une demande de mise en liberté, conformément aux dispositions des articles 148-1 et 148-2 du code de procédure pénale ;
| décision 18-80.371 du 10/04/2018, partie 2 |
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Attendu que le requérant ne saurait se faire un grief de ce que la chambre de l'instruction, pour rejeter sa demande de mise en liberté, n'a pas satisfait aux exigences de motivation prévues par l'article 145-3 du code de procédure pénale, dès lors qu'en application de l'article 186-5 du même code, les délais relatifs à la durée de la détention provisoire prévus aux articles 145-1 à 145-3 ne sont plus applicables lorsque le juge d'instruction a rendu son ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement, même en cas d'appel formé contre cette ordonnance, ce texte ne distinguant pas selon que la chambre a ou non prescrit un supplément d'information ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Lavielle, conseiller rapporteur, MM. Pers, Straehli, Mme Dreifuss-Netter, M. Fossier, Mmes Durin-Karsenty, Schneider, Ingall-Montagnier, MM. Bellenger, Cathala, Ricard, Parlos, Bonnal, Mme Ménotti, conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, MM. Barbier, Talabardon, Mme Guého, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Croizier ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre. | décision 18-80.371 du 10/04/2018, partie 3 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq avril deux mille dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller ZERBIB, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PETITPREZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
-
M. Marie Z...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 7 mars 2018, qui, dans la procédure d'exécution d'un mandat d'arrêt européen décerné à son encontre par les autorités judiciaires espagnoles, a ordonné un complément d'information ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. Z..., condamné, pour appropriation illicite, par la cour provinciale de Séville à une peine d'emprisonnement de trois ans et neuf mois, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen émis le 24 février 2017 par les autorités judiciaires espagnoles ; que ce mandat lui a été notifié le 29 juin 2017 par des enquêteurs de l'office central contre la corruption et les infractions financières ; qu'il a été interrogé le 30 juin 2017 par le procureur général de Versailles puis placé sous contrôle judiciaire ; que, par arrêt du 8 août 2017, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles a refusé sa remise aux autorités judiciaires espagnoles sollicitée aux fins d'exécution de sa peine dans la péninsule ibérique aux motifs qu'il n'était pas établi que sa demande tendant à être assisté par un avocat en Espagne ait été adressée à ces autorités ; que le dossier a été transmis au parquet général de Paris territorialement compétent en raison du domicile de M. Z..., lequel a été à nouveau convoqué par le procureur général qui a procédé à son interrogatoire d'identité, le 18 septembre 2017, et l'a informé du contenu du mandat européen et de ses droits avant qu'avisé d'une date d'audience, il ne comparaisse devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des principes relatifs à l'autorité de la chose jugée, et de l'article 593 du code de procédure pénale, excès de pouvoir ;
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné un complément d'information « afin que les autorités judiciaires espagnoles fassent connaître aux autorités judiciaires françaises si elles ont des objections à ce que M. Z..., compte tenu de sa nationalité française, exécute sa peine en France », dans le cadre d'une demande de remise formée par l'autorité judiciaire espagnole en vue de l'exécution d'une peine de privation de liberté de trois ans et neuf mois prononcée le 14 avril 2015 par la cour d'appel de Séville ;
"1°) alors qu'il résulte tant de l'arrêt frappé de pourvoi que des pièces de la procédure que par un précédent arrêt du 8 août 2017, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles a purement et simplement refusé la remise de M. Z... en vertu du même mandat d'arrêt européen ; que cette décision était revêtue d'une autorité absolue de chose jugée ; qu'en réexaminant la demande, au mépris de cette autorité de chose jugée, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a méconnu les principes relatifs à la chose jugée et excédé ses pouvoirs ; que la cassation interviendra sans renvoi ;
"2°) alors que la chambre de l'instruction ne pouvait prendre une décision différente de celle de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles sans s'expliquer sur les raisons l'autorisant éventuellement à passer outre cette première décision de refus qui mettait fin à la procédure ; que l'arrêt attaqué est à tout le moins privé de tous motifs" ;
Attendu que, par l'arrêt attaqué, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, saisie d'une demande de remise de M. Z... en exécution d'un mandat d'arrêt européen, a prescrit un complément d'information afin qu'en application de l'article 728-12 du code de procédure pénale, les autorités judiciaires espagnoles fassent connaître aux autorités judiciaires françaises si elles ont des objections quant à l'exécution en France de la peine d'emprisonnement prononcée par une juridiction espagnole contre l'intéressé, âgé de 71 ans et de nationalité française, qui y a consenti ;
| décision 18-81.528 du 05/04/2018, partie 1 |
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Qu'en statuant ainsi, tout en faisant état de la décision antérieure de la cour d'appel de Versailles qui, sur la base du même mandat d'arrêt européen, a refusé de remettre M. Z... aux autorités espagnoles au motif qu'il n'était pas justifié que sa demande tendant à être assisté d'un avocat en Espagne ait été transmise aux autorités requérantes, la chambre de l'instruction, qui a retenu, à bon droit, la persistance de ce mandat et prononcé sur son exécution, l'arrêt précédent n'ayant refusé la remise que pour une irrégularité de procédure portant atteinte aux droits de la défense, sans statuer au fond, n'a ni excédé ses pouvoirs, ni méconnu la chose jugée ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 695-23 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné un complément d'information « afin que les autorités judiciaires espagnoles fassent connaître aux autorités judiciaires françaises si elles ont des objections à ce que M. Z..., compte tenu de sa nationalité française, exécute sa peine en France », dans le cadre d'une demande de remise formée par l'autorité judiciaire espagnole en vue de l'exécution d'une peine de privation de liberté de trois ans et neuf mois prononcée le 14 avril 2015 par la cour d'appel de Séville ;
"aux motifs que les autorités espagnoles ont condamné M. Z... pour une infraction continuée d'appropriation indue au titre des articles 252, 250.6 et 74 du code pénal espagnol, le tribunal expliquant que cette infraction absorbe une infraction d'administration déloyale au titre de l'article 295 du code pénal ; que la remise de M. Z... est demandée aux fins d'exécution d'une peine pour des faits d' appropriation illicite ; qu'il n'existe pas à cet égard d'incertitude sur l'infraction objet de la condamnation ; que cette infraction ne figure pas au nombre des infractions prévues par l'article 694-32 du code de procédure pénale auquel l'article 695-23 se réfère ; qu'il y a donc lieu de vérifier, comme exigé par l'article 695-23 alinéa 1, que la condition de double incrimination existe bien en l'espèce ; que dans le mandat d'arrêt européen, les autorités requérantes exposent que "le délit d'appropriation illicite punit quiconque, au préjudice d'autrui, s s'approprie ou détourne de l'argent, des effets, des valeurs ou toute autre chose meuble ou actif patrimonial qu'il a reçu en dépôt, commission ou administration ou à tout autre titre produisant obligation de les remettre ou de les restituer ou nie les avoir reçus " ; que les faits qui ont conduit à la condamnation de M. Z... ayant consisté dans le fait de s'approprier illicitement les actifs d'une société alors qu'il avait des responsabilités sociales qui auraient dû le conduire à faire un usage licite de ces actifs peuvent s'analyser en droit français en abus de confiance ; la condition de double incrimination existe donc bien en l'espèce ;
"alors que le délit « continu d'appropriation indue » pour lequel M. Z... est présenté comme ayant été condamné, n'existe pas en droit français, l'assimilation à l'abus de confiance étant impossible dès lors que l'abus de confiance est en droit français un délit instantané, alors que M. Z... a été jugé pour un délit prétendument continu ; que la Chambre de l'instruction a donc violé les textes précités" ;
Attendu que, pour retenir comme remplie la condition de double incrimination, en Espagne et en France, des faits qui ont motivé la condamnation de M. Z..., les juges énoncent que le délit d'appropriation illicite des actifs d'une société par une personne qui en était l'administrateur peut s'analyser en droit français comme étant un délit d'abus de confiance ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a constaté que les faits visés par le mandat d'arrêt européen constituent une infraction au regard de la loi française, la chambre de l'instruction, qui n'avait pas à rechercher si ces délits était l'un continu et l'autre instantané à l'occasion de son examen de la réciprocité d'incrimination, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre. | décision 18-81.528 du 05/04/2018, partie 2 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Moulins Soufflet, société anonyme, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 16 novembre 2016 par la cour d'appel de Versailles (17e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Sophie Y..., domiciliée [...] ,
2°/ à Pôle emploi Ile-de-France, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 14 février 2018, où étaient présents : Mme Goasguen, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller rapporteur, M. Schamber, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Moulins Soufflet, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme Y... ;
Sur le rapport de Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Moulins Soufflet aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Moulins Soufflet à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Moulins Soufflet.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'avenant au contrat de travail daté du 3 septembre 2012 était nul et d'AVOIR condamné la société Moulins Soufflet à payer à Mme Y... les sommes de 9 341,50 euros à titre de rappel de salaires, congés payés inclus, sur la période du 1er juillet 2012 au 25 mai 2013, 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Sophie Y... a été engagée par la société Moulins Soufflet, en qualité de responsable de secteur, par contrat de travail à durée indéterminée du 10 mars 2008 qui prévoyait qu'elle bénéficierait d'un salaire fixe brut mensuel de 2 600 euros sur une base de 35 heures hebdomadaires, porté à 2 800 euros à compter du 1er juin 2008, et d'un 13ème mois ; que le contrat précisait que la salariée se conformerait à l'horaire de son service et que la réduction du temps de travail serait appliquée par l'attribution de 10 jours de congés supplémentaires limitant ainsi la durée du travail à 1 840 heures travaillées par an ; qu'en 2012, la société Moulins Soufflet a décidé de mettre en place un nouveau système de rémunération pour l'ensemble de sa force commerciale ; que, le 19 juin 2012, la société Moulins Soufflet a présenté ce nouveau système au comité central d'entreprise qui a émis une opinion positive ; que, le 29 juin 2012, Mme Y... a signé sa lettre d'objectifs, en précisant toutefois que si elle acceptait les principes généraux du nouveau système de rémunération, elle tenait à souligner son souhait de réviser son fixe à la juste valeur de son secteur ; que Mme Y... a signé un avenant à son contrat de travail, daté du 3 septembre 2012, qui délimitait son secteur et prévoyait, au titre de sa rémunération, qu'elle percevrait un salaire brut mensuel fixe de 2 170 euros, base 35 heures, et une rémunération variable conditionnée par les objectifs qui seraient fixés unilatéralement par son employeur ; que, le 10 octobre 2012, elle a signé sa lettre d'objectifs ; qu'à compter du 25 octobre 2012, Mme Y... a été placée en arrêt de travail pour maladie en raison d'un état dépressif réactionnel ; que, par requête du 29 octobre 2012, Mme Y... a saisi le conseil de prud'hommes de Pontoise aux fins d'obtenir la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, la nullité du contrat signé le 10 octobre 2012, le versement de dommages et intérêts pour harcèlement moral et la condamnation de la société les Moulins Soufflet à lui payer les indemnités de fin de contrat ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 1 |
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qu'alors qu'elle se trouvait toujours en arrêt de travail, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, par courrier du 21 mai 2013 ainsi libellé : « Je vous informe par la présente que je souhaite mettre un terme à mon contrat de travail suite aux multiples pressions et menaces que j'ai subies de votre part pour signer un avenant dont je ne voulais pas. Ce que vous m'avez fait subir pendant des mois m'a terriblement affectée, à tel point que je n'ai pu reprendre mon travail depuis le mois d'octobre 2012, malgré une vaine tentative il y a quelques jours. Mon arrêt maladie prendra fin le 27 mai prochain, date à laquelle mon contrat sera rompu. Jamais je n'aurais pensé partir dans de telles conditions après tous les efforts que j'ai consentis ces 5 dernières années pour vous donner pleine et entière satisfaction dans mon travail (aucune heure supplémentaire ne m'a d'ailleurs jamais été payée). J'espère que vous ne me ferez aucune difficulté quant aux formalités de mon départ (solde de tout compte, certificat de travail) ' je ne veux plus de problème mais seulement tenter de me reconstruire. S'agissant du matériel professionnel (véhicule, ordinateur, téléphone), je me tiens à votre disposition pour vous les restituer » ; que sur la rupture, que la prise d'acte de la rupture par le salarié, en raison de faits qu'il reproche à son employeur, entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant ; que, toutefois, s'il convient de se prononcer sur la seule prise d'acte, il y a lieu de prendre en considération les manquements de l'employeur invoqués par le salarié, tant à l'appui de la demande de résiliation judiciaire, devenue sans objet, qu'à l'appui de la prise d'acte ; que Mme Y... se prévaut de quatre manquements commis par son employeur ; que, s'agissant de la modification unilatérale de son contrat de travail, Mme Y... fait grief à son employeur d'avoir violé son contrat de travail en lui payant, de juillet à septembre 2012, un salaire fixe de 1 895,13 euros au lieu de 2 994,93 euros ; que dans un mail du 5 octobre 2012 Mme Y... a répondu à son employeur que, compte tenu de son insistance et par crainte d'être licenciée, elle acceptait une baisse de rémunération fixe à condition qu'il ne soit pas inférieur à 1 990 euros ; que cette rémunération fixe n'apparaît sur les bulletins de paie qu'à partir du mois d'octobre 2012 ; que ces éléments établissent que, comme elle le prétend, elle n'a signé l'avenant daté du 3 septembre 2012 que le 10 octobre 2012, jour de signature de la lettre d'objectifs ; que la société Moulins Soufflet ne pouvant se prévaloir de la simulation présentée à Mme Y... au mois de juin 2012, qui n'a pas de valeur contractuelle, ni de l'acceptation de la lettre d'objectifs du 29 juin 2012, qui ne concerne que la part variable de la rémunération, c'est abusivement qu'en juillet, août et septembre 2012, elle a diminué la rémunération mensuelle fixe de Mme Y... au montant de 1 895,13 euros au lieu du montant contractuel de 2 994,93 euros imposant ainsi à la salariée une modification unilatérale de la structure de sa rémunération ; qu'alors que la différence de rémunération fixe était d'un montant de 3 299,40 euros, la société Moulins Soufflet n'a procédé à une régularisation que d'un montant de 941,79 euros ; que, s'agissant du harcèlement moral, aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » ; qu'en application de l'article L. 1154-1, dans sa version applicable à l'espèce, interprété à la lumière de la directive n 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'il a déjà été établi que la société Moulins Soufflet avait imposé à Mme Y... une baisse de sa rémunération fixe en juillet, août et septembre 2012 ; qu'il résulte du compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 4 septembre 2012 que la direction avait clairement déclaré qu'en cas de refus de signer les avenants elle devrait trouver un mode de rupture ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 2 |
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que Mme Y..., dans un long mail adressé à son avocat le 26 octobre 201[2], relate les pressions subies depuis le 19 juin 2012 pour qu'elle accepte le changement de rémunérations, les multiples rendez-vous et entretiens qui lui ont été imposés, même le 29 juin à 7h dans un bar sur son secteur et les pressions exercées jusqu'au dernier moment pour qu'elle signe ; que ces propos sont corroborés par les attestations de Mme Z... et M. A... qui attestent avoir subi de nombreuses pressions pour obtenir qu'ils signent leurs avenants et par les courriers de M. B... des 8 novembre 2012 et 3 janvier 2013 dans lequel il décrit les demandes insistantes, l'existence de pas moins de 5 rencontres et finit par demander une rupture amiable ; qu'également, l'équipe commerciale a adressé le 4 octobre 2012 à la direction un courrier dénonçant le fait que certains commerciaux avaient signé les nouveaux contrats, contraints et forcés, et que les pressions continuaient pour obtenir la signature des autres ; qu'aussi, l'inspectrice du travail dans un courrier du 11 octobre 2012 a informé la société Moulins Soufflet de ce qu'elle avait été alertée par plusieurs salariés en état de souffrance morale en raison des pressions exercées par leur hiérarchie pour qu'ils signent les avenants ; que ces éléments mêmes généraux décrivent le contexte dans lequel l'entreprise a géré la modification du mode de rémunération et confirment, même s'ils ne la nomment pas, également la relation des circonstances faite par Mme Y... ; que le fait que Mme Y... a été placée en arrêt de travail pour maladie, pour syndrome dépressif, à compter du 23 octobre 2012, arrêt renouvelé jusqu'au mois de mai 2013 suffit à démontrer la réalité de la dégradation de son état de santé ; que ces faits pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu' il incombe donc à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le seul fait que, lors de son entretien d'évaluation le 7 juin 2012, Mme Y... ait fait part de sa satisfaction relative à l'évolution de son poste et à la confiance exprimée à son égard lors de sa grossesse et de son congé de maternité ne suffit pas à établir la preuve qui incombe à l'employeur ; qu'en outre, cet entretien est antérieur aux propositions de modification du mode de rémunération ; que faute pour l'employeur d'apporter la preuve qui lui incombe, le harcèlement moral est établi ; que dès lors que Mme Y... démontre qu'elle est toujours sous traitement médicamenteux, le premier juge a fait une exacte appréciation de son préjudice en lui allouant de ce chef la somme de 5 000 euros ; qu'en application de l'article L. 1152-3 toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ; que Mme Y... ayant signé l'avenant daté du 3 septembre 2012 alors qu'elle subissait un harcèlement moral destiné à obtenir sa signature c'est à juste titre que les premiers juges l'ont annulé ; que le jugement sera confirmé de ce chef ; que l'avenant ayant modifié la rémunération fixe étant nul, Mme Y... est en droit d'obtenir un rappel de salaire du 1er juillet 2012 au 25 mai 2013 sur la base de la différence entre le salaire fixé imposé et le précédent, soit la somme de 9 341,50 euros, congés payés inclus ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en vertu de l'article L 1152-1 à 3 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en vertu de l'article L. 1154-1 du Code du travail, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la salariée soutient avoir subi des faits de harcèlement moral qui l'ont conduit à être arrêtée pour maladie et l'ont contraint à signer un avenant à son contrat de travail qui lui était défavorable et modifiait le montant de sa rémunération ; qu'elle évoque le fait d'avoir subi une baisse de rémunération pendant trois mois consécutifs avec une perte de rémunération de plus de 1 000 € par mois avant tout accord de sa part ; qu'au terme des deux avenants au contrat de travail, celui du 5 mars 2008 et celui du 3 septembre 2012, il apparaît que la salariée a vu son coefficient hiérarchique passer, au titre des mêmes fonctions, de 235 à 300 et sa rémunération brute mensuelle de 2800€ (en juin 2008) à 2170€ en septembre 2012 (à effet au 1er juillet 2012), pour la même base horaire hebdomadaire ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 3 |
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qu'au terme de la présente décision, ce fait est établi ; qu'elle prétend également avoir subi de nombreux entretiens et appels téléphoniques individuels de sa hiérarchie, avec la menace permanente d'un licenciement ; que la salariée produit des courriels en date des 2, 5 et 23 octobre 2012 au terme desquels elle s'inquiète auprès de ses supérieurs hiérarchiques des conditions de signature de l'avenant au contrat de travail de 2012 et de la baisse de sa rémunération, et fait état des pressions subies ; qu'au terme du dernier courriel, la salariée dénonce le nouveau contrat signé ; qu'elle verse également plusieurs attestations, conforme en la forme, de salariés de l'entreprise ; que Mme Z..., responsable restauration, affirme le 29 novembre 2012, que "Le 12/06/12 un avenant au contrat de travail au sein du groupe soufflet m'a également été proposé. Suite à de nombreux entretiens sur une courte période, mon refus de signer cet avenant m'a amené à une convocation avec la direction commerciale au siège du groupe (..). J'ai donc refusé de signer cet avenant car cela induit une forte baisse de salaire (..). Sans accord possible sur la rémunération avec la direction, j'ai demandé une rupture de contrat de travail, sous forme de rupture conventionnelle, qui a été acceptée immédiatement et effective le 22 octobre 2012. (..) " ; que M. [A...], responsable de secteur, atteste le 2 janvier 2013, avoir "vécu au même titre que Mr B... Stéphane, de nombreuses pressions afin de nous faire signer un avenant à notre contrat de travail. (..) A ce jour, j'ai dû quitter l'entreprise dû à une perte de salaire de 4500€ depuis juillet 2012. De plus l'on m'a signifié lors des nombreux entretiens que je devrais quitter l'entreprise en cas de non signature de l'avenant. (..) » ; qu'au terme de la question des délégués du personnel du 4 septembre 2012 à la Direction, "Qu'est-il prévu pour les commerciaux qui ne veulent pas signer leur avenant? ", la réponse écrite de M. C..., Directeur régional, a été "Si les aménagements proposés dans les entretiens individuels à ce propos ne permettent pas d'aboutir, nous devrons trouver des modes de rupture de contrat. (Info dès le départ)" ; qu'au terme de son courrier au Directeur général de l'entreprise en date du 11 octobre 2012, l'Inspection du travail relève "que certains salariés sont exhortés à signer leurs avenants par la pression commune de plusieurs managers lors d'un entretien (.). Certains sont en grande difficultés financières du fait du nouveau système alors qu'ils n'ont même pas encore signé leurs avenants. (..) Cette modification de la détermination des rémunérations par fixation d'objectifs a un impact sur l'évaluation des commerciaux pouvant entraîner des pressions psychologiques. " ; qu'en tout état de cause, antérieurement au mois de juin 2012, aucun fait de harcèlement moral n'avait été évoqué par la salariée, présente dans l'entreprise depuis plus de 4 ans, et les relations entre la salariée et l'employeur n'étaient pas conflictuelles au début du mois de juin 2012 ; qu'au terme de l'entretien d'évaluation du 7 juin 2012, la salariée a indiqué "Merci aussi à l'Entreprise de m'avoir fait confiance et soutenu pendant ma grossesse el mon congé maternité. Je m'efforcerais de remplir mes objectifs et de répondre aux attentes de mon DR pour la nouvelle campagne. " et le Directeur régional, M. D..., a conclu "Année délicate en effet de retour de congés maternités Sophie a dû reprendre son secteur dans une période très tendu suite à l'augmentation et les facturations des étuis. (...) Sophie doit absolument monter en puissance et devenir autonome tous comme l'exige son futur poste en tant que sénior. " ; qu'au terme d'un courriel daté du 25 juin 2012 entre la salariée et M. C..., DDR Corbeil, elle fait part de ses craintes: "Je sais que d'autres ont été contraint de signer cet avenant s'ils voulaient garder leurs postes ... (...) J'en ai conclu que j'étais purement et simplement licenciée pour avoir refusé cette nouvelle rémunération. Je vous avoue que je vis mal ce qu'il se passe. Je ne pense pas être un mauvais élément et ne comprends pas que 3000€ brut mensuel soit un salaire exorbitant ni un salaire que je ne mérite pas par rapport à mon travail. (..) Je ne peux et ne veux pas gagner moins. Mais je peux continuer à travailler avec ma rémunération actuelle: (..) Je suis coincée.je ne veux pas être licenciée mais je ne peux pas signer la proposition que le moulin me fait, (...) Je veux bien en parler encore avec vous mais j'ai l'impression que le choix est fait de votre côté. Soit je signe soit je pars. (..)" ; que la salariée verse aux débats le certificat médical du Dr E..., généraliste, daté du 25 octobre 2012,qui certifie que Mme Y... "présente un syndrome dépressif réactionnel ayant nécessité un arrêt de travail et la prise d'antidépresseurs avec repos chez elle" et l'ordonnance prescrivant des médicaments; le certificat médical du Dr F..., psychiatre, daté du 15 janvier 2013, qui certifie avoir constaté que Mme Y... "présente un syndrome dépressif majeur nécessitant une prise en charge médicamenteuse et psychothérapeutique. " ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 4 |
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que l'employeur conteste les faits de harcèlement moral en indiquant que la salariée s'est constitué des preuves à elle-même, que les attestations produites concernent d'autres salariés, que le courrier de l'inspection du travail ne repose sur aucun fait constaté et n'a eu aucune suite, et que les certificats médicaux n'établissent pas un lien de causalité entre un harcèlement moral au travail et le syndrome dépressif ; qu'en tout état de cause, l'ensemble des faits évoqués par la salariée laisse présumer l'existence d'un harcèlement et l'employeur ne conteste pas avoir fait subir des pressions à la salariée, avec menace implicite de licenciement, afin qu'elle accepte une diminution de sa rémunération fixe mensuelle ; qu'il ne démontre pas davantage que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ou que ses décisions ont été justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en conséquence, il est suffisamment établi que la salariée a subi des agissements répétés de harcèlement moral, du mois de juin au mois d'octobre 2012, qui ont eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que par conséquent, l'employeur doit être condamné à payer à la salarié une somme de 5000€ à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral. (...) Sur la nullité de l'avenant du 3 septembre 2012 : En vertu de l'article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ; qu'au terme de l'article L. 1152-3 du Code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions relatives au harcèlement moral, toute disposition ou tout acte contraire est nul ; qu'en l'espèce, il a été démontré précédemment que la salariée a subi des faits répétés de harcèlement moral de la part de son employeur et que ce harcèlement l'a conduit à signer un avenant à son contrat de travail lui faisant perdre une partie de son salaire fixe mensuel ; que par conséquent, l'avenant au contrat de travail daté du 3 septembre 2012 est nul ;
1. ALORS QU'il est interdit aux juges de dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, le 29 juin 2012, Mme Y... avait signé sa lettre d'objectifs en précisant de façon manuscrite : « j'accepte les principes généraux du nouveau système de rémunération. Cependant je tiens à souligner mon souhait de réviser mon fixe à la juste valeur de mon secteur » ; qu'il en résultait une acceptation, par la salariée, du nouveau système de rémunération et notamment de la réduction de sa rémunération fixe, corrélative à l'institution de primes d'objectifs, tel que présentée en entretien le 19 juin 2012, même si la salariée souhaitait, pour l'avenir, voir engager une renégociation de son fixe ; qu'en jugeant cependant que l'acceptation de la lettre d'objectifs du 29 juin 2012 ne concernait que la part variable de la rémunération, pour en déduire que l'employeur avait unilatéralement modifié la rémunération fixe en juillet, août et septembre 2012, la cour d'appel a dénaturé cette lettre, en violation du principe susvisé et de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2. ALORS en tout état de cause QUE les parties peuvent conférer à un avenant un effet rétroactif ; qu'en l'espèce, l'avenant daté du 3 septembre 2012 déterminait « les nouvelles conditions [du] contrat de travail à compter du 01/07/2012 » et prévoyait notamment la rémunération fixe mensuelle de 2 170 €, ainsi qu'une rémunération variable dépendant des objectifs fixés par l'employeur ; qu'il était constant qu'après régularisation en octobre 2012, l'employeur avait effectivement versé à la salariée, pour les mois de juillet à septembre 2012, la rémunération fixe prévue par cet avenant ; qu'en jugeant cependant que l'employeur avait modifié unilatéralement la rémunération fixe en la réduisant dès le mois de juillet 2012, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
3. ALORS QU'il incombe au salarié d'établir, autrement que par ses seules affirmations, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard ; qu'en retenant en l'espèce l'existence d'un harcèlement moral, sur la seule base d'affirmations émanant de la salariée et de documents ne rapportant aucun agissement la concernant personnellement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
4. ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 5 |
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qu'en affirmant, par motifs éventuellement adoptés, que l'employeur ne contestait pas avoir fait subir des pressions à la salariée, avec menace implicite de licenciement afin qu'elle accepte une diminution de sa rémunération fixe mensuelle, quand la société Moulins Soufflet indiquait au contraire dans ses conclusions qu'elle « contest[ait] de nouveau les allégations fallacieuses de Mme Y... qui n'apport[ait] aucune preuve des menaces de licenciement à son encontre » (p. 15), qu'elle « contest[ait] les prétendues pressions à son encontre dont l'accus[ait] Mme Y... » (p. 17) puis, critiquant les motifs du conseil de prud'hommes sur ce point, répétait qu'elle « contestait expressément les prétendues pressions et menaces de licenciement évoquées par Mme Y... » (p. 18), la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'employeur, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
5. ALORS en toute hypothèse QUE l'existence d'un harcèlement moral suppose que soient caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant l'existence d'un harcèlement moral, sans avoir constaté d'autres agissements qu'une modification unilatérale de la rémunération fixe entre juillet et septembre 2012 et des pressions sur la salariée pour l'amener à signer l'avenant ratifiant cette modification, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'agissements répétés constitutifs de harcèlement moral et a violé l'article L. 1152-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Moulins Soufflet à payer à Mme Y... la somme de 9 341,50 euros à titre de rappel de salaires, congés payés inclus, sur la période du 1er juillet 2012 au 25 mai 2013,
AUX MOTIFS QUE l'avenant ayant modifié la rémunération fixe étant nul, Mme Y... est en droit d'obtenir un rappel de salaire du 1er juillet 2012 au 25 mai 2013 sur la base de la différence entre le salaire fixé imposé et le précédent, soit la somme de 9 341,50 euros, congés payés inclus ;
ALORS QUE l'employeur soulignait que les rémunérations fixe et variable de Mme Y... ne pouvaient être prises en compte de manière dissociée puisque le nouveau système de rémunération impliquait une baisse de rémunération fixe compensée par une augmentation importante de la rémunération variable de sorte que si, par extraordinaire, la nullité de l'avenant du 3 septembre 2012 était prononcée, seule la rémunération convenue avant le 1er juillet 2012 pourrait être octroyée à Mme Y..., ce qui limiterait le rappel de salaire à la somme de 2 194,6 € sur la période allant de juillet à septembre 2012 et à celle de 4 359,07 € sur la période allant d'octobre 2012 à juillet 2013 (conclusions d'appel, p. 22-23) ; qu'en accordant à la salariée un rappel de salaire sur la base de la différence entre le salaire fixé prévu par l'avenant annulé et le précédent, sans s'expliquer sur l'indivisibilité du système de rémunération invoquée par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Moulins Soufflet à payer à Mme Y... les sommes de 11 326,39 euros à titre de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires réalisées au-delà de la durée contractuelle, 1 132,63 euros au titre des congés payés afférents, et 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,
AUX MOTIFS QUE s'agissant des heures supplémentaires, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, mais qu'il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que Mme Y... soutient d'une part qu'elle n'a pas été réglée de ses horaires contractuels, d'autre part, qu'elle a effectué plus d'heures que celles contractuellement prévues ; (...) que sur les heures effectuées au-delà de la durée prévue par le contrat, Mme Y... communique des tableaux journaliers d'heures travaillées sur lesquels figurent l'heure de début 7h et l'heure de fin qui varie, de 15h à 20h, le plus souvent à 16h-16h30 ; que ne figurent qu'exceptionnellement un temps de pause repas ; qu'elle produit également les rapports d'activité journaliers sur lesquels sont portés les visites effectuées et les commandes et contacts pris, sans précision d'horaires ; que ces éléments sont suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que celui-ci se borne à relever que les rapports d'activité ne sont pas signés, qu'il existe quelques incohérences entre le tableau récapitulatif et les rapports d'activité et qu'il n'est pas crédible que Mme Y... n'ait pas fait de pause repas ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 6 |
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qu'il ne peut donc qu'être constaté que la société Moulins Soufflet, qui tout au long de la relation contractuelle n'a pas émis de réticences sur le fait que les rapports d'activité n'étaient pas signés, ne justifie pas des horaires effectivement réalisés par Mme Y... ; que, cependant, au regard des rapports journaliers d'activité communiqués et du fait que la salariée n'a pas comptabilisé de pause repas, il convient d'allouer à Mme Y... au titre des heures supplémentaires la somme de 11 326,39 euros, outre la somme de 1 132,63 euros au titre des congés payés afférents ;
ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt que si la salariée produisait des tableaux journaliers d'heures travaillées sur lesquels figuraient l'heure de début et l'heure de fin, il existait des incohérences entre ces tableaux et les rapports d'activités journaliers qu'elle versait également aux débats et en outre, la salariée n'avait en outre pas comptabilisé de pause repas dans ses tableaux journaliers ; qu'en jugeant cependant, en l'état de ces éléments contradictoires et incomplets, que ces éléments étaient suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur s'analysait en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamné la société Les Moulins Soufflet à payer à Mme Y... diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de complément d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et d'AVOIR ordonné le remboursement par la société Les Moulins Soufflet aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Mme Y... du jour de son licenciement à ce jour, à concurrence de 6 mois d'indemnités,
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Sophie Y... a été engagée par la société Moulins Soufflet, en qualité de responsable de secteur, par contrat de travail à durée indéterminée du 10 mars 2008 qui prévoyait qu'elle bénéficierait d'un salaire fixe brut mensuel de 2 600 euros sur une base de 35 heures hebdomadaires, porté à 2 800 euros à compter du 1er juin 2008, et d'un 13ème mois ; que le contrat précisait que la salariée se conformerait à l'horaire de son service et que la réduction du temps de travail serait appliquée par l'attribution de 10 jours de congés supplémentaires limitant ainsi la durée du travail à 1 840 heures travaillées par an ; qu'en 2012, la société Moulins Soufflet a décidé de mettre en place un nouveau système de rémunération pour l'ensemble de sa force commerciale ; que, le 19 juin 2012, la société Moulins Soufflet a présenté ce nouveau système au comité central d'entreprise qui a émis une opinion positive ; que, le 29 juin 2012, Mme Y... a signé sa lettre d'objectifs, en précisant toutefois que si elle acceptait les principes généraux du nouveau système de rémunération, elle tenait à souligner son souhait de réviser son fixe à la juste valeur de son secteur ; que Mme Y... a signé un avenant à son contrat de travail, daté du 3 septembre 2012, qui délimitait son secteur et prévoyait, au titre de sa rémunération, qu'elle percevrait un salaire brut mensuel fixe de 2 170 euros, base 35 heures, et une rémunération variable conditionnée par les objectifs qui seraient fixés unilatéralement par son employeur ; que, le 10 octobre 2012, elle a signé sa lettre d'objectifs ; qu'à compter du 25 octobre 2012, Mme Y... a été placée en arrêt de travail pour maladie en raison d'un état dépressif réactionnel ; que, par requête du 29 octobre 2012, Mme Y... a saisi le conseil de prud'hommes de Pontoise aux fins d'obtenir la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, la nullité du contrat signé le 10 octobre 2012, le versement de dommages et intérêts pour harcèlement moral et la condamnation de la société les Moulins Soufflet à lui payer les indemnités de fin de contrat ; qu'alors qu'elle se trouvait toujours en arrêt de travail, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, par courrier du 21 mai 2013 ainsi libellé : « Je vous informe par la présente que je souhaite mettre un terme à mon contrat de travail suite aux multiples pressions et menaces que j'ai subies de votre part pour signer un avenant dont je ne voulais pas. Ce que vous m'avez fait subir pendant des mois m'a terriblement affectée, à tel point que je n'ai pu reprendre mon travail depuis le mois d'octobre 2012, malgré une vaine tentative il y a quelques jours. Mon arrêt maladie prendra fin le 27 mai prochain, date à laquelle mon contrat sera rompu. | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 7 |
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Jamais je n'aurais pensé partir dans de telles conditions après tous les efforts que j'ai consentis ces 5 dernières années pour vous donner pleine et entière satisfaction dans mon travail (aucune heure supplémentaire ne m'a d'ailleurs jamais été payée). J'espère que vous ne me ferez aucune difficulté quant aux formalités de mon départ (solde de tout compte, certificat de travail) ' je ne veux plus de problème mais seulement tenter de me reconstruire. S'agissant du matériel professionnel (véhicule, ordinateur, téléphone), je me tiens à votre disposition pour vous les restituer » ; que sur la rupture, que la prise d'acte de la rupture par le salarié, en raison de faits qu'il reproche à son employeur, entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant ; que, toutefois, s'il convient de se prononcer sur la seule prise d'acte, il y a lieu de prendre en considération les manquements de l'employeur invoqués par le salarié, tant à l'appui de la demande de résiliation judiciaire, devenue sans objet, qu'à l'appui de la prise d'acte ; que Mme Y... se prévaut de quatre manquements commis par son employeur ; que, s'agissant de la modification unilatérale de son contrat de travail, Mme Y... fait grief à son employeur d'avoir violé son contrat de travail en lui payant, de juillet à septembre 2012, un salaire fixe de 1 895,13 euros au lieu de 2 994,93 euros ; que dans un mail du 5 octobre 2012 Mme Y... a répondu à son employeur que, compte tenu de son insistance et par crainte d'être licenciée, elle acceptait une baisse de rémunération fixe à condition qu'il ne soit pas inférieur à 1 990 euros ; que cette rémunération fixe n'apparaît sur les bulletins de paie qu'à partir du mois d'octobre 2012 ; que ces éléments établissent que, comme elle le prétend, elle n'a signé l'avenant daté du 3 septembre 2012 que le 10 octobre 2012, jour de signature de la lettre d'objectifs ; que la société Moulins Soufflet ne pouvant se prévaloir de la simulation présentée à Mme Y... au mois de juin 2012, qui n'a pas de valeur contractuelle, ni de l'acceptation de la lettre d'objectifs du 29 juin 2012, qui ne concerne que la part variable de la rémunération, c'est abusivement qu'en juillet, août et septembre 2012, elle a diminué la rémunération mensuelle fixe de Mme Y... au montant de 1 895,13 euros au lieu du montant contractuel de 2 994,93 euros imposant ainsi à la salariée une modification unilatérale de la structure de sa rémunération ; qu'alors que la différence de rémunération fixe était d'un montant de 3 299,40 euros, la société Moulins Soufflet n'a procédé à une régularisation que d'un montant de 941,79 euros ; que, s'agissant du harcèlement moral, aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » ; qu'en application de l'article L. 1154-1, dans sa version applicable à l'espèce, interprété à la lumière de la directive n 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'il a déjà été établi que la société Moulins Soufflet avait imposé à Mme Y... une baisse de sa rémunération fixe en juillet, août et septembre 2012 ; qu'il résulte du compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 4 septembre 2012 que la direction avait clairement déclaré qu'en cas de refus de signer les avenants elle devrait trouver un mode de rupture ; que Mme Y..., dans un long mail adressé à son avocat le 26 octobre 2013, relate les pressions subies depuis le 19 juin 2012 pour qu'elle accepte le changement de rémunérations, les multiples rendez-vous et entretiens qui lui ont été imposés, même le 29 juin à 7h dans un bar sur son secteur et les pressions exercées jusqu'au dernier moment pour qu'elle signe ; que ces propos sont corroborés par les attestations de Mme Z... et M. A... qui attestent avoir subi de nombreuses pressions pour obtenir qu'ils signent leurs avenants et par les courriers de M. B... des 8 novembre 2012 et 3 janvier 2013 dans lequel il décrit les demandes insistantes, l'existence de pas moins de 5 rencontres et finit par demander une rupture amiable ; qu'également, l'équipe commerciale a adressé le 4 octobre 2012 à la direction un courrier dénonçant le fait que certains commerciaux avaient signé les nouveaux contrats, contraints et forcés, et que les pressions continuaient pour obtenir la signature des autres ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 8 |
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qu'aussi, l'inspectrice du travail dans un courrier du 11 octobre 2012 a informé la société Moulins Soufflet de ce qu'elle avait été alertée par plusieurs salariés en état de souffrance morale en raison des pressions exercées par leur hiérarchie pour qu'ils signent les avenants ; que ces éléments mêmes généraux décrivent le contexte dans lequel l'entreprise a géré la modification du mode de rémunération et confirment, même s'ils ne la nomment pas, également la relation des circonstances faite par Mme Y... ; que le fait que Mme Y... a été placée en arrêt de travail pour maladie, pour syndrome dépressif, à compter du 23 octobre 2012, arrêt renouvelé jusqu'au mois de mai 2013 suffit à démontrer la réalité de la dégradation de son état de santé ; que ces faits pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu' il incombe donc à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le seul fait que, lors de son entretien d'évaluation le 7 juin 2012, Mme Y... ait fait part de sa satisfaction relative à l'évolution de son poste et à la confiance exprimée à son égard lors de sa grossesse et de son congé de maternité ne suffit pas à établir la preuve qui incombe à l'employeur ; qu'en outre, cet entretien est antérieur aux propositions de modification du mode de rémunération ; que faute pour l'employeur d'apporter la preuve qui lui incombe, le harcèlement moral est établi (...) ; que la réduction de sa rémunération fixe abusivement imposée à Mme Y... pendant trois mois, le harcèlement moral exercé à son égard afin qu'elle signe l'avenant modifiant son mode de rémunération et le non-paiement de ses heures supplémentaires rendaient impossible la poursuite de son contrat de travail ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture produirait les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme Y... qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ; qu'au regard de son âge au moment du licenciement, 33 ans, de son ancienneté d'environ 5 ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle et de la justification de ce qu'elle a retrouvé un emploi dès le 27 mai 2013, puis le contrat ayant été rompu le 27 octobre 2013 a perçu les allocations Pôle emploi et après avoir tenté de créer sa propre entreprise a été engagée en qualité d'attaché commercial, le préjudice matériel et moral subi sera réparé par l'allocation d'une somme de 25 000 euros ; que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a alloué à Mme Y... une indemnité conventionnelle de licenciement d'un montant de 4 569,68 euros ; qu'en revanche, dès lors que Mme Y... a perçu au titre de l'indemnité compensatrice de préavis la somme de 4 444,63 euros alors que son employeur lui était redevable de la somme de 6 854,52 euros outre les congés payés afférents, il lui sera alloué à titre de complément la somme de 3 095,34 euros, congés payés inclus ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné le remboursement par la société Moulins Soufflet aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Mme Y... du jour de son licenciement au jour du jugement à concurrence de six mois d'indemnités ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE En vertu de l'article L. 1231-1 du Code du travail, le contrat de travail peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Le salarié peut mettre fin au contrat de travail unilatéralement en raison de faits imputables à l'employeur ; que cette prise d'acte de la rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient, soit d'une démission dans le cas contraire ; que c'est au salarié de rapporter la preuve de ces manquements et de leur gravité ; qu'au terme du courrier daté du 21 mai 2013, la salariée a mis fin au contrat de travail aux motifs "suite aux multiples pressions et menaces que j'ai subi de votre part pour signer un avenant dont je ne voulais pas", précisant qu'elle n'a "pas pu reprendre son travail depuis le mois d'octobre 2012" étant "terriblement affectée" ; qu'en tout état de cause, il a été précédemment démontré que la salariée a perçu une base de rémunération fixe minorée pendant trois mois juillet à septembre 2012), sans accord de sa part, et qu'elle a subi pendant la même période des faits de harcèlement moral de la part de ses supérieurs hiérarchiques, avant d'être arrêtée pour maladie en octobre 2012 ; | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 9 |
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qu'en conséquence, les motifs évoqués au terme de la lettre de prise d'acte de la rupture sont justifiés et constituent des manquements de l'employeur à ses obligations ; que par conséquent, la prise d'acte de la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'un des trois premiers moyens entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a jugé que la prise d'acte de la rupture s'analysait en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamné la société Les Moulins Soufflet à payer à Mme Y... diverses sommes à ce titre, et ordonné le remboursement par la société Les Moulins Soufflet aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Mme Y... à concurrence de 6 mois d'indemnités, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Moulins Soufflet à payer à Mme Y... la somme de 21 563,50 euros au titre de la contrepartie financière de l'obligation de non concurrence, outre 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE sur la contrepartie de l'obligation de non-concurrence, l'avenant du 3 septembre 2012 ayant été annulé seul peut être invoqué le contrat de travail initial qui prévoyait qu'il était interdit à Mme Y... d'apporter son concours sous quelque forme que ce soit à une entreprise fabricant et/ou commercialisant des produits identiques à ceux de la société Moulins Soufflet et à s'intéresser directement ou indirectement à une telle entreprise pendant une durée de deux ans, sur la région d'exercice de son activité ; qu'il est établi que Mme Y... avait été engagée le 27 mai 2012 par Les Moulins Bourgeois, qui exerce son activité en Seine et Marne ; que dès lors qu'il n'est pas discuté que son secteur d'activité était le Val de Marne et que la société Moulins Soufflet n'établit pas qu'elle n'a pas respecté son obligation de concurrence, il convient, ajoutant au jugement, de faire droit à la demande de la salariée de ce chef ;
1. ALORS QUE la cassation de l'arrêt en ce qu'il a annulé l'avenant du 3 septembre 2012, à intervenir sur le premier moyen, entraînera la censure, par voie de conséquence, de l'arrêt en ce qu'il a condamné l'employeur, en se fondant sur cette annulation, au paiement de la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2. ALORS en toute hypothèse QUE l'article 10 du contrat de travail initial prévoyait : « une fois la période d'essai révolue, il vous sera interdit d'apporter votre concours sous quelque forme que ce soit à une entreprise fabricant et/ou commercialisant des produits identiques aux nôtres et [de] vous intéresser directement ou indirectement à une telle entreprise. Cet engagement est pris pour une durée de deux ans à compter de la cessation du présent contrat de travail quelle qu'en soit la cause originelle et s'appliquera sur la région où vous aurez exercé votre activité » ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le secteur d'activité de la salariée au sein de la société Moulins Soufflet était le Val-de-Marne, de sorte que la région concernée par l'interdiction contractuelle était l'Ile-de-France ; que la cour d'appel a également relevé que la société ayant engagé Mme Y... quelques jours après la prise d'acte de la rupture - et dont il était constant qu'elle fabriquait et/ou commercialisait des produits identiques à ceux de la société Moulins Soufflet - exerçait son activité en Seine-et-Marne ; qu'en jugeant cependant que Mme Y... n'avait pas violé la clause de non-concurrence, quand la Seine-et-Marne se trouve en Ile-de-France, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. | décision 17-10.588 du 28/03/2018, partie 10 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la société HLM Coutances-Granville, société anonyme, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2016 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Colette X..., domiciliée [...] ,
2°/ à la société MMA assurances IARD, dont le siège est [...] ,
3°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
La SMABTP a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 février 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme C..., conseiller rapporteur, M. Jardel, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme C..., conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société HLM Coutances-Granville, de Me D... , avocat de Mme X..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société MMA assurances IARD, de la SCP Odent et Poulet, avocat de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 6 décembre 2016), que, le 7 juillet 1994, la société HLM Coutances-Granville (la société HLM) a vendu à Mme X... un terrain à bâtir sur lequel celle-ci a fait construire un pavillon ; que le constructeur a souscrit une assurance dommages-ouvrage auprès de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) ; qu'à la suite d'apparition de fissures en 2002, la SMABTP a accordé sa garantie, après expertise amiable, et a indemnisé Mme X... pour ces dommages ; que les travaux de reprise par installation de micro-pieux ont été interrompus par la découverte sous la maison de canalisations en inéquation avec le plan de bornage du lot, annexé à l'acte de vente ; que, le 2 avril 2010, Mme X... a assigné la société HLM en dommages-intérêts sur le fondement du dol, puis, le 9 janvier 2012, la SMABTP en condamnation solidaire de la société HLM sur le fondement d'une faute contractuelle ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu que la société HLM fait grief à l'arrêt de déclarer l'action de Mme X... recevable ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la renonciation de Mme X... à un recours dans le document « acceptation d'indemnité » était limitée aux seuls désordres déclarés en 2002, distincts des réclamations présentées à la suite de la découverte du passage de canalisations d'eaux de pluies et usées sous la maison, la cour d'appel a souverainement retenu que Mme X... justifiait d'un intérêt à agir ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu que la société HLM fait grief à l'arrêt de retenir sa résistance dolosive et de la condamner in solidum avec la SMABTP à payer une provision et à garantir la SMABTP de toutes condamnations prononcées contre elle ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société HLM, qui était présente aux réunions de chantier, était informée que les canalisations implantées sous une parcelle avaient été déviées sous le terrain qu'elle avait ensuite vendu, en qualité de lotisseur, à Mme X... et que le plan de bornage, établi après ces travaux et annexé à l'acte de vente, ne faisait pas apparaître la servitude de passage liée à cette canalisation après son dévoiement et souverainement retenu que la société HLM, qui était un professionnel de l'aménagement et de la construction, ne pouvait arguer, ni de sa bonne foi, ni de son ignorance ou d'une erreur dans la production des documents joints à l'acte de vente et que son silence délibéré était destiné à conduire à la vente du terrain, la cour d'appel, qui, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que, du fait de sa réticence dolosive, la société HLM devait être déclarée responsable des préjudices subis par Mme X..., a légalement justifié sa décision ;
| décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 1 |
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Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres moyens du pourvoi principal et les moyens du pourvoi incident qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société HLM Coutances-Granville aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société HLM Coutances-Granville à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société HLM Coutances-Granville.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a déclaré recevable sous l'angle de l'intérêt l'action exercée par Madame X..., puis décidé, sur la demande de cette dernière, que la société HLM COUTANCES GRANVILLE était responsable des désordres subis par Madame Colette X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la Société d'HLM fait valoir que dès lors que des indemnités ont été versées par l'assureur décennal en réparation des désordres, Mme X... ne justifie plus d'un Intérêt à agir, seule la SMABTP, subrogée dans les droits du maitre d'ouvrage, ayant qualité ; que le document "acceptation d'indemnité" signée le 21 juin 2005 par Mme X..., précise que l'indemnité versée (97 785,40 €) correspond "aux réfections des désordres consistant en une forte fissuration de la Maçonnerie pignon Est, affaissement angle dallage, salon, déclaré le 14 février 2002" aux termes de ce document Mme X... "déclare formellement renoncer à toute réclamation ultérieure amiable ou judiciaire au titre de ce sinistre et de ses conséquences et subroge la SMABTP dans mes droits et action" ; que l'indemnisation et la renonciation à recours consécutive, porte ainsi que rappelé sur les désordres correspondant aux sinistres de fissuration déclarés en 2002, dont la cause selon les experts réside dans une insuffisance de remblais ; que la SMABTP, subrogée dans les droits de Mme X..., justifie bien, pour les indemnisations versées, d'un intérêt à agir aux lieu et place du maître de l'ouvrage ; que la renonciation à recours est donc limitée aux seuls désordres déclarés en 2002, distincts des réclamations présentées à la suite de la découverte du passage de canalisations EP sous la maison, en sorte que Mme X... et par voie de conséquence l'assureur dommage-ouvrage justifient d'un intérêt à agir ainsi que l'a retenu le tribunal, le jugement étant confirmé sur ce point » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « l'article 31 du Code de procédure civile énonce que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention. La SA HLM COUTANCES GRANVILLE oppose à la demanderesse son absence d'intérêt à agir résultant d'un protocole d'accord conclu le 21 juin 2005 entre Madame X... et la SMABTP, qui aurait désintéressé la première au profit de la seconde. En l'espèce, ce protocole d'accord a été établi entre la SMABTP, en sa qualité d'assureur dommage-ouvrage, et Madame X.... Il y est stipulé que cette dernière accepte l'indemnité définitive de 97.785,40 euros au titre des désordres sur l'ouvrage situé [...] . En contrepartie, elle « déclare formellement renoncer à toute réclamation ultérieure amiable ou judiciaire au titre de ce sinistre et de ses conséquences, et subroge la SMABTP dalle ses droits et actions contre toute personne physique ou morale pouvant être tenue à la réparation des dommages évoqués ci avant ». A ce titre, la SMABTP a effectué deux règlements â son profit, qui ne sont pas contestés par la demanderesse un règlement d'un montant de 80.752,39 euros (correspondance du 29 septembre.2004) et un règlement d'un montant de 17.033,01 euros (correspondance du 28 juin 2005). Pour autant, une telle indemnisation ne porte que sur les désordres visés par le protocole et couverts au titre de la garantie décennale. Aussi la présente instance relative à l'engagement de la responsabilité du vendeur sur le fondement du dol n'a-t-elle pas le mime objet, et ne saurait donc se voir opposer la conclusion d'un protocole visent des préjudices distincts. Par conséquent, Madame X... démontre un intérêt à agir contre la SA HLM COUTANCES GRANVILLE » ;
ALORS QUE, lorsqu'une partie ayant à l'origine intérêt à agir en réparation est indemnisée par un assureur, tel qu'un assureur dommages-ouvrage, à la faveur de la subrogation intervenue au moment du désintéressement, elle perd son droit à agir à raison des dommages ayant donné lieu à désintéressement ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que Madame X... avait été désintéressée s'agissant des désordres ayant donné lieu à déclaration le 4 février 2002 (fissures de la maçonnerie, affaissement d'un angle notamment) ; | décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 2 |
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que dès lors, il était exclu que les juges du fond puissent, dans leur dispositif, considérer que Madame X... était recevable à faire déclarer la société HLM COUTANCES GRANVILLE responsable de l'ensemble de ses préjudices ; qu'en déclarant Madame X... recevable pour énoncer ensuite que la société HLM COUTANCES GRANVILLE était responsable des préjudices subis par Madame X..., les juges du fond, qui n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations, ont violé l'article 31 du Code de procédure civile et l'article L. 121-12 du Code des assurances.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a décidé que la société HLM COUTANCES GRANVILLE était responsable, en raison de sa résistance dolosive, des préjudices subis par Madame Colette X..., puis condamné in solidum la société HLM COUTANCES GRANVILLE et la SMABTP à payer à Madame X... une provision de 20.000 euros, enfin condamné la société HLM COUTANCES GRANVILLE à garantir la SMABTP de toutes les condamnations prononcées contre cette dernière ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la victime de manoeuvres dolosive peut exercer une action en responsabilité délictuelle à l'encontre de l'auteur des manoeuvres afin d'obtenir réparation du préjudice subi ; que Mme X... produit à l'appui de ses prétentions une lettre de M. Y... en date du 20 novembre 2006, expliquant qu'il a fait l'acquisition en 1989 auprès de la Société du lot nu 5 du lotissement pour y construire sa maison ; qu'en raison d'une erreur des constructeurs, cette maison s'est trouvée implantée pour partie sur le rat n° 4 qui était encore la propriété de la société d'HLM, cette construction étant en outre réalisée au-dessus de collecteurs EU et EP ; pour remédier à cette erreur et afin de ne pas démolir l'immeuble construit, la société d'HLM a fait procéder au, découpage de la parcelle n°[...] en deux parcelles devenue n° [...] et n°[...], c'est ainsi que la parcelle n° [...] a été cédée par la société d'HLM à M et Mme Y... en 1991 au prix de 23 287,04 F ; que la parcelle [...] étant cédée en 1994 à Mme X... ; qu'il ressort de la correspondance du 20 novembre 2006, dont les termes sont confirmés par les photographies de chantier produites et le planning de travaux do mars 1990 (pièce 20 de l'appelante) que les canalisations passant sous l'immeuble de M et Mme Y... ont été déviées pour être implantées sous la nouvelle parcelle [...] alors Propriété de la société d'HLM, Cette dernière qui, selon l'acte de vente du 28 février et 13 mars 1991 (portant sur la cession de la parcelle [...]) a conclu un protocole d'accord avec la SMABTP concernant le règlement du sinistre consécutif à l'erreur d'implantation de la maison de M. et Mme Y..., a nécessairement accepté en sa qualité de lotisseur la réalisation sur son lot n°[...] des travaux de déviation des canalisations et en était parfaitement informée, ce que confirme s'il en était besoin, la présence aux réunions de chantier de ces travaux (pièce 20) de M. Z..., géomètre qui a établi les plans de bornage des lots après ce sinistre ; lorsque la société d'HLM a fait établir un nouveau cahier des charges du lotissement, tenant compte du découpage du lot [...], le plan de bornage établi par M. Z... ne faisait pas apparaitre la servitude de passage de la canalisation EU EP après leur dévoiement et c'est ce plan qui 'a été annexé à l'acte de vente de Mme X... ; que par ailleurs, Mme X... produit la lettre de M. A..., propriétaire de la parcelle jouxtant la parcelle [...], confirmant après M. Y..., que la société d'HLM lui avait proposé à rachat la moitié de parcelle n° [...] d'une surface de 250 m2 au prix de 25000 F soit pratiquement le même prix que la parcelle [...] cédée aux époux Y... d'une surface de 117 m2 (vendue 23 000 F) un prix dérisoire ; qu'il ressort de ces éléments que la société d'FILM, qui est un professionnel de l'aménagement et de la construction, souhaitait vendre la parcelle n° [...] y compris à un prix inférieur au marché, elle ne peut dès lors arguer de sa bonne foi et de son ignorance ou d'une erreur dans la production des documents joints à l'acte de vente de Mme X... ; au vu des éléments produits, le silence gardé par la société venderesse constitue bien une réticence dolosive délibérée, destinée à conduire à la vente du terrain, qui n'aurait pas été réalisée ou n'aurait pas été réalisée aux mêmes conditions, si Mme X... avait eu connaissance des travaux réalisés et du passage de collecteurs sous sa parcelle, le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de dommages et intérêts fondée sur le dol et la société d'HLM Coutances Granvillle sera déclarée responsable du préjudice consécutif à cette vente, le jugement étant infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... » ;
| décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 3 |
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ALORS QUE, PREMIEREMENT, en retenant une réticence dolosive à la charge de la société HLM COUTANCES GRANVILLE, sans s'expliquer, comme il le leur était demandé, s'agissant de la présence des canalisations sur le terrain, sur la clause de l'acte authentique mentionnant que l'acquéreur était informé de la servitude de canalisation d'eaux pluviales et usées grevant la parcelle (conclusions du 1er septembre 2016, p. 10, § 4), pour rechercher si ces circonstances n'excluaient pas l'existence d'une tromperie imputable à la société HLM COUTANCES GRANVILLE, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1116 du Code civil (article 1137 nouveau du Code civil) et 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil) ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et de la même manière, en s'abstenant de rechercher, comme il le leur était demandé, si la clause de l'acte authentique de vente mentionnant que l'acquéreur était informé de la servitude de canalisation d'eaux pluviales et usées grevant la parcelle n'excluaient l'existence d'une erreur de l'acquéreur, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1116 du Code civil (article 1137 nouveau du Code civil) et 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil).
ALORS QUE, TROISIEMEMENT, et s'agissant de la localisation des canalisations, en s'abstenant de rechercher, comme il le leur était demandé, si la circonstance que le plan sur la base duquel la vente était intervenue avait été établi par un géomètre expert, qu'il avait été annexé à l'acte de vente par le notaire chargé de la vente et que la société HLM COUTANCES GRANVILLE n'ait pas connaissance de la position exacte des canalisations (conclusions, p. 11, § 4-7) n'excluait pas toute manoeuvre dolosive, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1116 du Code civil (article 1137 nouveau du Code civil) et 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil).
ET ALORS QUE, QUATRIEMEMENT, et de la même manière, en retenant l'existence d'un dol sans rechercher, comme il le leur était demandé, si la circonstance que le plan sur la base duquel la vente était intervenue avait été établi par un géomètre expert, qu'il avait été annexé à l'acte de vente par le notaire chargé de la vente et que la société HLM COUTANCES GRANVILLE n'ait pas connaissance de la position exacte des canalisations (conclusions, p. 11, § 4-7) n'excluait pas toute intention dolosive, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1116 du Code civil (article 1137 nouveau du Code civil) et 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil).
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a décidé que la société HLM COUTANCES GRANVILLE était responsable, en raison de sa résistance dolosive, des préjudices subis par Madame Colette X..., puis condamné in solidum la société HLM COUTANCES GRANVILLE et la SMABTP à payer à Madame X... une provision de 20.000 euros, enfin condamné la société HLM COUTANCES GRANVILLE à garantir la SMABTP de toutes les condamnations prononcées contre cette dernière, ensemble prescrit une expertise pour identifier les dommages subis, en déceler l'origine, en décrire les caractéristiques et proposer des solutions ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la victime de manoeuvres dolosive peut exercer une action en responsabilité délictuelle à l'encontre de l'auteur des manoeuvres afin d'obtenir réparation du préjudice subi ; que Mme X... produit à l'appui de ses prétentions une lettre de M. Y... en date du 20 novembre 2006, expliquant qu'il a fait l'acquisition en 1989 auprès de la Société du lot nu [...] du lotissement pour y construire sa maison ; qu'en raison d'une erreur des constructeurs, cette maison s'est trouvée implantée pour partie sur le rat n° [...] qui était encore la propriété de la société d'HLM, cette construction étant en outre réalisée au-dessus de collecteurs EU et EP ; pour remédier à cette erreur et afin de ne pas démolir l'immeuble construit, la société d'HLM a fait procéder au, découpage de la parcelle [...] en deux parcelles devenue n° 12 et n'13, c'est ainsi que la parcelle n° [...] a été cédée par la société d'HLivi à M et Mme Y... en 1991 au prix de 23 287,04 F ; que la parcelle [...] étant cédée en 1994 à Mme X... ; | décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 4 |
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qu'il ressort de la correspondance du 20 novembre 2006, dont les termes sont confirmés par les photographies de chantier produites et le planning de travaux do mars 1990 (pièce 20 de l'appelante) que les canalisations passant sous l'immeuble de M et Mme Y... ont été déviées pour être implantées sous la nouvelle parcelle [...] alors Propriété de la société d'HLM, Cette dernière qui, selon l'acte de vente du 28 février et 13 mars 1991 (portant sur la cession de la parcelle [...]) a conclu un protocole d'accord avec la SMABTP concernant le règlement du sinistre consécutif à l'erreur d'implantation de la maison de M. et Mme Y..., a nécessairement accepté en sa qualité de lotisseur la réalisation sur son lot n°13 des travaux de déviation des canalisations et en était parfaitement informée, ce que confirme s'il en était besoin, la présence aux réunions de chantier de ces travaux (pièce 20) de M. Z..., géomètre qui a établi les plans de bornage des lots après ce sinistre ; lorsque la société d'HLM a fait établir un nouveau cahier des charges du lotissement, tenant compte du découpage du lot 4, le plan de bornage établi par M. Z... ne faisait pas apparaitre la servitude de passage de la canalisation EU EP après leur dévoiement et c'est ce plan qui 'a été annexé à l'acte de vente de Mme X... ; que par ailleurs, Mme X... produit la lettre de M. A..., propriétaire de la parcelle jouxtant la parcelle [...], confirmant après M. Y..., que la société d'HLM lui avait proposé à rachat la moitié de parcelle n° [...] d'une surface de 250 m2 au prix de 25000 F soit pratiquement le même prix que la parcelle [...] cédée aux époux Y... d'une surface de 117 m2 (vendue 23 000 F) un prix dérisoire ; qu'il ressort de ces éléments que la société d'FILM, qui est un professionnel de l'aménagement et de la construction, souhaitait vendre la parcelle n° [...] y compris à un prix inférieur au marché, elle ne peut dès lors arguer de sa bonne foi et de son ignorance ou d'une erreur dans la production des documents joints à l'acte de vente de Mme X... ; au vu des éléments produits, le silence gardé par la société venderesse constitue bien une réticence dolosive délibérée, destinée à conduire à la vente du terrain, qui n'aurait pas été réalisée ou n'aurait pas été réalisée aux mêmes conditions, si Mme X... avait eu connaissance des travaux réalisés et du passage de collecteurs sous sa parcelle, le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de dommages et intérêts fondée sur le dol et la société d'HLM Coutances Granvillle sera déclarée responsable du préjudice consécutif à cette vente, le jugement étant infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, dans l'hypothèse où elle décide d'exercer une action en réparation, la victime d'un dol ou d'une réticence dolosive est seulement autorisée à demander à être rétablie dans la situation qui était la sienne si elle n'avait pas contracté, ou qui aurait été la sienne si elle avait contracté dans d'autres conditions ; que dans ce contexte, le préjudice susceptible d'être réparé ne peut s'entendre que d'une perte de chance, qu'il s'agisse de la chance de ne pas contracter, ou de la chance de contracter à des conditions différentes ; que le juge ne saurait octroyer une réparation allant au-delà du dommage qui peut être imputé au défendeur ; qu'en déclarant la société HLM COUTANCES GRANVILLE responsable de tous les préjudices subis par Madame X..., sans s'assurer qu'ils entraient dans le champ de la perte de chance susceptible d'être rattachée à la réticence dolosive, et en s'attachant à exclure tous autres dommages ; les juges d'appel ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1116 du Code civil (article 1137 nouveau du Code civil) et 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil) ;
ET ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, ayant retenu l'existence d'une réticence dolosive à l'encontre de la société HLM COUTANCES GRANVILLE, les juges du fond ne pouvaient décider, en une formule générale, ne comportant aucune restriction, que la société HLM COUTANCES GRANVILLE était responsable de tous les préjudices subis par Madame X..., quand ils prescrivaient dans le même temps une expertise à l'effet d'identifier les préjudices, d'en déceler l'origine, d'en décrire les caractéristiques ; qu'en statuant de la sorte, les juges du fond ont violé les articles 1116 du Code civil (article 1137 nouveau du Code civil) et 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil).
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;
| décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 5 |
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EN CE QU'il a décidé que la société HLM COUTANCES GRANVILLE était responsable, en raison de sa résistance dolosive, des préjudices subis par Madame Colette X..., puis condamné in solidum la société HLM COUTANCES GRANVILLE et la SMABTP à payer à Madame X... une provision de 20.000 euros, enfin condamné la société HLM COUTANCES GRANVILLE à garantir la SMABTP de toutes les condamnations prononcées contre cette dernière, ensemble prescrit une expertise pour identifier les dommages subis, en déceler l'origine, en décrire les caractéristiques et proposer des solutions ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la victime de manoeuvres dolosive peut exercer une action en responsabilité délictuelle à l'encontre de l'auteur des manoeuvres afin d'obtenir réparation du préjudice subi ; que Mme X... produit à l'appui de ses prétentions une lettre de M. Y... en date du 20 novembre 2006, expliquant qu'il a fait l'acquisition en 1989 auprès de la Société du lot nu 5 du lotissement pour y construire sa maison ; qu'en raison d'une erreur des constructeurs, cette maison s'est trouvée implantée pour partie sur le rat n° 4 qui était encore la propriété de la société d'HLM, cette construction étant en outre réalisée au-dessus de collecteurs EU et EP ; pour remédier à cette erreur et afin de ne pas démolir l'immeuble construit, la société d'HLM a fait procéder au, découpage de la parcelle [...] en deux parcelles devenue n° 12 et n'13, c'est ainsi que la parcelle n° [...] a été cédée par la société d'HLivi à M et Mme Y... en 1991 au prix de 23 287,04 F ; que la parcelle [...] étant cédée en 1994 à Mme X... ; qu'il ressort de la correspondance du 20 novembre 2006, dont les termes sont confirmés par les photographies de chantier produites et le planning de travaux do mars 1990 (pièce 20 de l'appelante) que les canalisations passant sous l'immeuble de M et Mme Y... ont été déviées pour être implantées sous la nouvelle parcelle [...] alors Propriété de la société d'HLM, Cette dernière qui, selon l'acte de vente du 28 février et 13 mars 1991 (portant sur la cession de la parcelle [...]) a conclu un protocole d'accord avec la SMABTP concernant le règlement du sinistre consécutif à l'erreur d'implantation de la maison de M. et Mme Y..., a nécessairement accepté en sa qualité de lotisseur la réalisation sur son lot n°[...] des travaux de déviation des canalisations et en était parfaitement informée, ce que confirme s'il en était besoin, la présence aux réunions de chantier de ces travaux (pièce 20) de M. Z..., géomètre qui a établi les plans de bornage des lots après ce sinistre ; lorsque la société d'HLM a fait établir un nouveau cahier des charges du lotissement, tenant compte du découpage du lot [...], le plan de bornage établi par M. Z... ne faisait pas apparaitre la servitude de passage de la canalisation EU EP après leur dévoiement et c'est ce plan qui 'a été annexé à l'acte de vente de Mme X... ; que par ailleurs, Mme X... produit la lettre de M. A..., propriétaire de la parcelle jouxtant la parcelle [...], confirmant après M. Y..., que la société d'HLM lui avait proposé à rachat la moitié de parcelle n° [...] d'une surface de 250 m2 au prix de 25000 F soit pratiquement le même prix que la parcelle [...] cédée aux époux Y... d'une surface de 117 m2 (vendue 23 000 F) un prix dérisoire ; qu'il ressort de ces éléments que la société d'FILM, qui est un professionnel de l'aménagement et de la construction, souhaitait vendre la parcelle n° [...] y compris à un prix inférieur au marché, elle ne peut dès lors arguer de sa bonne foi et de son ignorance ou d'une erreur dans la production des documents joints à l'acte de vente de Mme X... ; au vu des éléments produits, le silence gardé par la société venderesse constitue bien une réticence dolosive délibérée, destinée à conduire à la vente du terrain, qui n'aurait pas été réalisée ou n'aurait pas été réalisée aux mêmes conditions, si Mme X... avait eu connaissance des travaux réalisés et du passage de collecteurs sous sa parcelle, le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de dommages et intérêts fondée sur le dol et la société d'HLM Coutances Granvillle sera déclarée responsable du préjudice consécutif à cette vente, le jugement étant infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... » ;
ALORS QUE, en cas de condamnation in solidum et dès lors que l'un des co-obligés n'est tenu que du préjudice résultant de la perte de chance, il est exclu que la condamnation in solidum puisse porter sur la totalité du préjudice ; que partie qui se rend coupable d'un dol ou d'une réticence dolosive est seulement tenue de la réparation d'une perte de chance ; qu'il était dès lors exclu que la société HLM COUTANCES GRANVILLE puisse être tenue à réparer le tout, aux côtés de la SMABTP ; | décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 6 |
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qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 1116 du Code civil (article 1137 nouveau du Code civil) et 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil).
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a déclaré la société HLM COUTANCES GRANVILLE responsable de tous les dommages subis par Madame X..., condamné in solidum la société HLM COUTANCES GRANVILLE avec la SMABTP à réparer ces préjudices et décidé que la société HLM COUTANCES GRANVILLE devait garantir intégralement la SMABTP des condamnations susceptibles d'être prononcées à son égard ;
AUX MOTIFS TOUT D'ABORD QU' « au regard des fautes respectives relevées, les fautes de la société d'HLM Coutances Granville, outre leur caractère intentionnel sont directement à l'origine des sinistres, Il convient en conséquence de la condamner è relever et garantir intégralement la SMABTP de toutes les condamnations prononcées à son encontre » ;
AUX MOTIFS EGALEMENT QUE « la victime de manoeuvres dolosive peut exercer une action en responsabilité délictuelle à l'encontre de l'auteur des manoeuvres afin d'obtenir réparation du préjudice subi ; que Mme X... produit à l'appui de ses prétentions une lettre de M. Y... en date du 20 novembre 2006, expliquant qu'il a fait l'acquisition en 1989 auprès de la Société du lot nu 5 du lotissement pour y construire sa maison ; qu'en raison d'une erreur des constructeurs, cette maison s'est trouvée implantée pour partie sur le rat n° 4 qui était encore la propriété de la société d'HLM, cette construction étant en outre réalisée au-dessus de collecteurs EU et EP ; pour remédier à cette erreur et afin de ne pas démolir l'immeuble construit, la société d'HLM a fait procéder au, découpage de la parcelle [...] en deux parcelles devenue n° 12 et n'13, c'est ainsi que la parcelle n° [...] a été cédée par la société d'HLM à M et Mme Y... en 1991 au prix de 23 287,04 F ; que la parcelle [...] étant cédée en 1994 à Mme X... ; qu'il ressort de la correspondance du 20 novembre 2006, dont les termes sont confirmés par les photographies de chantier produites et le planning de travaux do mars 1990 (pièce 20 de l'appelante) que les canalisations passant sous l'immeuble de M et Mme Y... ont été déviées pour être implantées sous la nouvelle parcelle [...] alors Propriété de la société d'HLM, Cette dernière qui, selon l'acte de vente du 28 février et 13 mars 1991 (portant sur la cession de la parcelle [...]) a conclu un protocole d'accord avec la SMABTP concernant le règlement du sinistre consécutif à l'erreur d'implantation de la maison de M. et Mme Y..., a nécessairement accepté en sa qualité de lotisseur la réalisation sur son lot n°13 des travaux de déviation des canalisations et en était parfaitement informée, ce que confirme s'il en était besoin, la présence aux réunions de chantier de ces travaux (pièce 20) de M. Z..., géomètre qui a établi les plans de bornage des lots après ce sinistre ; lorsque la société d'HLM a fait établir un nouveau cahier des charges du lotissement, tenant compte du découpage du lot 4, le plan de bornage établi par M. Z... ne faisait pas apparaitre la servitude de passage de la canalisation EU EP après leur dévoiement et c'est ce plan qui 'a été annexé à l'acte de vente de Mme X... ; que par ailleurs, Mme X... produit la lettre de M. A..., propriétaire de la parcelle jouxtant la parcelle [...], confirmant après M. Y..., que la société d'HLM lui avait proposé à rachat la moitié de parcelle n° [...] d'une surface de 250 m2 au prix de 25000 F soit pratiquement le même prix que la parcelle [...] cédée aux époux Y... d'une surface de 117 m2 (vendue 23 000 F) un prix dérisoire ; qu'il ressort de ces éléments que la société d'FILM, qui est un professionnel de l'aménagement et de la construction, souhaitait vendre la parcelle n° [...] y compris à un prix inférieur au marché, elle ne peut dès lors arguer de sa bonne foi et de son ignorance ou d'une erreur dans la production des documents joints à l'acte de vente de Mme X... ; au vu des éléments produits, le silence gardé par la société venderesse constitue bien une réticence dolosive délibérée, destinée à conduire à la vente du terrain, qui n'aurait pas été réalisée ou n'aurait pas été réalisée aux mêmes conditions, si Mme X... avait eu connaissance des travaux réalisés et du passage de collecteurs sous sa parcelle, le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de dommages et intérêts fondée sur le dol et la société d'HLM Coutances Granvillle sera déclarée responsable du préjudice consécutif à cette vente, le jugement étant infirmé en ce qu'il a débouté Mme X... » ;
| décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 7 |
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ET AUX MOTIFS ENCORE QUE « l 'assureur dommages ouvrage de la construction du pavillon de Mme X..., la SMABTP, se trouve avoir été également l'assureur dommages ouvrage de la construction du pavillon de 'VI et Mme Y..., li ressort de l'acte de vente de la parcelle [...] à M et Mme Y... que la SMABTP est intervenue à la suite de la découverte des désordres résultant de l'erreur d'implantation de l'immeuble des époux Y..., qu'elle a régularisé avec la société d'HLM un protocole d'accord, dont les termes n'ont pas été communiqués, versant une Indemnité destinée au rachat de la parcelle, la SMABTP ne pouvait ignorer le dévoiement des canalisations EU/ EP rendue nécessaire par l'erreur d'implantation de la maison, elle avait parfaite connaissance de la situation de la parcelle [...] et du risque concernant le sol où la construction a été réalisée ; que si les investigations réalisées dans le cadre de l'expertise dommages ouvrage avaient été réalisées de manière complète, la cause des désordres aurait pu être déterminée bien avant 2006 de même que les travaux de reprise auraient pu être définis de manière adaptée réduisant les coûts engendrés par le sinistre ; alors que le maître d'ouvrage, garanti par la police dommages-ouvrage, est en droit d'obtenir le préfinancement des travaux de nature à mettre fin aux désordres, en ne faisant pas procéder à des investigations poussées alors que les entreprises émettaient des réserves sur les travaux préconisés, la SMASTP a engagé sa responsabilité personnelle sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil ; que la société SMABTP dont la responsabilité contractuelle de droit commun est engagée, ne peut valablement opposer à Mme X... la garantie biennale du code des Assurances, ra prescription n'a couru qu'à compter du jour où Mme X... a eu connaissance du manquement par la société SMABTP à ses obligations, c'est à dire au plus tôt à la date du 20 novembre 2006 date de la correspondance de M. Y... informant du sinistre indemnisé par la SMABTP et éventuellement en décembre 2009 date de communication des plans de réseaux ; en sorte que I'action en responsabilité contractuelle de l'appelante qui a commencé à courir au plus tôt le 20 novembre 2006 n'était pas prescrite lors de l'assignation délivrée le 6 août 2012, du fait de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin .2008 portant réforme de la prescription, la prescription n'étant acquise qu'en novembre 2013 » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, lorsque deux personnes sont tenues in solidum à réparer, la répartition du dommage entre ces deux personnes s'effectue en considération de la gravité des fautes respectives ; qu'après avoir admis en l'espèce l'existence de faute à la charge de la société HLM COUTANCES GRANVILLE et de la SMABTP, les juges du fond ont noté que la faute de la société HLM COUTANCES GRANVILLE était intentionnelle mais n'ont procédé à aucune comparaison quant à la faute imputée à la SMABTP ; qu'en se bornant à constater la coexistence de fautes, sans les rapprocher pour les comparer et se prononcer sur leur gravité respective, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des règles gouvernant la contribution à la dette entre débiteurs in solidum, ensemble l'article 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil).
ET ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, la répartition ne peut porter que sur les dommages dont les deux co-obligés in solidum sont l'un et l'autre tenus à raison du lien de cause à effet entre leur comportement et le préjudice ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point en prenant en compte notamment le fait que la société HLM COUTANCES GRANVILLE n'est tenue que de réparer une perte de chance, de ne pas contracter ou de contracter à moindre coût, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard des règles gouvernant la contribution à la dette entre débiteurs in solidum, ensemble l'article 1382 du Code civil (article 1240 nouveau du Code civil).
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
II est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement qui avait déclaré irrecevable Mme X... en sa demande contre la SMABTP;
AUX MOTIFS QUE «Mme X... sollicite également la condamnation de la SMABTP à l'indemniser sur le fondement de la responsabilité contractuelle propre de l'assureur du fait de la faute commise par celui-ci et à défaut au titre de la garantie décennale. Elle fait valoir que la prescription biennale ne peut lui être opposée dès lors que le contrat d'assurance ne contient pas un rappel complet des dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances. Elle expose que la mise en cause de la responsabilité de l'assureur ne constitue pas une demande nouvelle dans la mesure où cette prétention tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge. | décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 8 |
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Au titre la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances, la SMABTP oppose à Mme X... l'irrecevabilité de la demande tendant à être garantie au titre de la police dommages ouvrage, faisant valoir d'une part que si l'on doit considérer qu'il s'agit de désordres nouveaux, ils n ‘ont pas fait l'objet d'une déclaration de sinistre dans les formes prévues aux articles L. 242-1 et A. 243-1 et son annexe II du code des assurances, d'autre part que si l'on considère qu'il s'agit du même sinistre, la demande fondée sur la responsabilité propre de l'assureur, est une demande nouvelle. Enfin elle oppose les limites garanties de la police. Les demandes portent ainsi que le soutient l'appelante sur le même dommage, à savoir les fissurations liées à une insuffisance de fondations, puisque le défaut de remblais cause immédiate des désordres est consécutive à la réalisation des travaux de canalisation d'eaux pluviales. La demande de réparation formée sur la responsabilité de l'assureur ne constitue pas une demande nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile puisqu ‘il s'agit pour l'appelante de soutenir un moyen nouveau à l'appui de sa demande de réparation, la demande est dès lors recevable. La prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances ne saurait être envisagée que pour autant que la responsabilité propre de l'assureur sur laquelle Mme X... fonde sa demande, n'est pas engagée. A la suite de la déclaration de sinistre faite par Mme X..., la société SMABTP qui a accordé sa garantie, a désigné le cabinet Saretec afin de déterminer la nature, l'origine des désordres, le coût des réparations et identifier les constructeurs responsables. La société Saretec a, de son côté, sollicité de la société Fondouest une étude de sol, qui a été menée le 25 juin 2002, laquelle a fait procéder à des sondages révélant un remblai instable et l'insuffisance de fondations. Les investigations et préconisations faites dans le cadre de I‘expertise dommages ouvrage se sont révélées insuffisantes, c'est ainsi que le 16 février 2006, la société SPIEI Batignolles, pressentie pour faire les travaux de reprise a précisé qu ‘après avoir réalisé des sondages de vérification elle avait constaté que « les données concernant les fondations n ‘étaient pas conformes à ses (nos) éléments et remettaient en cause le mode opératoire ». Il ressort du rapport de M. B..., maître d'oeuvre, en date du 28 décembre 2011, qu'après versement des indemnités d ‘assurance, les entreprises ont refusé de réaliser les travaux de reprise en sous oeuvre préconisés dès lors qu‘a été découverte la présence du collecteur, la solution préconisée étant la démolition de la maison pour en reconstruire une autre. L'assureur dommages ouvrage de la construction du pavillon de Mme X..., la SMABTP, se trouve avoir été également l'assureur dommages ouvrage de la construction du pavillon de M et Mme Y.... Il ressort de l'acte de vente de la parcelle [...] à M et Mme Y... que la SMABTP est intervenue à la suite de la découverte des désordres résultant de l'erreur d'implantation de l'immeuble des époux Y..., qu'elle a régularisé avec la société d'HLM un protocole d'accord, dont les termes n'ont pas été communiqués, versant une indemnité destinée au rachat de la parcelle, la SM4BTP ne pouvait ignorer le dévoiement des canalisations EU/EF rendue nécessaire par l'erreur d'implantation de la maison, elle avait parfaite connaissance de la situation de la parcelle n° [...] et du risque concernant le sol où la construction a été réalisée. Si les investigations réalisées dans le cadre de l'expertise dommages ouvrage avaient été réalisées de manière complète, la cause des désordres aurait pu être déterminée bien avant 2006 de même que les travaux de reprise auraient pu être définis de manière adaptée réduisant les coûts engendrés par le sinistre alors que le maître d'ouvrage, garanti par la police dommages-ouvrage, est en droit d'obtenir le préfinancement des travaux de nature à mettre fin aux désordres, en ne faisant pas procéder à des investigations poussées alors que les entreprises mettaient des réserves sur les travaux préconisés, la SMABTP a engagé sa responsabilité personnelle sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil. La société SMABTP dont la responsabilité contractuelle de droit commun est engagée, ne peut valablement opposer à Mme X... la garantie biennale du code des assurances, la prescrjption n'a couru qu'à compter du jour où Mme X... a eu connaissance du manquement par la société SMABTP à ses obligations, c'est à-dire au plus tôt à la date du 20 novembre 2006 date de la correspondance de M Y... informant du sinistre indemnisé par la SMABTP et éventuellement en décembre 2009 date de communication des plans de réseaux ; | décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 9 |
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en sorte que l'action en responsabilité contractuelle de l'appelante qui a commencé à courir au plus tôt le 20novembre 2006 n ‘était pas prescrite lors de l'assignation délivré le 6 août 2012, du fait de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant reforme de la prescription, la prescription n ‘étant acquise qu'en novembre 2013. La SMABTP ayant engagé sa responsabilité propre et non pas en tant qu'assureur en police dommages ouvrage, Mme X... n ‘était pas tenue de régulariser une nouvelle déclaration de sinistre et le moyen sera rejeté, de même que n‘étant pas tenue sur le fondement de la garantie décennale, la SMABTP ne peut valablement opposer le plafond de garantie figurant au contrat » ;
ALORS QU'en vertu de l'article L. 114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ; que la prescription biennale est applicable lorsque l'assuré invoque l'existence de manquements contractuels imputables à l'assureur ; qu'en jugeant que la prescription biennale n'était pas applicable à la responsabilité de la SMABTP recherchée par son assurée, Mme X..., sur le fondement de prétendus manquements contractuels, la cour d'appel a violé l'article L. 114-1 du code des assurances.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR décidé que la SMABTP était responsable des préjudices subis par Mme X... et de l'avoir condamnée in solidum avec la société HLM Coutances Granville à payer à Mme X... une provision de 20 000 €, ensemble prescrit une expertise pour identifier les dommages subis, en déceler l'origine, en décrire les caractéristiques et proposer des solutions
AUX MOTIFS QUE «Mme X... sollicite également la condamnation de la SMABTP à l'indemniser sur le fondement de la responsabilité contractuelle propre de l'assureur du fait de la faute commise par celui-ci et à défaut au titre de la garantie décennale. Elle fait valoir que la prescription biennale ne peut lui être opposée dès lors que le contrat d'assurance ne contient pas un rappel complet des dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances. Elle expose que la mise en cause de la responsabilité de l'assureur ne constitue pas une demande nouvelle dans la mesure où cette prétention tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge. Au titre la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances, la SMABTP oppose è Mme X... l'irrecevabilité de la demande tendant à être garantie au titre de la police dommages ouvrage, faisant valoir d'une part que si l'on doit considérer qu'il s'agit de désordres nouveaux, ils n'ont pas fait l'objet d'une déclaration de sinistre dans les formes prévues aux articles L. 242-1 et A. 243-1 et son annexe II du code des assurances, d'autre part que si l'on considère qu'il s'agit du même sinistre, la demande fondée sur la responsabilité propre de l'assureur, est une demande nouvelle. Enfin elle oppose les limites garanties de la police. Les demandes portent ainsi que le soutient l'appelante sur le même dommage, à savoir les fissurations liées à une insuffisance de fondations, puisque le défaut de remblais cause immédiate des désordres est consécutive à la réalisation des travaux de canalisation d'eaux pluviales. La demande de réparation formée sur la responsabilité de l'assureur ne constitue pas une demande nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile puisqu‘il s'agit pour l'appelante de soutenir un moyen nouveau à l'appui de sa demande de réparation, la demande est dès lors recevable. La prescription biennale de l'article L. 114-I du code des assurances ne saurait être envisagée que pour autant que la responsabilité propre de l'assureur sur laquelle Mme X... fonde sa demande, n'est pas engagée. A la suite de la déclaration de sinistre faite par Mme X..., la société SMABTP qui a accordé sa garantie, a désigné le cabinet Saretec afin de déterminer la nature, l'origine des désordres, le coût des réparations et identifier les constructeurs responsables. La société Saretec a, de son côté, sollicité de la société Fondouest une étude de sol, qui a été menée le 25 juin 2002, laquelle a fait procéder à des sondages révélant un remblai instable et l'insuffisance de fondations. Les investigations et préconisations faites dans le cadre de l ‘expertise dommages ouvrage se sont révélées insuffisantes, c'est ainsi que le 16 février 2006, la société SPIEI Batignolles, pressentie pour faire les travaux de reprise a précisé qu'après avoir réalisé des sondages de vérification elle avait constaté que « les données concernant les fondations n ‘étaient pas conformes à ses (nos) éléments et remettaient en cause le mode opératoire ». Il ressort du rapport de M B..., maître d'oeuvre, en date du 28 décembre 2011, qu'après versement des indemnités d'assurance, les entreprises ont refusé de réaliser les travaux de reprise en sous oeuvre préconisés dès lors qu'a été découverte la présence du collecteur, la solution préconisée étant la démolition de la maison pour en reconstruire une autre. L ‘assureur dommages ouvrage de la construction du pavillon de Mme X..., la SMABTP, se trouve avoir été également l'assureur dommages ouvrage de la construction du pavillon de M et Mme Y.... Il ressort de l'acte de vente de la | décision 17-12.028 du 29/03/2018, partie 10 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ Mme Agnès Y..., domiciliée [...] ,
2°/ le syndicat national CFTC de l'Ingenierie, du conseil, des services et des technologies de l'Information, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 14 juin 2016 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige les opposant à la société SAP France, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 février 2018, où étaient présents : M. uglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Basset, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme Y... et du syndicat national CFTC de l'Ingenierie, du conseil, des services et des technologies de l'Information, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société SAP France ;
Sur le rapport de Mme Basset, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... et le syndicat national CFTC de l'Ingenierie, du conseil, des services et des technologies de l'Information aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Y... à payer à la société SAP France la somme de 1 500 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme Y... et le syndicat national CFTC de l'Ingenierie, du conseil, des services et des technologies de l'Information
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR partiellement débouté Mme Y... de sa demande de condamnation de la société Sap France à lui payer un rappel de salaire variable pour la période de 2004 à 2015 et de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal et capitalisation ;
AUX MOTIFS QU' il ressort des pièces du dossier que la salarié a signé les avenants pour les années 1999 à 2002 mais n'a pas signé les suivants à partir de 2003, 2004, 2005 et 2006; qu'aucun mail faisant état soit du retard des objectifs fixés soit du fait qu'ils étaient inatteignables n'émane de la salariée pendant ces années; que les sommes versées au titre des objectifs pour les années 2004 à 2014 s'élèvent à 92 569,09 euros; que cependant, les modalités de calcul ne sont pas précisées par l'employeur qui n'explique pas non plus le calcul des résultats qualitatifs et quantitatifs, affirmant avoir fixé les sommes en tenant compte du fait que les objectifs étaient entièrement réalisés; que le droit à rémunération variable résulte du contrat de travail; que les objectifs devaient être signés par la salariée; qu'à défaut pour cette dernière d'avoir signé les avenants relatifs aux objectifs à atteindre, sa rémunération variable doit donc être fixée en fonction du dernier avenant contractuel dont l'application se poursuit à défaut de modification de critère de calcul de la partie variable c'est à dire celui de l'année 2002; qu'il est tenu compte en outre du système comptable utilisé par l'employeur c'est-à-dire du nombre de jours facturables même si ce système ne dispose pas de contrôle précis, Madame Y... bénéficiant d'un contrat de forfait jours et exerçant des activités de représentante syndicale, et des jours productifs; que les objectifs fixés sont considérés comme ayant été atteints à hauteur de 100%; qu'au vu des nombreuses pièces produites, les modes de calcul proposés par les deux parties et des pièces du dossier que sur les 12 années, la base retenue pour fixer la rémunération variable étant de 11 000 euros x 12 = 132 000 euros – 92 569,09 euros soit la somme restant due de 39 431 euros;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE vu les avenants de rémunération pour les années 1999 à 2002 signés et ceux de 2003 et 2004 non signés; que vu les objectifs de l'année 2005 et les plans de bonus à partir de 2006 non signés; | cour d'appel de Versailles
6e chambre, décision 16-22.160 du 21/03/2018, partie 1 |
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que vu l'extrait du compte rendu de la réunion du 20 mars 2003 présenté au CE du 24 mars 2003 sur les dispositions particulières s'appliquant au salarié en qualité de représentant du personnel qui stipule que : « Pour l'année 2003 l'évaluation des représentants du personnel (le pourcentage de réalisation de l'objectif ) sera au moins égal à la moyenne des notations des autres membres de leurs équipes »; que madame Agnès Y... ne présente aucun document justifiant de la moyenne des notations des autres membres de son équipe; que lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail et à défaut d'un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes; qu'ainsi, si l'objectif de résultats dont le contrat de travail fait dépendre la rémunération variable n'a pas été déterminé, il appartient au juge de le fixer par référence aux années antérieures; que madame Agnès Y... justifie sa demande par le seul fait de l'absence d'avenant signé sans présenter de documents justifiant du niveau de réalisation des différents objectifs; qu'en conséquence, le Conseil ne dispose d'aucun élément qui justifie d'un droit à variable pour les années 2004 à 2012;
1. ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'il ressort des constatations de la cour d'appel que le droit à rémunération variable de Mme Y... résulte du contrat de travail et que les objectifs devaient être signés par celle-ci; qu'à défaut d'avoir signé les avenants relatifs aux objectifs à atteindre, sa rémunération variable doit être fixée en fonction du dernier avenant contractuel, c'est-à-dire celui de 2002, dont l'application se poursuit à défaut de modification du critère de calcul de la partie variable; qu'il n'était pas contesté que cet avenant prévoyait que la rémunération variable s'élève à 15 245 euros à 100% d'objectifs; qu'en retenant pour base pour fixer la rémunération variable la somme de 11 000 euros qui ne ressortait nullement des conclusions des parties, la cour d'appel a modifié les termes du litige, et partant violé l'article 4 du code de procédure civile;
2. ALORS également QUE lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail et à défaut d'un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes, de sorte que, si l'objectif de résultats dont le contrat de travail fait dépendre la rémunération variable n'a pas été déterminé, il appartient au juge de le fixer par référence aux années antérieures ; que, pour rejeter la demande de Mme Y..., en retenant, par des motifs éventuellement adoptés, qu'elle justifie sa demande par le seul fait de l'absence d'avenant signé sans présenter de documents justifiant du niveau de réalisation des différents objectifs, alors même qu'en cas de désaccord entre l'employeur et le salarié sur le montant de la rémunération variable prévue à son contrat de travail, c'est au juge qu'il incombe de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil alors applicable;
3. ALORS encore QUE lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail et à défaut d'un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes; qu'en reprochant à Mme Y..., par des motifs éventuellement adoptés, de n'avoir présenté aucun document justifiant de la moyenne des notations des autres membres de son équipe qui devait être au moins égale à son évaluation alors même qu'il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
4. ET ALORS en tout cas QUE la rémunération variable ne peut être réduite en raison de critères discriminatoires ; que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen, d'où il résultera qu'à tort la cour d'appel a exclu que la rémunération variable de la salariée ait été réduite en raison de la discrimination dont elle a été l'objet entraînera par voie de conséquence en application de l'article 624 CPC la cassation du chef critiqué.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
| cour d'appel de Versailles
6e chambre, décision 16-22.160 du 21/03/2018, partie 2 |
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Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande pour discrimination syndicale et salariale, et fondée sur le sexe, et de condamnation de la société Sap France à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice financier et du préjudice moral, et D'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande de fixation du montant de sa rémunération à la somme de 77 580 euros bruts par an à compter de janvier 2015 hors variable à fixer conformément aux usages pour les salariés consultants experts de même catégorie, et subsidiairement de sa demande de condamnation de la société Sap France à lui payer un rappel de salaire pour la période 2004 à 2014 incluse et les congés payés afférents, un rappel de salaire pour 2015 et les congés payés afférents, outre des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de la violation du principe d'égalité de traitement, avec intérêts au taux légal et capitalisation, et de sa demande de voir fixer sa rémunération à la somme de 77 850 bruts par an à compter de janvier 2015 hors variable à fixer conformément aux usages pour les salariés consultants experts de même catégorie;
AUX MOTIFS QUE vu l'article L.2141-5 et L.1134-1 du code du travail; que Madame Y... soutient qu'elle est victime de discrimination syndicale du fait de son appartenance à la CFTC et de ses mandats syndicaux, ces derniers ayant eu une incidence sur sa carrière et sa rémunération; que la société Sap soutient que ce grief est infondé; qu'il appartient au salarié qui se prétend victime d'une discrimination salariale ou d'une inégalité de traitement d'alléguer des faits ou d'apporter des éléments utiles laissant présumer qu'il est victime d'une telle discrimination ou inégalité de traitement; qu'il ressort des tableaux produits par la salariée que celle-ci a été désignée en 2008 en qualité de représentante syndicale du CHSCT jusqu'en novembre 2010 puis a été désignée comme conseiller du salarié par la direction départementale du travail le 24 septembre 2008, puis déléguée syndicale centrale de l'unité économique et sociale le 13 février 2009, et enfin représentante syndicale au comité d'entreprise; que Madame Y... fait valoir que sa rémunération a baissé depuis ses mandats syndicaux; que le salaire de Madame Y... est composé d'une partie fixe sur 13 mois composant 79% de sa rémunération (à l'embauche de 57 473,26 euros) et une partie variable de 21% selon les objectifs fixés et atteints annuellement, la part variable étant précisé au cours du 1er trimestre de chaque année civile; qu'aucune déclaration de revenus n'est produite afin de connaître le brut fiscal annuel de Madame Y...; que Madame Y... produit différents tableaux statistiques faisant état d'une rémunération annuelle brute entre 2000 et 2014 selon le bilan social de l'entreprise comprise entre 63000 et 82000 euros, tout en reconnaissant dans ses écritures avoir perçu pour 2013: 79 370,84 euros, 2014, 83 534,48 euros et en 2015, 83 912,24 euros soit des salaires en augmentation; que les courbes produites indiquant le montant moyen du salaire mensuel fixe de base montrent, pour les années 2000 à 2015, une augmentation de cette part de salaire de la salariée, notamment à partir de 2008 mais inférieure au montant moyen de salaire mensuel fixe de base d'autres salariés pour les mêmes années; que cependant, ce document n'est pas probant car il ne permet pas de faire la comparaison avec des salariés de même niveau d'études, d'expérience professionnelle, d'âge similaire et d'ancienneté équivalente, le panel des salariés utilisés afin de faire ces statistiques n'étant pas précisé; que par ailleurs, un récapitulatif a été dressé des rémunérations perçues par les consultants ayant un mandat syndical de représentant du personnel et cette pièce ne justifie pas les dires de la salariée et au contraire, montre que le salaire de Madame Y... a depuis 2004 un salaire OTE (salaire + variable) supérieur à celui de ses collègues consultants syndiqués, venant ainsi contredire les deux courbes fournies; que pour les années 2003 à 2011, le salaire fixe et variable de Madame Y... est supérieur à celui de ses collègues y compris investis d'un mandat syndical; qu'enfin, la liste des 48 salariés consultants hommes/femmes produite par l'employeur ne démontre pas non plus de différence entre les sexes pour les années 2008 à 2011; que le fait que les procès-verbaux de fin de négociation sur les rémunérations NAO ait fait référence année après année à l'inégalité homme/femme n'est pas suffisant pour caractériser la discrimination individuelle dont se prévaut Madame Y...; que Madame Y... estime que cette liste produite en pièce n° 65 est un échantillonnage de salariés « sélectionnés » par ce dernier et fournit une liste se salariés intégrés entre 1997 et 2001 à la position 2.3 et 3.1. qui n'est pas non plus probante, cette liste faisant état de salariés hommes de même âge, de même coefficient et ayant des salaires mensuels fixés inférieurs à celui de l'appelante; qu'enfin, la comparaison avec un seul salarié, M. | cour d'appel de Versailles
6e chambre, décision 16-22.160 du 21/03/2018, partie 3 |
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Christian A..., est inopérante car ce dernier n'occupe pas les mêmes fonctions que Madame Y..., participant au processus de vente des progiciels de la société Sap France et rattaché au département Sales alors que la salariée ne fait pas partie de l'équipe de vente; qu'il ressort des documents produits tant par la salariée que par son employeur que la discrimination invoquée, même si elle a été perçue ainsi, n'est pas démontrée que ce soit la discrimination syndicale, la discrimination hommes/femmes et celle fondée sur le principe : « à travail égal, salaire égal»; que les demandes à ce titre sont donc rejetées y compris la demande subsidiaire d'expertise afin que la salariée puisse justifier de la violation du principe d'égalité de traitement ainsi que la demande relative à la fixation à la somme de 77 580 euros bruts /an à compter de janvier 2015 hors variable à fixer conformément aux usages pour les salariés consultants experts de même catégorie ainsi que les demandes en réparation de la violation du principe d'égalité de traitement et du préjudice moral subi de ce fait;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE vu la courbe, du montant moyen du salaire mensuel fixe de base, dans laquelle la comparaison se fait entre le salaire de madame Agnès Y... et le salaire moyen des salariés de la société Sap France; que vu le bilan social 2002; que vu le récapitulatif des rémunérations perçues de 2003 à 2008 par les consultants investis de mandats de représentation du personnel; que vu la pièce n° 65 du défendeur qui montre que de 2001 à 2008, madame Agnès Y... avait non seulement son salaire fixe mais aussi son OTE (salaire fixe + 100% du variable) supérieur à celui de ses collègues; que de 2009 à 2011 son OTE était supérieur à celui de ses collègues malgré ses mauvaises évaluations; que vu la comparaison avec 27 autres consultants montrant que madame Agnès Y... a depuis 2004 un salaire fixe supérieur à la moyenne; que vu le tableau récapitulatif des rémunérations des 27 salariés occupant un emploi de « Business Processes Consultant » de 2003 à 2011; que vu le tableau synthétique et comparatif des rémunérations de madame Agnès Y... et des autres « Business Processes Consultant » de 2003 à 2011; que vu la courbe et le graphique comparatif; que vu la lettre recommandée avec avis de réception numéro [...] ; que la baisse de rémunération réelle de madame Agnès Y... est la conséquence de ses mauvaises évaluations entraînant une perte de salaire variable; que madame Agnès Y... n'apporte pas la preuve de la discrimination syndicale et salariale; que la société Sap France démontre avoir fait preuve de clémence lors de l'envoi d'un tract syndical à l'ensemble de la société par courrier électronique ; que la société Sap France apporte la preuve de la non-discrimination; qu'en conséquence, madame Agnès Y... sera déboutée de sa demande relative aux discriminations syndicales et salariales;
1. ALORS QU' aucun salarié ne doit faire l'objet d'une mesure discriminatoire en raison de son appartenance syndicale ou de ses activités syndicales ; que peut constituer un élément susceptible de faire présumer une discrimination le fait qu'une salariée investie de mandats ne reçoive pas la rémunération allouée aux autres salariés occupant des fonctions identiques ; que, pour rejeter la demande de Mme Y..., tout en relevant que les courbes produites indiquant le montant moyen du salaire mensuel fixe de base montrent, pour les années 2000 à 2015, une augmentation de cette part de salaire, notamment à partir de 2008 mais inférieure au montant moyen de salaire mensuel fixe de base d'autres salariés pour les mêmes années, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et partant violé les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail;
2. ALORS QU'en relevant qu'aucune déclaration de revenus n'a été produite afin de connaître le brut fiscal annuel de Madame Y..., sans examiner les feuilles de paie produites, sur lesquelles figure chaque mois le brut fiscal et sur celle du mois de décembre le brut fiscal annuel cumulé, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et n'a pas justifié sa décision au regard desdites dispositions
3. ALORS encore QU'en se bornant à relever que le récapitulatif des rémunérations perçues par les consultants ayant un mandat syndical de représentant du personnel montre que le salaire de Mme Y... a depuis 2004 un salaire OTE (salaire + variable) supérieur à celui de ses collègues consultants syndiqués, sans rechercher quelle aurait été une évolution de carrière et de rémunération normale pour Mme Y... si l'employeur lui avait confié des missions ayant une incidence sur sa rémunération variable, la cour d'appel a privé de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail, ensemble le principe de l'égalité de traitement ;
4 . ALORS surtout QU' en se fondant sur une pièce 65 d'où il résulterait que de 2001 à 2008, madame Agnès Y... avait non seulement son salaire fixe mais aussi son OTE (salaire fixe + 100% du variable) supérieur à celui de ses collègues; | cour d'appel de Versailles
6e chambre, décision 16-22.160 du 21/03/2018, partie 4 |
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que de 2009 à 2011 son OTE était supérieur à celui de ses collègues malgré ses mauvaises évaluations, sans se prononcer sur la nature de l'OTE signifiant « ON TARGET EARNINGS » soit « à objectifs atteints » , dont il était soutenu par la salariée (conclusions, p. 18) qu'il ne s'agit pas d'un complément de rémunération réelle, mais seulement une rémunération variable théorique, en sorte qu'elle ne pouvait entrer dans la comparaison, et qu'aucun document ne permettait donc d'étayer le contenu du tableau, la cour d'appel a encore privé de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail, ensemble le principe de l'égalité de traitement ;
5. ALORS également QUE l'employeur ne peut opposer son pouvoir discrétionnaire pour se soustraire à son obligation de justifier de façon objective et pertinente une différence de traitement entre des salariés exerçant les mêmes fonctions ; qu'en justifiant, par des motifs éventuellement adoptés, la baisse de rémunération réelle de Mme Y... par ses mauvaises évaluations entraînant une perte de salaire variable, la cour d'appel a violé les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail, ensemble le principe de l'égalité de traitement;
6. ALORS en outre QUE Mme Y... avait fait valoir que l'employeur ne lui avait pas donné de formations effectives à compter de la prise de ses mandats; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen clair et déterminant des conclusions d'appel de la salariée qui lui aurait permis d'apprécier si Mme Y... avait eu une évolution de carrière et de rémunération normale, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile;
7. ALORS de surcroît QUE nul ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire en raison de son sexe; que, pour rejeter la demande de discrimination en raison du sexe, en retenant que la liste de 48 salariés consultants hommes/femmes produite par l'employeur ne démontre pas non plus de différence entre les sexes pour les années 2008 à 2011 sans rechercher si la situation de Mme Y... était justifiée par rapport à celle d'un homme exerçant les mêmes fonctions et les mêmes mandats de représentant du personnel et syndical pour les années 2008 à 2011, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail, ensemble le principe de l'égalité de traitement ;
8. ALORS à tout le moins QU'en relevant une différence de traitement avec les salariés figurant sur les tableaux statistiques tout en l'écartant par des motifs inopérants selon lesquels les différents tableaux statistiques produits n'étaient pas probants car ils ne permettaient pas de faire la comparaison avec des salariés de même niveau d'études, d'expérience professionnelle, d'âge similaire et d'ancienneté équivalente, le panel n'étant pas précisé, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les salariés figurant sur les tableaux occupaient les mêmes fonctions que Mme Y..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail, ensemble le principe de l'égalité de traitement ;
9. ALORS enfin QUE Madame Y... avait fait valoir qu'elle exerçait également les mêmes fonctions que M. A..., de formation identique, puisqu'elle avait une compétence polyvalente en conseil avant vente et après vente qui était reconnue par la société elle-même, ce qui autorise la comparaison avec les salariés de ces deux groupes ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen clair et déterminant des conclusions d'appel de Mme Y..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande de condamnation de la société Sap France à lui payer des dommages et intérêts en réparation de la suppression des stocks options du programme Star pour la période de 2006 à 2009;
AUX MOTIFS QU' il est constant que le programme Star (Stock Appreciation Right) ne constitue pas un accord d'intéressement mais une gratification individuelle en fonction de la contribution des salariés à la performance du groupe et est fixée unilatéralement; que les conditions d'éligibilité sont précisées dans le document relatif à ce programme lequel indique être basé sur la performance individuelle du salarié telle que déterminée par son responsable, aucune éligibilité n'étant systématique; qu'ainsi, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir utilisé de façon discrétionnaire ce mécanisme, sujet à fixation annuelle au vu de la performance individuelle du salarié d'autant que les évaluations de la salariée ne justifient pas l'attribution de ces sommes; que cette demande est rejetée;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE vu le Star Program 2006, spécifiant les conditions d'éligibilité au programme Star, qui stipule que l'attribution des Stars est basée sur la performance individuelle du salarié, telle que déterminée par leur responsable; (qu'il n'y a pas d'éligibilité et de participation automatique ou systématique!); que madame Agnès Y... dit que le pourcentage de salariés bénéficiaires des stock options a fortement diminué à partir de 2007; que l'attribution des stocks options se fait de manière discrétionnaire et non systématique; que madame Agnès Y... confirme dans ses écritures que cette attribution n'est pas systématique; | cour d'appel de Versailles
6e chambre, décision 16-22.160 du 21/03/2018, partie 5 |
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que la suppression de l'attribution des Stars (2004) est antérieure à sa nomination en tant que déléguée syndicale (2006); que madame Agnès Y... ne présente aucune évaluation justifiant d'une performance individuelle satisfaisante; qu'en conséquence, madame Agnès Y... n'est pas fondée à réclamer l'attribution de stock options;
ALORS QU' en vertu du principe « à travail égal, salaire égal », l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre les salariés occupant des fonctions identiques; que nul ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire en raison de ses activités syndicales ; que l'employeur ne peut opposer son pouvoir discrétionnaire pour se soustraire à son obligation de justifier de façon objective et pertinente une différence de traitement entre des salariés exerçant les mêmes fonctions ; que, pour rejeter la demande de dommages et intérêts de Mme Y..., en estimant qu'il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir utilisé de façon discrétionnaire le mécanisme du programme Star dès lors qu'il est sujet à fixation annuelle au vu de la performance individuelle du salarié et que les évaluations de Mme Y... ne justifient pas l'attribution de stock options sans rechercher, comme elle y était invitée, si, du fait de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le défaut d'attribution de ces stock options à partir de 2006 n'était pas dû à sa nomination concomitante de déléguée syndicale, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail, ensemble le principe de l'égalité de traitement.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté le SICSTI CFTC de sa demande de condamnation de la société Sap France à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi en application des articles L.2131-3 du code du travail et 1382 du code civil;
AUX MOTIFS QUE ce syndicat est mal fondé puisque la discrimination syndicale alléguée n'est pas retenue;
ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur le deuxième ou troisième moyen qui précède emportera par voie de conséquence la cassation du chef du dispositif de l'arrêt qui a dit mal fondée la demande du SICSTI de condamnation de la société Sap France à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi en application des articles L.2132-3 du code du travail et 1382 du code civil, en application de l'article 624 du code de procédure civile. | cour d'appel de Versailles
6e chambre, décision 16-22.160 du 21/03/2018, partie 6 |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique, tenue au Palais de Justice, à PARIS, le vingt-huit février deux mille dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire LAURENT et les conclusions de M. l'avocat général MONDON ;
Vu l'appel interjeté par M. Bruno Z... de l'arrêt de la cour d'assises de la MEURTHE-ET-MOSELLE, en date du 15 décembre 2017, qui, pour viols aggravés et délits connexes l'a condamné à dix-sept ans de réclusion criminelle et cinq ans de suivi socio-judiciaire, ainsi que de l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu l'appel principal du procureur général et son appel principal du même arrêt en ce qu'il a acquitté M. Z... de l'accusation de viols et agressions sexuelles aggravés ;
Vu les appels incidents des parties civiles ;
Vu les articles 380-1 à 380-15 du code de procédure pénale ;
Vu les observations écrites du ministère public et des parties ;
DÉSIGNE, pour statuer en appel, la cour d'assises de la Moselle ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Laurent, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ; | décision 18-80.804 du 28/02/2018, partie 1 |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Félix Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 2), dans le litige l'opposant à Mme Jocelyne X..., épouse Y..., domicilié chez M. Z...[...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 février 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Y..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme X... ;
Sur le rapport de Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. Y... à payer à Mme X... la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts en vertu de l'article 1382 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE les griefs invoqués réciproquement par les parties sont identiques à ceux soumis à l'examen du premier juge ainsi que leur articulation sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; QU' à cet égard, ajoutant aux griefs non retenus pour le premier juge, ne sera également pas retenu à l'encontre de M. Y... le transfert de contrat d'une ligne téléphonique le 10 juin 2010 fautes pour Mme X... de rapporter la preuve du préjudice en résultant ; QU'en revanche, c'est à juste titre que, après un examen détaillé des pièces et attestations qui lui étaient soumises, les mêmes devant la cour, et le rejet justifié des attestations portant des témoignages indirects, le premier juge, par des motifs que la cour adopte, a retenu des fautes de M. Y... liées à son comportement à l'égard des membres de sa famille durant la vie commune et, à titre de réparation, a condamné ce dernier à payer la somme de 1 500 € à Mme X... en réparation de son préjudice moral ; QUE la décision déférée sera confirmée de ce chef.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. Félix Y... conteste par ailleurs avoir effectué un faux auprès du fournisseur d'abonnement téléphonique de son épouse indiquant avoir toujours eu l'usage personnel de la ligne ouverte au nom de Mme Jocelyne X... ; QUE pour autant, il apparaît peu probable que le 10 juin 2010, alors que les époux étaient en instance de divorce, Mme Jocelyne X... ait cédé son abonnement à son époux comme l'indique la pièce intitulée transfert de contrat qu'elle produit aux débats et qui comporte une signature nécessairement portée par l'époux ; QU'ainsi l'usurpation de la signature de l'épouse doit être regardée comme une faute ; QU'au vu de ces éléments et des fautes de l'époux liées à son comportement à l'égard des membres de sa famille durant la vie commune et à l'usage de la signature de l'épouse postérieurement à la séparation, il convient d'accorder à Mme Jocelyne X... des dommages et intérêts pour son préjudice moral à hauteur de 1 500 euros.
ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait tout à la fois confirmer le jugement ayant alloué à l'épouse une somme de 1 500 € en réparation du préjudice subi notamment du fait de l'usage de sa signature postérieurement à la séparation de fait, lors du transfert d'une ligne téléphonique, et considérer que l'épouse ne justifiait pas du préjudice causé par cet usage ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. Y... à payer à Mme X... la somme de 60 000 € à titre de prestation compensatoire ;
| cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 2, décision 17-16.150 du 14/03/2018, partie 1 |
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AUX MOTIFS QUE le mariage des époux Y... X... a duré 30 ans dont 24 ans de vie commune, sous le régime de la séparation de biens ; QUE le 29 novembre 1990, ceux-ci ont acquis indivisément, pour moitié chacun, un immeuble à usage d'habitation sis [...] , composé de sept pièces (dossier M. Y... pièce n° 104), estimé à environ 350 000 €, suivant attestation établie en 2010 et produite par Mme X..., et entre 325 000 € et 350 000 €, suivant attestation établie en 2013 et produite par M. Y... ; QU'aux termes des pièces produites, la situation des parties s'établit ainsi qu'il suit : Mme X..., âgée de 62 ans, atteinte de pathologies rhumatologiques chroniques invalidantes sans bénéficier d'une invalidité, sans formation particulière, exerce, depuis le 8 juin 2009 l'activité d'assistante d'éducation via un contrat à durée déterminée renouvelé chaque année sauf en juin 2015 sans justification du refus de renouvellement allégué ; QU'elle a perçu à ce titre, en moyenne mensuelle, en 2010, environ 761 €, en 2011, environ 999 €, en 2012, environ 908 €, en 2013, environ 939 € et, en 2014 et jusqu'en juin 2015, environ 945 € ; QUE non imposable, elle règle les charges incompressibles de la vie courante (téléphone, assurances et mutuelle complémentaire) se disant redevable d'un arriéré de taxe professionnelle d'un montant de 6 912 € en date du 2 avril 2012, sans justifier du règlement ou d'une quelconque autre issue, son époux prétendant avoir réglé cette somme sans en justifier davantage ; QU'hébergée à titre gratuit par son fils Elie, né d'une première union, faute de rapporter la preuve du versement allégué d'une indemnité de participation à ce dernier, elle n'a pu se reloger en dépit d'une demande formulée auprès des autorités compétentes eu égard à la faiblesse de ses revenus ; QUE la situation actuelle ne saurait cependant être retenue comme pérenne ; QUE la pension de retraite à laquelle elle peut éventuellement prétendre depuis juillet 2016 représente 556 € environ mensuellement, ce qui représente un montant extrêmement modique, faute d'avoir travaillé suffisamment longtemps eu égard au nombre d'enfants en charge pendant le mariage ; QUE hormis ses droits de l'immeuble indivis, elle ne dispose que d'un véhicule Renault Twingo évalué 3 500 € ;
QUE M. Y..., âgé de 67 ans, retraité, après avoir travaillé dans la publicité puis avoir été placé en invalidité de deuxième catégorie depuis janvier 1994, à l'issue de trois années de longue maladie, a perçu, en moyenne mensuelle, en 2010, environ 1 915 €, en 2011, environ 1 865 €, en 2012, environ 1 979 €, en 2013, environ 2 126 €, en 2014, environ 2 132 € et, en 2015, environ 2 074 € ; QU'il occupe le domicile conjugal, en étant redevable d'une indemnité d'occupation à l'indivision ; QUE hors charges incompressibles de la vie courante (eau, électricité, téléphones, assurance automobile Toyota, internet et complémentaire santé, etc.), non imposable sur le revenu, il règle la taxe foncière, l'assurance habitation, ces dernières à charge de créances contre l'indivision, et une échéance mensuelle de 187,56 € d'un crédit à la consommation CIC contracté en octobre 2009, à la destination ignorée, quelques semaines avant la séparation des époux, jusqu'en octobre 2019, les crédits BNP Paribas étant terminés hormis le crédit renouvelable d'un montant de 18 300 €, à la destination inconnue, contracté auprès de la BNP Paribas le 28 novembre 2011 jusqu'à fin 2019, postérieurement à l'ordonnance de non-conciliation, pour une échéance mensuelle de 580 €, ainsi que la prime annuelle d'un montant de 1 383,50 € au titre d'un contrat d'assurance décès d'un montant de 38 113 € passé auprès de la A... via la Banque Postale dont le compte n° [...], ouvert au nom de M. Y..., n'est pas produit aux débats, mais aussi la taxe d'habitation et l'échéance mensuelle de 40 € du prêt personnel d'un montant de 2 400 € contracté auprès de l'association TAHOR jusqu'en février 2019 ; QU'il prétend avoir réglé ou régler des dettes anciennes ("dettes d'honneur" à la réalité non justifiée et à l'échéance et l'issue inconnues ; gaz correspondant à des consommations bimestrielles, décembre 2010 à décembre 2011, postérieures à la date de l'ordonnance de non-conciliation ; taxe professionnelle de Mme X... également imputée par cette dernière sur ses dettes ; arriérés de cotisations de complémentaire santé Generali en 2009 au nom de Mme X... et au règlement non justifié ; téléphone mobile SFR au nom de M. Y... et affirmé utilisé par l'un des enfants ; dette auprès de Diners Club via un compte ouvert au nom de M. Y... à la cause inconnue) qui auraient été contractées pendant et en vue de la vie commune ou par Mme X..., en ce cas à charge de créances contre l'indivision ou contre elle ; QU'il soutient ne pas pouvoir entretenir le bien indivis à l'estimation rappelée ci-dessus, et disposer de comptes bancaires à découvert, sans en justifier. Il détient un contrat d'assurance vie A... Aviposte d'un montant de 38 113 € au 19 août 2009 et un véhicule Volkswagen Polo (échéance mensuelle de 135,35 € terminée depuis le 15 mars 2015) qu'il estime à 3 500 € ; | cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 2, décision 17-16.150 du 14/03/2018, partie 2 |
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QU'il est propriétaire en indivision du huitième, en nue-propriété, du domicile de sa mère (estimation inconnue) ; QU'au vu des éléments ci-dessus, c'est à juste titre que le premier juge a retenu l'existence d'une disparité dans les conditions de vie de chacun des époux créée par la rupture du mariage ; QUE cependant, en compensation de cette disparité, manifeste au titre des revenus, malgré l'opacité entretenue par l'époux sur ses charges, il y a lieu de porter le montant de la somme à verser, en capital, par M. Y... à la somme de 60 000 € ;
1- ALORS QUE, dans ses écritures d'appel (p. 23, al. 3 et suivants) M. Y... faisait valoir que Mme X... avait été gratifiée par sa mère, à la suite de la vente de l'appartement de celle-ci, d'une somme de 58 500 € ; que dès lors, la cour d'appel ne pouvait retenir que le patrimoine de l'épouse était seulement composé de ses droits indivis sur le domicile conjugal et d'un véhicule automobile sans s'expliquer sur cette gratification ; qu'elle a ainsi omis de répondre aux conclusions de M. Y... et méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, la cour d'appel a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2- ALORS QUE, de même, dans ses écritures laissées sans réponse (p. 23, al. 6), M. Y... faisait valoir que son épouse s'apprêtait à émigrer en Israël où sa mère tenait à sa disposition un appartement qu'elle avait elle-même quitté pour s'installer chez la plus jeune de ses filles.
3- ALORS QUE la cour d'appel, qui devait prendre en considération le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial, ne pouvait énoncer que M. Y... occupait le domicile conjugal, qui constituait le seul bien de l'époux, et serait redevable à ce titre d'une indemnité d'occupation, sans évaluer la mesure dans laquelle cette indemnité était susceptible d'amputer le patrimoine de l'époux en augmentant celui de l'épouse après la liquidation du régime matrimonial ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil. | cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 2, décision 17-16.150 du 14/03/2018, partie 3 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. C... X..., domicilié [...] CA (États-Unis),
contre l'arrêt rendu le 5 octobre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Jean-Bernard Y..., domicilié [...] ,
2°/ à M. Philippe Y..., domicilié [...] ,
3°/ à M. Pierre-Bernard Y..., domicilié [...] ,
4°/ à Mme Odile Y..., épouse Z..., domiciliée [...] ,
5°/ à la société Archives généalogiques Andriveau, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
6°/ à Mme Véra A..., domiciliée [...] (Croatie),
7°/ à Mme Zorka B..., domiciliée [...] (Croatie),
8°/ à M. E... J... , domicilié [...] (Croatie),
9°/ à M. H... J... , domicilié [...] (Croatie),
10°/ à la société Etude généalogique ADD et associés, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
11°/ à M. Pierre C..., domicilié [...] ,
12°/ à Mme Lana X...,
13°/ à Mme Lorenza X...,
domiciliés tous deux [...] (Belgique),
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 février 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Reynis, conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Reynis, conseiller, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. X..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. C..., de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Archives généalogiques Andriveau, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de Mmes A... et B..., de MM. E... et H... J... et de la société Etude généalogique ADD et associés, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 octobre 2016), qu'Henriette F..., dite D... G..., est décédée, le [...] ,sans descendance ; qu'à la suite des recherches généalogiques entreprises par les sociétés Archives généalogiques Andriveau et Etude généalogique ADD et associés, la dévolution de sa succession a été établie dans un acte de notoriété dressé par M. C..., notaire, en faveur de MM. Jean-Bernard, Philippe et Pierre-Bernard Y..., de Mmes Y..., A..., B..., et de MM. H... et E... J... ; que M. X..., se disant le fils de P... X..., décédée en [...], elle-même présentée comme cousine au quatrième degré de D... G..., dans la branche paternelle, les a assignés en pétition d'hérédité, nullité du partage et, en responsabilité, s'agissant des notaire et généalogistes ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son action, alors, selon le moyen :
1°/ que la preuve de la qualité d'héritier peut être rapportée par tous moyens ; qu'en l'espèce, M. X... faisait régulièrement valoir dans ses écritures que si l'acte de naissance de Q... F... indique qu'il était un enfant illégitime et mentionne que sa mère Barbara F... était célibataire alors qu'elle était mariée à Miro I..., c'était uniquement pour des raisons liées à un risque de forte réprobation sociale ; qu'en ne recherchant pas si ce risque social n'était pas de nature à expliquer que figure la mention « célibataire » sur l'acte de naissance de Q... F..., dont l'absence permettait de démontrer que Q... F... et R... F... étaient issus de la même mère, Barbara F..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 730 du code civil ;
2°/ que toute personne a le droit de faire établir son ascendance génétique, au besoin par une expertise scientifique ; qu'en jugeant que toute recherche génétique à des fins généalogiques se trouvait exclue du champ d'application de l'article 16-11 du code civil, la cour d'appel a violé le texte mentionné, ensemble l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
| cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-12.060 du 14/03/2018, partie 1 |
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Mais attendu, d'une part, que, sous le couvert d'un grief non fondé de défaut de base légale au regard de l'article 730 du code civil, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui a estimé que M. X... ne rapportait pas la preuve du lien qu'il alléguait avec D... G... ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir énoncé que, selon l'article 16-11 du code civil, l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques ne peut être recherchée, en matière civile, qu'en exécution d'une mesure d'instruction ordonnée par un juge saisi d'une action tendant soit à l'établissement ou la contestation d'un lien de filiation, soit à l'obtention de subsides, la cour d'appel, sans porter atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale, tel que garanti à l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a exactement retenu que toute recherche d'ADN à des fins généalogiques se trouvait exclue ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. C... X... de son action en pétition d'hérédité, aux fins de nullité du partage de la succession d'Henriette F..., dite D... G... et de son action indemnitaire à l'encontre du notaire et des généalogistes ;
Aux motifs que, « - le fond
Considérant que l'Etude ADD et les consorts J... contestent la qualité à agir en pétition d'hérédité de M. X... faute pour lui de démontrer que sa mère, P... X... née F..., avait elle-même la qualité d'héritière de la défunte ; qu'ils font plaider qu'aucune des pièces produites par l'appelant ne permet d'établir l'existence d'un lien de filiation certain entre Q... F..., père de sa mère, et Barbara F..., mère de Joseph F... et grand-mère de la défunte ; qu'ils prétendent que la thèse de l'appelant selon laquelle sa mère serait la nièce de Joseph F... et donc la cousine germaine de D... G... ne peut pas prospérer dès lors que les recherches généalogiques ont abouti à la conclusion que la mère de Q..., qui si elle s'appelle bien Barbara F..., serait née le [...] à Petrinja et serait décédée à [...] le [...] , et ne serait qu'une homonyme de Barbara F..., mère de Joseph, née le [...] à Krizevci, épouse de N... I... et décédée le [...] à [...] ; qu'ils font valoir que lorsque Q... est né, la grand-mère de D... G..., Barbara F..., était mariée depuis sept mois avec Miro I... ce dont ne fait pas mention son acte de naissance qui le dit né illégitime et né d'une mère célibataire ;
Considérant que la preuve de la qualité d'héritier peut être rapportée par tous moyens ; que l'acte de notoriété dressé par un notaire ne fait foi que jusqu'à preuve contraire ;
Considérant qu'il est constant que la défunte est née le [...] à Paris de Josip (ou Joseph) F... (ou F...) et de Louise K... et que Josip F... est né le [...] à Sisak de Barbara F..., née le [...] à Krizevci, mariée le [...] avec Miro I... et décédée le [...] à [...] ;
Considérant que M. X... produit les actes délivrés par les services de l'état civil de Croatie et leur traduction suivants :
- l'acte de naissance de R... F... née le [...] à Sisak précisant qu'il est enfant illégitime de Barbara F..., de religion catholique, résidant à [...] , et que le prêtre ayant célébré le baptême est V... L...,
- l'acte de naissance de Q... F... né le [...] à Sisak précisant qu'il est enfant illégitime de Barbara F..., célibataire, de religion catholique et résidant à [...] et que le prêtre ayant célébré le baptême est S...
- l'acte de mariage du Q... F... en date du 11 janvier 1909 précisant qu'il est âgé de 22 ans et que sa mère se nomme Barbara F... ;
Considérant qu'il soutient que la grande similitude des mentions des actes de naissance de Joseph et de Q... , mêmes prénom et nom de la mère, même absence de filiation paternelle, même religion, même lieu de naissance, même quartier de résidence de la mère à [...], même nom de famille des prêtres ayant célébré les baptêmes, confortent une filiation maternelle commune ; | cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-12.060 du 14/03/2018, partie 2 |
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qu'il ajoute que ni l'acte de mariage de Q... du 11 janvier 1909 ni son certificat de nationalité ne mentionnant sa mère comme décédée, en toute lettres ou au moyen d'une croix, comme de coutume en Croatie, Barbara F... née en [...] à Petrinja ne peut pas être la mère du marié et du titulaire du certificat de nationalité puisqu'elle est décédée en [...], soit avant le mariage et l'établissement du certificat ; qu'il fait plaider que l'acte de naissance de Q... qui est celui d'un enfant illégitime ne pouvait pas mentionner le nom du mari de sa mère, Miro I..., sauf à exposer les personnes intéressées à la réprobation sociale dans une communauté catholique ; qu'il invoque encore à l'appui de son argumentation le fait que Q..., son grand-père, porte, comme le père de D... G..., Joseph, le prénom d'un frère de Barbara F..., grand-mère de la défunte, et le fait que des registres d'école établissent que Q..., du fait de son statut d'enfant illégitime, a été pris en charge par un tuteur, nommé T... dont, comme il était d'usage, il a porté le seul nom afin d'éviter son rattachement au mari de sa mère et que ce n'est qu'après le décès de celui-ci, qu'il est apparu sous le nom de T... - F..., retrouvant son nom de naissance ; qu'il estime que des présomptions très sérieuses de liens de parentés découlent de ces indices précis et concordants et sont de nature à faire juger que la filiation de Q... à l'égard de Barbara F..., mère de Joseph et grand-mère de la défunte, est établie ;
Considérant que si les mentions de l'acte de décès et une lettre trouvée dans les papiers de la défunte, sa fille, permettent d'identifier la mère de Joseph F... comme Barbara F... épouse I..., laquelle est née le [...] à Krizevci, les actes d'état civil et autres documents concernant Q... F... indiquent seulement que sa mère est Barbara F..., sans aucune autre précision ;
Considérant que l'argument de l'appelant tenant à ce son grand-père, Q..., porterait le même prénom que l'un des frères de Barbara F..., grand-mère de la défunte, n'est pas déterminant ; qu'est tout aussi inopérant pour rattacher Q... à la grand-mère de la défunte le simple fait que la mère du marié dans l'acte de mariage de Q... ne serait pas dite décédée ;
Considérant qu'il est constant que l'acte de naissance de Q... le dit né d'une femme célibataire alors que Barbara F..., mère de Joseph, était à la date de cette naissance, mariée depuis sept mois avec Miro I... ; que le fait que Q... ait été doté d'un tuteur ne peut faire présumer qu'il en aurait été ainsi du fait de sa naissance hors du mariage de sa mère ni que le mari de celle-ci aurait été Miro I... ;
Considérant que le registre d'école de son aïeul que l'appelant verse aux débats, daté de 1901, mentionne que Q... O... F... a pour représentant légal le frère de sa mère, Anton F... ; qu'aucune des pièces du dossier ne démontre que la grand-mère de la défunte ait pu avoir un frère prénommée Anton ; que des extraits des registres de la paroisse de Petrinja (pièces 10 et 13 de la société ADD) montrent en revanche que Barbara F..., née le [...] à Petrinja, et un dénommé Antan F..., né le [...] , ont la même filiation à savoir Joanes F... et Aima U..., étant rappelé que la grand-mère de la défunte est née de Yvan F... et de Ana M... ;
Considérant que les similitudes que M. X... relève dans les actes de naissance de Joseph et Q... ne suffisent pas, en l'absence de tout autre élément concret et déterminant permettant d'identifier la mère de Q... comme Barbara F... née le [...] à Krizevci, épouse I..., à établir la preuve de l'existence du lien de parenté allégué par l'appelant entre sa mère et la défunte ;
Considérant que l'article 16-11 du code civil dispose qu'en matière civile, l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques ne peut être recherchée qu'en exécution d'une mesure d'instruction ordonnée par un juge "saisi d'une action tendant soit à l'établissement ou la contestation d'un lien de filiation, soit à l'obtention de subsides» ; que toute recherche d'ADN à des fins généalogiques se trouve ainsi exclue ;
Considérant que M. X... qui n'établit pas la qualité d'héritière de sa mère et, par conséquent, sa propre qualité à contester le partage de la succession de Henriette F..., doit être débouté de son action en pétition d'hérédité et aux fins de nullité du dit partage ;
Que P... X... n'étant pas jugée héritière de D... G..., les actions en responsabilité fondées par l'appelant sur des fautes du notaire et des généalogistes ayant concouru à la réalisation de préjudices financiers et moraux résultant de l'omission de sa mère de la succession de la défunte ne peuvent pas prospérer et doivent être rejetées sans qu'il soit nécessaire d'examiner leur recevabilité au regard de la prescription » ;
| cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-12.060 du 14/03/2018, partie 3 |
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Alors que, d'une part, la preuve de la qualité d'héritier peut être rapportée par tous moyens ; qu'en l'espèce, M. X... faisait régulièrement valoir dans ses écritures que si l'acte de naissance de Q... F... indique qu'il était un enfant illégitime et mentionne que sa mère Barbara F... était célibataire alors qu'elle était mariée à Miro I..., c'était uniquement pour des raisons liées à un risque de forte réprobation sociale (conclusions, pp. 27, 29 et 31) ; qu'en ne recherchant pas si ce risque social n'était pas de nature à expliquer que figure la mention « célibataire » sur l'acte de naissance de Q... F..., dont l'absence permettait de démontrer que Q... F... et R... F... étaient issus de la même mère, Barbara F..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 730 du code civil ;
Alors que, d'autre part, toute personne a le droit de faire établir son ascendance génétique, au besoin par une expertise scientifique ; qu'en jugeant que toute recherche génétique à des fins généalogiques se trouvait exclue du champ d'application de l'article 16-11 du code civil, la Cour d'appel a violé le texte mentionné, ensemble l'article 8 de la Cour européenne des droits de l'homme. | cour d'appel de Paris
Pôle 3 - Chambre 1, décision 17-12.060 du 14/03/2018, partie 4 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par le directeur régional des finances publiques des Pays de la Loire et du département de la Loire-Atlantique, domicilié [...] , représenté par le directeur général des finances publiques,
contre l'arrêt rendu le 5 janvier 2016 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige l'opposant à la Fondation Francqui, dont le siège est [...] (Belgique),
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 30 janvier 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Gauthier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Laporte, M. Grass, Mmes Darbois, Orsini, Poillot-Peruzzetto, MM. Sémériva, Cayrol, Mme Champalaune, conseillers, M. Contamine, Mmes Tréard, Le Bras, M. Guerlot, Mme de Cabarrus, conseillers référendaires, Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Gauthier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat du directeur général des finances publiques des Pays de la Loire et du département de la Loire-Atlantique, de la SCP François-Henri Briard, avocat de la Fondation Francqui, l'avis de M. Debacq, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 janvier 2016), que Maurice Z... est décédé à Nantes le [...] , après avoir institué comme légataire universel la Fondation belge d'utilité publique Francqui (la Fondation) et que cette dernière a demandé le remboursement des droits de succession acquittés par elle, en se prévalant des dispositions de l'article 795, 2° du code général des impôts ; qu'en l'absence de réponse de l'administration fiscale, elle a saisi le tribunal de grande instance afin d'obtenir ce remboursement ;
Attendu que le directeur général des finances publiques fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen, que conformément au 2° de l'article 795 du code général des impôts, les dons et legs consentis aux établissements publics ou d'utilité publique dont les ressources sont exclusivement affectées à des oeuvres scientifiques à caractère désintéressé sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit ; que s'agissant d'un régime d'exonération, ces dispositions sont nécessairement d'interprétation stricte ; que dès lors, seuls les établissements publics ou d'utilité publique remplissant effectivement la condition d'affectation exclusive des ressources à des oeuvres scientifiques peuvent bénéficier du régime d'exonération ; qu'en l'espèce, la cour d'appel avait relevé que « la Fondation Francqui créée en 1932 est une fondation d'utilité publique belge dont l'objet est de favoriser le développement du haut enseignement et de la recherche scientifique en Belgique », ce dont il résultait que la fondation n'affectait pas exclusivement ses ressources à des oeuvres scientifiques mais qu'elle contribuait également à l'enseignement ; que conformément aux principes susvisés, il résultait de ces constatations qu'à défaut d'affectation exclusive des ressources à des oeuvres scientifiques, la Fondation Francqui ne pouvait prétendre au bénéfice de l'exonération des droits de mutation à titre gratuit prévue au 2° de l'article 795 du code général des impôts ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations et a dès lors violé les dispositions susvisées ;
Mais attendu que l'arrêt constate que la Fondation justifie remettre chaque année un prix décerné à un jeune savant, en reconnaissance de travaux de recherche accomplis par ce dernier et que ses ressources, lorsqu'elle n'exerce elle-même aucune activité de recherche, sont affectées à des oeuvres scientifiques par le biais d'activités de promotion et de mécénat ; qu'il relève qu'elle soutient, par différentes actions, le développement de la recherche scientifique ; qu'en cet état, et dès lors qu'il ne saurait être déduit du seul objet statutaire de la Fondation, invoqué par le moyen, qu'elle n'affectait pas exclusivement, pour son activité, ses ressources à des oeuvres scientifiques, c'est sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le directeur général des finances publiques aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour le directeur général des finances publiques
| cour d'appel de Rennes
1ère Chambre, décision 16-14.561 du 07/03/2018, partie 1 |
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Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Nantes rendu le 4 octobre 2013, d'avoir annulé la décision implicite de rejet de la déclaration déposée par la Fondation Francqui devant le directeur des finances publiques de Loire Atlantique et d'avoir prononcé le dégrèvement des impositions, soit la somme de 792 841 € ;
AUX MOTIFS QUE « La Fondation Francqui créée en 1932 est une fondation d'utilité publique belge dont l'objet est de favoriser le développement du haut enseignement et de la recherche scientifique en Belgique. A ce titre, elle justifie remettre chaque année un prix décerné à un jeune savant, en reconnaissance de travaux de recherche accomplis par ce dernier. Par ailleurs, elle soutient, par différentes actions, le développement de recherches scientifiques, notamment par la formation des futurs chercheurs et savants. Ses ressources, lorsqu'elle n'exerce elle-même aucune activité de recherche, sont affectées à des oeuvres scientifiques par le biais d'activités de promotion et de mécénat. Aussi, la Fondation Francqui, par ses activités et ses objectifs qui sont de favoriser la mise en oeuvre et l'aboutissement d'oeuvres scientifiques, entre dans le champ d'application de l'article 795-2° lui permettant de bénéficier de l'exonération des droits de mutation accordée par ce texte en cas de réception de dons ou legs, ce qui est le cas du legs consenti à son profit par Maurice Z... » ;
ALORS QUE conformément au 2° de l'article 795 du C.G.I., les dons et legs consentis aux établissements publics ou d'utilité publique dont les ressources sont exclusivement affectées à des oeuvres scientifiques à caractère désintéressé sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit ; que s'agissant d'un régime d'exonération, ces dispositions sont nécessairement d'interprétation stricte ; que dès lors, seuls les établissements publics ou d'utilité publique remplissant effectivement la condition d'affectation exclusive des ressources à des oeuvres scientifiques peuvent bénéficier du Article 795-2° du code général des impôts - violation de la loi - régime d'exonération ; qu'en l'espèce, la cour d'appel avait relevé que « la Fondation Francqui créée en 1932 est une fondation d'utilité publique belge dont l'objet est de favoriser le développement du haut enseignement et de la recherche scientifique en Belgique », ce dont il résultait que la fondation n'affectait pas exclusivement ses ressources à des oeuvres scientifiques mais qu'elle contribuait également à l'enseignement ; que conformément aux principes susvisés, il résultait de ces constatations qu'à défaut d'affectation exclusive des ressources à des oeuvres scientifiques, la Fondation Francqui ne pouvait prétendre au bénéfice de l'exonération des droits de mutation à titre gratuit prévue au 2 ° de l'article 795 du C.G.I. ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations et a dès lors violé les dispositions susvisées. | cour d'appel de Rennes
1ère Chambre, décision 16-14.561 du 07/03/2018, partie 2 |
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize février deux mille dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller SCHNEIDER et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
Vu la demande en règlement de juges formée par le procureur général près la cour d'appel de ROUEN dans le procès suivi contre M. Franck Z... et M. Florian A... des chefs de vols aggravés et association de malfaiteurs ;
Vu les articles 657 et suivants du code de procédure pénale ;
Attendu que, par ordonnance du juge d'instruction au tribunal de grande instance d'Evreux en date du 18 février 2016 les nommés M. Franck Z... et M. Florian A... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel d'Evreux comme prévenus des délits susvisés ;
Attendu que par jugement du 9 mars 2017, le tribunal correctionnel d'Evreux s'est déclaré territorialement incompétent au motif qu'aucun des faits pour lesquels M. Franck Z... et M. Florian A... étaient poursuivis n'avaient été commis dans le département de l'Eure ;
Attendu que de l'ordonnance et du jugement précités, passés en force de chose jugée et contradictoires entre eux, résulte un conflit négatif de juridiction qui interrompt le cours de la justice et qu'il importe de faire cesser ;
Par ces motifs :
Réglant de juges, sans s'arrêter à l'ordonnance du juge d'instruction, laquelle sera considérée comme non avenue,
RENVOIE la cause et les prévenus, en l'état où ils se trouvent, devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rouen, qui, au vu de l'instruction déjà faite et de tout supplément d'information, s'il y a lieu, statuera tant sur la prévention que sur la compétence ;
ORDONNE que le présent arrêt sera notifié à qui de droit ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Soulard, président, Mme SCHNEIDER, conseiller rapporteur, M. Pers, Mme Dreifuss-Netter, M. Fossier, Mme Ingall-Montagnier, MM. Bellenger, Lavielle, conseillers de la chambre, Mmes Harel-Dutirou, Guého, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. QUINTARD ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ; | décision 18-80.805 du 13/02/2018, partie 1 |
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